Archives Mensuelles: février 2017
Naissam Jalal, musicienne en résistance…
… contre l’obscurantisme religieux, la violence faite aux peuples, à son peuple, aux femmes, aux enfants! Celles et ceux qui fréquentent régulièrement le Comptoir ont pu découvrir et aprécier cette musicienne de talent, aux côtés du contrebassiste Hubert Dupont. Née en France il y a 32 ans, de parents syriens, Naissam Jalal est évidemment touchée par la situation dans le pays de ses ancêtres. Mais loin des discours qui débouchent sur rien, elle utilise la musique et son instrument (flûte traversière) pour dénoncer et combattre les maux, la barbarie qui règnent dans son pays. L’album « Almot Wala Almazala » (La Mort plutôt que l’Humiliation), qu’elle a composé entièrement et enregistré en 2011, entourée du quintet bien-nommé « Rhythms of Resistance », est pour elle comme un hommage à son peuple massacré et à celles et ceux qui n’avaient plus qu’une solution, la fuite pour échapper à la mort.
Tout au long des 45 minutes de musique qu’elle nous offre, Naissam Jalal propose des mélopées et des mélodies très élaborées, une ballade entre souffrance et espoir, entre colère et tristesse, épaulée par un quintet de très haute qualité musicale. Le mélange subtil entre la culture moyen-orientale et le jazz est un vrai régal!
Parfois la flûte de Naissam Jalal se fait plus plaintive, plus stridente, lançant comme un appel à l’aide, notamment sur le morceau « Alep », lieu martyr symbole de la guerre en Syrie. 2’38 très d’une ambiance très prenante, que je place au même niveau que le morceau « Beirut » composé voilà quelques années, suite à un voyage au Liban et précisément à Beyrouth, par le trompettiste Ibrahim Maalouf.
Sans jamais tomber dans la cascade de notes, laissant quand il est nécessaire le silence s’immiscer dans les morceaux, s’installer, Naissam Jalal nous offre ici un joli carnet de voyage en musique, comme pour nous dire : « Voyez, au delà du peuple qu’on assassine, la Culture, l’Histoire, la Mémoire, que l’on souhaite réduire au silence ».
Ne passez pas à côté de ce cri de l’intérieur, de cet ode à la Liberté, de cet hymne à la Paix, à la Vie!
Guillaume.
Welcome to The Get Down!!!
A mi-chemin entre la fin du disco et les prémices du hip hop, dans le South Bronx de la fin des années 70, voilà le décor de la série de Netflix : THE GET DOWN. L’histoire d’un groupe de jeunes qui essaient de sortir de leur quotidien à travers la musique, la danse ou encore le graffiti.
Je ne m’attarderais pas trop sur la série en elle-même, n’ayant pas pu encore finir la première saison (la suite des épisodes ne sort que courant 2017). Cela dit, la première partie est déjà de très bonne facture, si le style de Baz Luhrmann (réalisateur de Moulin Rouge et Australia), excentrique et coloré, ne vous dérange pas. Le contexte historique, bien qu’en partie fictif, est bien documenté et avec Nas et Grandmaster flash comme consultant sur l’histoire du hip-hop, le sujet ne peut être que maitrisé.Quelques évenements marquants de cette époque New-Yorkaise viennent étoffer le tout, comme la fameuse panne de courant du 13 Juillet 1977, qui plongea la ville dans le noir pendant 2 jours.
Revenons donc à notre intérêt premier : la bande originale, qui selon moi, est l’une des meilleures de ces dernières années (avec Vinyl). Celle commercialisée, avec notamment les deux morceaux de Michael Kiwanuka remixés avec Nas : Rule the world et Black man in a white world ou encore les extraits de la série où les Get down brothers affrontent les Notorious 3 lors d’une battle enflammée, même Christina Aguilera réussit à nous pondre un morceau décent ! Egalement au programme, Janelle Monae, Lyn Collins et son légendaire « Think(About it) » ou encore Leon Bridges.
Ça c’est uniquement pour la version CD, en revanche, si vous prêtez l’oreille pendant la série, c’est là que l’atmosphère musicale de cette période est la plus interessante avec les classiques hip hop de Grandmaster Flash, Afrika Bambataa ou Sugarhill gang et en bonus des intros inédites de Nas pour chaque épisode, mais aussi de la Funk, du Disco, de la Soul et du Punk avec les Clash, Marvin Gaye, Celia Cruz pour n’en citer que quelques uns, hétéroclite vous avez dit ?
Avec une telle richesse musicale, difficile de se limiter à un ou deux morceaux, je vous ai donc concocté une petite playlist pour l’occasion.
Laurent
Dans la chaleur du Blues du Mississippi…
Après avoir eu un line-up nombreux et évolutif depuis sa création (1992), Mississippi Heat est aujourd’hui un quintet emmené vocalement notamment par Inetta Visor. « Cab Driving Man » (« Chauffeur de Taxi »), est le 12ème album de ce combo qui n’a qu’une seule devise : Le blues, rien que le blues, surtout le blues. Celui issu du berceau que constituent Chicago, La Nouvelle-Orléans, et le Mississippi.
Le moins que je puisse dire, c’est que d’entrée de jeu, le quintet donne le ton, la couleur blues est belle et bien là… !
Donc Mississippi Heat nous sert de « Cab Driving Man« , nous promène sur les rives du Mississippi, entre la Nouvelle-Orléans, Chicago, aux sons du boogie, du blues, de ces morceaux aux sons gras qui enchantent nos oreilles, ici au moins les miennes. Une ballade en 16 titres, qui fleure bon l’ambiance de Bourbon Street à Chicago, des bars-club où de nombreux groupes locaux s’évertuent à faire vivre l’histoire de cette musique, de ce patrimoine culturel, historique, que représente aujourd’hui le Blues. Chaque piste est jubilatoire à écouter, découvrir. Des arrangements riches, variés, avec toujours ce swing au milieu du jeu, qui donnent à ce disque une fraîcheur, une saveur particulière. Du blues qui ne donne pas le cafard!
Autour des voix de Inetta Visor, Giles Corey, Michael Dotson, racontant les misères du quotidien, les musiciens (tous excellents) vous emmènent sur les rives de ces contrées qui a vu naître, dans la douleur d’un esclavage mis en place dans les plantations du Sud et dans les champs de cotons, cette musique (Le blues) qui allait devenir la base de tout ce qu’on écoute aujourd’hui : Le gospel, le blues urbain, le blues-rock, la soul music, le rhythm and blues, la funk music, le rock, le rap, le R’n’B. Le Blues a fait des petits… qui sont devenus grands et qui ont accouchés de nombreux artistes de talents depuis ces 90 dernières années!
Oui « Cab Driving Man » est un disque revigorant, bourré de rythmiques entrainantes, de blues bien gras, dans la veine de ce que faisaient les Pères du Genre. Un régal! Alors, que ce soit pour les longues soirée d’hiver au coin du feu de cheminée, pour faire la route, ou tout simplement pour profiter d’un moment, ce disque est tout indiqué!
Laissez-vous guider sur les rives du Blues, le voyage n’en sera que plus agréable.
Guillaume.
Tété revient, l’air de rien…
Me voici, casque sur les oreilles, écoutant les mélodies du dernier album de Tété, « Les Chroniques de Pierrot Lunaire ». Retour aux sources du musicien et chanteur. Et je repars quinze ans en arrière, à l’époque de son premier album « L’Air de rien ». Je me laisse bercée par la douceur de sa musique, une sensibilité acoustique vraiment touchante. J’ai suivi son actualité musicale au fil des ans, mais je ne retrouvais pas cette émouvante et profonde limpidité de ce premier album.
J’apprécie beaucoup ce dernier opus. Un petit coup de cœur pour le blues du Soleil de Minuit et Persona non grata, évoquant la difficulté de l’artiste face à la page banche.
Comment interpréter le titre de cet album : devoir affronter la dualité du monde, faire face à certaines et difficiles réalités, alors que l’on voudrait se réfugier, dans les rêves et la douceur de la lune, la contemplation et la beauté. On rêve tous d’un monde parfait !
Un très agréable moment musical…
Carine
Voguons avec Jhené Aiko…
Premier EP de Jhené Aiko, sorti en 2013, « Sail out » est le disque qui a réellement fait découvrir la chanteuse Californienne. Porté par des collaborations prestigieuses, cet opus est une petite pépite R’nb/Pop. Seulement sept morceaux donc, mais pas de trous d’air dans l’album.
Comme une sorte de prélude à « Souled out » sorti un an plus tard, ce disque nous fait découvrir l’univers sombre et envoutant de Jhene. Les mélodies sont lancinantes et la voix de l’artiste nous transporte dès les premières secondes de « The vapors » jusqu’au « Comfort inn ending ».
La nouvelle princesse du R’nB s’est entourée , comme il se doit de la crème de la crème en matière de hip hop avec quatre morceaux sur sept rythmés par les verses de Kendrick Lamar, Childish Gambino, Ab–soul et Vince Staples, rien que ça !
Mention spéciale pour « Bed peace » et son clip avec Gambino qui reprend l’idée du documentaire du même nom de John Lennon et Yoko Ono, le grain de l’image, le contexte, tout est recrée à la perfection avec nos deux jeunes prodiges dans le rôle des légendes des années Woodstock.
Jhené Aiko est une artiste qui ne cadre pas avec le R’nB/pop actuel et le contraste est plutôt sympa, la jeune Californienne aux multiples origines est une belle artiste en devenir…
Laurent
Dom La Nena suit son chemin…
Souvenez-vous, c’était il y a déjà 4 ans! Dans le cadre de l’édition 2013 du Festival des Aventuriers de Fontenay-sous-Bois, une chanteuse-violoncelliste nommée Dom la Nena (de son vrai nom Dominique Pinto), s’était produite sur scène, devant un public aussi curieux que nombreux (Skip and Die allait prendre la suite). D’une voix douce, posée, assise avec son violoncelle, elle nous avait offert une parenthèse enchantée, au milieu de la programmation plutôt rock-électro de ce festival.
4 ans après, ayant enchainé les tournées, les rencontres musicales, elle nous revient avec un nouvel opus « Cantando », un 4-titres sur lequel elle rend hommage à 4 figures de la chanson : à Lupicinio Rodrigues, musicien-compositeur brésilien, à Violetta Parra, chanteuse, poète, peintre chilienne, au franco-belge Jacques Brel, et au groupe de folk américain Beirut et son leader Zac Condon. La musicienne-chanteuse brésilienne est très prolifique depuis son premier album « Ela » en 2013, puisque déjà pas moins de 6 disques sont à son actif en cette fin 2016!
« Cantando » est donc un petit cadeau, un écrin de musique simplement jouée sur laquelle la Nena vient poser sa jolie voix, tout en douceur, tantôt en anglais (« Scenic World »), en portugais (langue du brésil) sur « Felicidade », en espagnol sur « Gracias a la Vida » (déjà publié sur son précédent album « Soyo », et en français sur « Les Vieux ». Un sens de l’interprétation très juste, toujours avec le soucis de mettre le texte en avant, tout en accompagnant cela de son violoncelle.
Petit objet sans prétention, mais de qualité! La musique est un langage universel. Dom La Nena le prouve de manière élégante.
J’ai un vœu pour 2017 : Que Dom La Nena nous revienne avec un album complet, et des musiques toujours aussi bien ciselées.
Guillaume.
Nos samples rendez-vous #11 : Nas, Damian Marley et Amadou et Mariam
Quand le fils du grand Bob Marley et la légende du Queens se réunissent le temps d’un album, ça donne « Distant relatives », une incroyable aventure musicale sortie en 2010. Issu de cet opus, le morceau « Patience » où Nas et Damian Marley nous parlent de leurs inquiétudes sur le monde actuel et de la nécessité que chacun ait conscience qu’il est acteur d’un possible changement pour le meilleur.
Pour illustrer ces idées en musique, les deux compères ont choisi de sampler Amadou et Mariam et leurs morceau « Sabali » , la patience en Malien. Cette chanson de 2008 est le premier single du sixième album du couple, « Welcome to Mali ».
Pour le clip, Nas et Damian ont eu l’élégance de faire apparaitre Amadou et Mariam, chose assez rare lors de l’utilisation de sample, preuve du respect entre ces artistes. Lors du concert à Paris, le couple Malien a également été invité sur scène à chanter le refrain du morceau, la classe.
Laurent
1976-2016 : 40 ans après, le Punk est toujours vivant!
Pour beaucoup, le mouvement musical punk est né en angleterre, au milieu des années 70’s (1976 pour être exact), à une période où l’économie était (déjà) très en difficulté. Comme dirait le regretté Coluche (punk à sa manière, selon moi) : « c’est une « erreur graaaave »!
En effet, c’est aux Etats-Unis, à la fin des 60’s, que ce courant musical a vu le jour. Cette dénomination est née de l’imagination d’un critique de rock américain, pour identifier ce nouveau courant musical, désignant en fait les garage bands (groupes qui jouaient dans les garages), et le son très particulier des guitares électriques. Les groupes comme Sonics, 13th Floor Elevator, The Stooges (cher à Iggy Pop) étaient à l’époque les plus représentatifs.
En Angleterre, le mouvement s’est installé au milieu des années 70’s, jusqu’au début des années 80, alors que la société va très mal. Comme un besoin de révolte, de contestation, les groupes punks se montrent virulents, tels les Sex Pistols avec le fameux « Anarchy in the U.K. ». D’autres, comme les Clash de Joe Strummer, Stiff Little Fingers, The Ramones (dont il ne reste aucun membre vivant aujourd’hui), ou les Buzzcocks, sont apparus à cette occasion. Beaucoup de ces groupes feront d’ailleurs carrière.
En France, le mouvement punk, s’il apparaît dès 1974, inspiré de Lou Reed, des Stooges, des New York Dolls. Le label Skydog, qui produira Bijou, sera à l’origine du festival Punk de Mont-de-Marsan, en 1976-1977. Suite au passage des Sex Pistols au Châlet du Lac, en 1976, la scène française émerge vraiment, dès 1977. Asphalte Jungle, Starshooter (dont fit partie le chanteur Kent), Stinky Toys, puis la Souris Déglinguée dès 1979, et par la suite Les Béruriers Noirs, Lucrate Milk, OTH, Oberkampf, Les Sheriff, constitueront la scène punk française. Dans les années 90-2000, une version hardcore du punk va naître, avec comme fer de lance les Tagada Jones, Les Sales Majestés, groupes fortement influencés par la scène punk californienne de l’époque. Ces dernières années, Les Wampas et Ludwig Von 88 ont été les têtes d’affiches de ce courant musical sur les scènes françaises et internationales.
En 2016, la musique punk, son caractère révolté, contestataire, continue d’exister. C’est une très bonne nouvelle!
Guillaume.