Archives Mensuelles: avril 2021
Il était une fois… 1991 !

L’année est marquée par différents évènements dans différents domaines que ce soit politique, social, sportif : En janvier, le FLNC revendique une nuit bleue d’attentats, Claude Evin, ministre de la santé fait passer une loi sur l’interdiction de fumer dans tous les lieux publics et entreprises et sur la limitation de consommation d’alcools. Elle s’étend également à l’interdiction de de sponsoriser des évènements pour toutes marques d’alcools ou de tabac. La France s’engage, aux coté de ses alliés américains et britanniques dans la première guerre du Golfe en Irak. Le 2 mars, c’est la mort de Serge Gainsbourg qui frappe les esprits. En Avril, une loi est adoptée sur la réforme définitive du statut de la Corse, qui disposera de pouvoirs élargis. En juillet, Une loi sur une réforme hospitalière est adoptée. En septembre, Edith Cresson est la première femme à être nommée premier ministre. Klaus Barbie, ancien criminel de guerre nazi, condamné à perpétuité lors de son procès à Lyon en 1987, meurt en prison. Près de nous, en Algérie, de grosses manifestations islamistes ont lieu, c’est l’état de siège. En juin, après une révolution rondement menée, Boris Eltsine est élue président de la Russie. Berlin redevient la capitale de l’Allemagne. Le 25 juin, la Slovénie et la Croatie se séparent de la Yougoslavie. En Afrique du Sud, après 43 ans d’application, l’Apartheid est aboli. En décembre, les douze pays de l’union européenne concluent le traité de Maastricht, qui débouchera sur la création de la monnaie unique, l’Euro, en 2000.

En sports, à Roland-Garros, la jeune Monica Seles s’impose, chez les hommes c’est l’américain Jim Courier qui l’emporte. Le Tour de France est remporté par l’espagnol Miguel Indurain. Sa première victoire. Il en gagnera cinq d’affilée. En F1, c’est le brésilien Ayrton Senna (photo du dessus) qui est sacré champion du monde (il décèdera 3 ans plus tard, sur le circuit d Immola,. En rugby, le club du CA Bègles-Bordeaux devient champion de France.
Au rayon des morts célèbres de l’année, outre Gainsbourg cité plus haut, il faut se souvenir de la danseuse Martha Graham, de l’écrivain Graham Greene, des réalisateurs David Lean, Don Siegel (« The Verdict », « L’ évadé d’Alcatraz », « L’inspecteur Harry »), Franck Capra (« L’extravagant Mr. Deeds », « Mr Smith au Sénat »…), des trompettistes de jazz Stan Getz et Miles Davis, des acteurs Michael Landon (série télé « La petite maison dans la prairie »), Brad Davis (vu dans « Midnight Express », « Les Chariots de feu », « The Player ») Klaus Kinski, (« Et pour quelques dollars de plus », « Docteur Jivago »….) Yves Montand (« Z », « L’aveu », « César et Rosalie », « Le sauvage », « Vincent François Paul et les autres », « Le choix des armes », « Manon des sources », « Jean de Florette »…), de l’actrice Lee Remick (« Un homme dans la foule », « Le deuxième homme », « La grande menace »…), des rockeurs anglais Freddie Mercury, chanteur du groupe de rock anglais Queen, et Vince Taylor, enfin de l’industriel japonais Soishiro Honda.
Place à l’histoire inventée.
San Juan de Puerto Rico. Quartier de la vieille ville. Ses rues pavées, ses maisons de couleurs différentes. Depuis la disparition de Fabianna, deux ans plus tôt, du côté de Manille (lire « Il était une fois… 1989!« ), Gabriel et Jessica ne se remettent pas de la perte de leur soeur ainée. Gabriel était surnommé « The Fly », du fait de sa petite taille, de sa silhouette fine. Jessica quant à elle, sa silhouette était proche de sa défunte soeur. Elancée, brune, sportive. Tous les deux trainent depuis le décès de Fabianna une grande mélancolie. Gabriel, pour laisse son esprit vagabonder, s’évader, écoute de la musique. Il pense aussi souvent à son ami de jeunesse, Diego, emprisonné pour cinq ans, suite à des vols à répétitions, qui, derrière les barreaux, essaye de rester libre dans sa tête pour ne pas devenir fou. Lui aussi écoute de la musique, lit beaucoup, pense sans arrêt à celle qu’il appelle tendrement sa « gypsy woman », Renata, qui vient le voir une fois tous les quinze jours au parloir de la prison. Celle-ci ne cesse de lui répéter, pour le rassurer : « tout ce que je fais, je le fais pour toi uniquement ». Elle élève seule du coup leurs deux enfants, Paulo et Julia, 7 et 5 ans. A la fin de chaque séquence de parloir, Renata et Diego se quittent sur un baiser volé, une trace d’amour furtive jusqu’à la prochaine, dans quinze jours. Terrible attente. Jamais, depuis que Diego est enfermé, Renata n’a eu envie de partir ailleurs, de s’ouvrir à un autre homme.
Jessica de son côté, va souvent rendre visite à une amie, nommée Brenda, qui vient d’avoir un bébé, avec son chéri, Elvis, prénom obtenu en hommage à la vedette américaine. Brenda et Elvis sont très croyants et ne veulent pas perdre ce fil religieux, aussi décident-ils de faire baptiser leur fille, Anastasia, dès que ce sera possible. Brenda ne cesse de s’émerveiller de sa fille, et répète à l’envi à Jessica « C’est ça qui est bon… l’amour, le bébé, la vie. » Jessica est émue, des larmes perlent sur ses joues. La raison, elle qui vit secrètement depuis longtemps une histoire d’amour avec la jolie Joy, une belle américaine installée à San Juan depuis 10 ans, sait qu’elle ne pourra jamais avoir d’enfants. Joy et Jessica se sont rencontrées il y a cinq ans déjà, à une époque ou Joy était « so sad », sans but dans la vie, sans soleil dans la tête. sans personne pour la rendre heureuse. Puis un soir, se promenant sur la place Centrale de San Juan, Joy aperçu Jessica assise sur un banc. Sans aucune hésitation elle se dirigea vers elle. S’engagea alors une discussion, passionnée, des regards qui en disent long. Ce fut un coup e foudre.
Très vite, Joy, qui vit dans un quartier protégé de San Juan, dans un bel appartement, spacieux, au sein d’un vieil immeuble, accueille Jessica chez elle. Les deux nouvelles amoureuses vivent une passion sans limites, faite de rires, d’étreintes et de discussions riches sur leurs vies respectives. Joy, depuis son arrivée il y a dix ans à San Juan, s’est fondu dans la vie locale, au point de prendre la nationalité et de pouvoir ainsi intégrer la vie publique locale. D’abord dans des associations de quartiers, pour aider à la scolarisation, puis au niveau municipal, en tant que conseillère à l’éducation. Jessica, créatrice de bijoux artisanaux vendus sur les marchés, profite à fond de chaque instant avec Joy, car elle sait que si leur histoire est découverte, tout peut s’arrêter du jour au lendemain. L’amour du risque pour un amour total.
Un midi, dans un bar de San Juan, Joy et Jessica, plus heureuses que jamais, prennent du bon temps, déjeunent en paix tout en sirotant un cocktail local au son de la musique portoricaine. Quand un homme, un soldat en permission, qui a déjà pas mal abusé de la boisson, s’approche d’elles et commence à les insulter, gratuitement, à faire des remarques désobligeantes sur leur couple. « Bouge de là » vocifère-t-il sans ménagement en pointant du regard Joy. Celle-ci ne bronche pas, toute à sa surprise. Ne tenant pas à laisser sa compagne se faire humilier en public, Jessica se lève, et sans prévenir, assène une grande claque bien appuyée à l’intrus désagréable, étonné de cette réaction qu’il n’a pas vu venir. Le militaire, désarçonné, recule devant ce coup inattendu, puis revient à la charge, sur de sa force masculine. Erreur. Jessica a fait dix ans de karaté. Elle esquive l’arrivée de son agresseur et d’une clé de bras l’immobilise net. Joy est stupéfaite, tout comme l’assistance présente ce midi-là. S’avouant vaincu, surtout ne voulant pas subir davantage la foudre de Jessica, l’homme s’enfuit sans demander son reste. Jessica se rassoie, Joy l’embrasse tendrement, comme pour la remercier de tant de promptitude à réagir et à défendre leur honneur. Jessica sourie et murmure à l’oreille de Joy : » nothing can’t stop this thing we started ». Joy alors Jessica très fort dans ses bras. Le repas reprend.
Sous le soleil de San Juan, pour Jessica et Joy, Gabriel, Diego, Renata et Elvis, Il n’est pas simple d’être heureux. Mais la vie prend le dessus. Inexorablement.
Guillaume.
Cabrel, le citoyen derrière le musicien.

Sorti de sa retraite discographique, le troubadour d’Astaffort, alias Francis Cabrel, est revenu en 2020, en pleine année pandémique et confinée, avec un album intitulé « A l’aube revenant« . Il y a longtemps que j’avais laissé de côté ce chanteur-compositeur-interprète, sans doute parce que lui même s’était un peu retiré du monde, à l’abri des regards, reclus dans son refus, entouré des siens. Mais comme pour les marins, l’appel du large a été le plus fort. Ici celui de retourner en studio, de rappeler sa vieille garde de complices de longue date, pour revenir à l’essentiel, écrire, composer, matière essentielle pour ce ciseleur de mots et de musiques, qui nous enchante depuis bientôt cinq décennies. Restait donc à voir ce que donnerait ce nouvel album, enregistré, je le disais plus haut avec sa bande habituelle, à savoir Denis Benarrosch (percussions), Laurent Vernerey (contrebasse), Michel Amsellem (piano), Claude Égéa (trompette), Gérard Bikialo (orgue hammond, piano), Michel Françoise (réalisation), et les trois voix féminines de Himiko Paganotti, Julia Sarr et Olyza Zanatti. Claude Sicre, membre des Fabulous Troubadors, chanteur occitan, a participé également à cet album.
Dans ce nouvel album, Francis Cabrel évoque des thèmes qui lui sont habituels, comme ceux de l’amour et l’écologie avec « jusqu’aux pôles « , mais année 2020 et contexte particulier oblige, il ne pouvait pas ne pas évoquer la crise sanitaire démarrée en février 2020. Il le fait à travers trois titres, « les beaux moments sont trop courts », « Peuple des Fontaines », qui évoque superbement l’absence du public, la fermeture des lieux de cultures et « parlons-nous », qui traite de l’isolement dû au Covid, isolement contre lequel il faut lutter en se parlant. Il traite de la relation père-fils très joliment dans » Te ressembler », qui parle de son père mort trop jeune pour avoir vu son fils connaître une existence heureuse, après un choix hasardeux dû à la rencontre avec une guitare. En amoureux des mots, de la mangue française, il fait un détour par le moyen-âge pour rendre hommage aux troubadours, ces « rock-stars du Moyen Age » comme il les nomme. Le tout sur fond d’orchestre à cordes. Il faut savoir que quatre des chansons de cet album sont inspirées de textes du Moyen-Age. Et parce que les mots sont sa nourriture quotidienne, son breuvage essentiel depuis plus de cinq décennies, il s’insurge avec une belle dérision mélangé de colère de la disparition des librairies pendant le premier confinement (heureusement depuis elles ont été déclarées « produits de première nécessité » par le gouvernement…ouf !). Après avoir adressé une tendre lettre à un Jacques qui vit en Corse entouré de ses chats ( il s’agit évidemment du dandy, de la vieille canaille, Jacques Dutronc himself), il termine sa nouvelle production en adressant deux lettres d’amour, les deux sans doute destinées à sa femme.
Vous allez me dire, « Bon ok mais la musique dans tout ça ? ». Hé bien, je dirai que si le bonhomme s’est assagi, très loin de « ma place dans le traffic » ou de « la corrida », cela reste de bonne facture mais franchement à en être autant ciselée, précise, je me crois revenu à « samedi soir sur la Terre », album empli de mélancolie, de tristesse, de nostalgie déjà. Ici ça ne décolle quasiment jamais, l’ambiance générale est à la proximité, l’intimité. Les mélodies sont toujours très ciselées, les arrangements aux petits oignons. La voix, certes quasi intacte parvient encore à surprendre, mais globalement, moi qui fut grand fan de Francis Cabrel, là j’avoue être déçu. Les compositions sont pourtant variée, riches, mais la magie n’a pas opéré en moi. Sans doute les adorateurs-trices du chanteur se régaleront-ils-elles.
Guillaume.
Il était une fois… 1990 !

Cette année démarre par la disparition de Charles Hernu, ex-ministre de la Défense de François Mitterrand, impliqué dans le scandale du Rainbow Warrior. Ce même mois de janvier deux personnalités du cinéma américain s’en vont à jamais, Barbara Stanwick et la sulfureuse brune Ava Gardner. Le mois suivant est marqué par un événement historique, Nelson Mandela, prisonnier-symbole des geôles de l’Apartheid, sur l’ile de Robben Island pendant 27 ans est enfin libéré (je me rappelle très bien du jour de sa libération, un dimanche ensoleillé et avoir assisté à cela devant ma télé, grand moment, voyant cet homme marcher droit, tête haute). En mars la Lituanie devient indépendante, et en URSS, Mikhaïl Gorbatchov est élu président pour 5 ans. Au mois d’avril, la NASA lance un télescope géant, Hubble, dans l’espace. En juin, la Russie déclare son indépendance vis à vis de l’URSS. Deux mois plus tard, en août, l’Irak de Saddam Hussein envahit le Koweït. 5 jours après, les Etats-Unis déclenchent l’opération « tempête du désert ». En septembre, Nintendo lance sa première gameboy. Au mois de décembre, Lech Walesa est élu président de la république de Pologne. En sports, il faut noter la victoire de la jeune (16 ans!) Monica Seles à Roland-Garros face à Steffi Graf. Chez les hommes, l’équatorien Andres Gomez bat le favori américain André Agassi en 4 sets. L’Ecosse remporte le tournoi de rugby des 5 nations. En Formule 1, le brésilien Ayrton Senna est titré dans des conditions houleuses face à son coéquipier et rival Alain Prost. En ski, chez les hommes, le suisse Marc Giradelli et l’italien Alberto Tomba dominent la saison en slalom et en géant. Chez les femmes, Carole Merle s’impose en super-G. Florence Arthaud (décédée tragiquement en 2015 lors d’un accident d’hélicoptère en Argentine, qui coûtera aussi la vie à Alexandre Vastine, Camille Muffat) surnommée « la petite fiancée de l’Atlantique » gagnera la course à la voile de « la route du rhum ». Elle est jusqu’à ce jour la seule femme vainqueur ce cette compétition. En football, la coupe du monde a lieu cette année-là en Italie. La finale opposera le tenant du titre, l’Argentine, emmenée par Diego Armando Maradona, à l’Allemagne réunifiée, dont c’est la première compétition officielle, qui finira par l’emporter 1-0. C’est la revanche de la finale ayant eu lieu quatre ans auparavant au Mexique, sacrant la bande de Maradona. Au rayon des décès, il faut noter ceux des acteurs français Pierre Dux et Michel Beaune, d’Ugo Tognazzi, de Rex Harrison, des actrices Delphine Seyrig, Greta Garbo (photo ci-dessous), Paulette Goddard, r., de la chanteuse de jazz Sarah Vaughan (seconde photo ci-dessous), du chanteur-comédien Sammy Davis Jr. , membre du fameux Rat Pack avec Franck Sinatra et Dean Martin, du réalisateur Jacques Demy ou du compositeur de musique Léonard Bernstein. L’écrivain Alberto Moravia clôt cette triste liste.
Place à l’histoire inventée.
Un soir d’hiver, dans un bar-restaurant d’une ville du grand nord canadien, Cash City, bordée de montagnes, de mines de charbon, de rivières où les chercheurs d’or se précipitent régulièrement. Dans cette ville cité un peu paumée et peu peuplée, le « Tears of the Earth » est l’endroit où la population aime à se retrouver le soir, surtout le week-end. C’est le cas des frères Mc Illroy, John, David et Samy. trois gaillards de 30, 28 et 25 ans qui travaillent à la mine de Waterfalls, au nord de la ville. Comme chaque vendredi, les trois hommes viennent passer une soirée pour se détendre après une semaine de dur labeur au fond de la mine. Oublier les conditions de travail, la poussière, la toux, l’exiguité et la profondeur de la mine. Ses risques d’éboulements aussi.
La salle du bar-restaurant est pleine à craquer. Dans un coin, selon une ancienne tradition, un pianiste joue des airs afin de mettre une ambiance dans ce lieu. Pas loin de là, les trois frères se sont attablés pour prendre un verre et manger. Rire, se raconter des histoires aussi. Cela fait bientôt une heure qu’ils sont là lorsqu’un individu franchi les portes du « Tears of the Earth », et se dirige droit vers leur table. Tout de suite il pose son regard vers la grosse sacoche posée sur la table. Son nom est Jean Leloup, une personne à la triste réputation. Cherchant toujours le sale coup, le coup de poing à donner pour un oui ou pour un non. Mais là, la raison est cette foutue sacoche. Car il a un contentieux avec un des trois frères, David en l’occurrence. Une dette de poker non réglée. Alors il vient réclamer son dû. Mais John, en frère ainé, s’interpose, mets la main sur la sacoche et d’un regard noir accompagné d’une voix sourde intime à Jean Leloup de déguerpir tout en lui indiquant, regardant la sacoche « U can’t touch this! ».
Au bar, une fille nommée Joséphine, ressemblant à une barbie girl s’agite derrière la caisse. Il est presque 22h, indique la grosse pendule qui trône au dessus du bar. C’est l’heure à laquelle arrive en général Maria, une belle femme brune, aux cheveux longs, yeux verts. Lorsqu’elle rentre, se faufilant entre les différentes tables, les hommes présents ne manquent pas de commenter son allure, de faire des remarques déplacées à son encontre. Mais elle n’en a cure. Elle voit tant d’hommes qui passent sans s’arrêter dans cette ville qu’elle aime tant. Sa tête et son coeur sont occupés depuis quelques temps par un homme. Elle salue Joséphine d’un sourire, dit bonjour à Ricky, le patron, et prend son service. Dans leur coin, les frangins Mc Illroy continuent de profiter de leur soirée, bière après bière. C’est bientôt la cinquième tournée de la soirée. John, qui a repéré Maria, lui fait signe.
Maria se présente à la table, jetant furtivement un regard doux à Samy. Ce qui n’échappe pas à ses deux frangins. La question fuse : » Vous vous connaissez? ». Samy, pris au dépourvu, rougi, admet la vérité. Oui il connaît Maria. Mais n’avoue pas tout de suite qu’il aime cette femme. Il veut garder cela pour lui. John et David comprennent vite. Mais n’en veulent pas à Samy. Pour fêter cela, John offre une tournée. Maria repart, commande prise et un peu gênée par ce qui vient de se passer. John et David se retournent vers Samy et d’un approbatif « What a woman », félicitent chaleureusement leur frère cadet, connu d’eux pour être timide envers la gent féminine. Samy leur avoue alors que cela fait plusieurs semaines qu’il voit Maria, et que ses sentiments pour elle sont très forts. « Oui je l’adore….. et réciproquement » dit-il de sa voix timide. Quand Maria revient avec les bières commandées, John et David, se montrent légèrement goguenards, blagueurs, ce qui dérange, irrite Samy et déstabilise Maria. Les raisons sont simples.
Plus jeunes, les trois frangins et Maria, ont grandi dans le même quartier et fréquenté la même école de la vile, le même collège de la région. John d’abord, puis David ont été amoureux de la jolie Maria. Mais amoureux éconduits. frustrés de cet amour, ils en ont gardé colère et rancoeur de longues années envers la belle devenue serveuse au « Tears of the Earth ». Voilà maintenant que leur frère cadet, qu’ils jugent moins séduisant qu’eux, a conquis le coeur de Maria. De quoi raviver la flamme de la colère. Devant le visage soudain fermé qu’ils observent chez Samy, John et David préfèrent faire profil bas, la jouer seigneur et admettre l’idée, afin de ne pas briser la fratrie, ni fâcher Samy qui a le sang chaud, le coup de poing efficace.
Samy et Maria sont éperdument amoureux depuis leur première rencontre. Samy ne cesse de clamer sa flamme à sa dulcinée, avec qui il envisage de voyager autour du monde, de profiter au maximum aussi des moments de silence offerts par dame Nature. Tous deux sont amoureux des mots, ne cessent de dire des poèmes lorsqu’ils se voient. « Nothing compares to U » répond parfois Maria à son tendre amoureux. Tous les deux se font une promesse, d’aller vivre ailleurs, loin de ce trou perdu, de refaire leur vie, autrement, dans un environnement plus calme. Loin des mines à charbons harassantes et des bars pas toujours bien fréquentés.
Quelques temps après cette décision prise un après-midi lors d’une promenade le long de la Nirvana river, qui longe Cash City, Maria démissionnera de son boulot de serveuse au « Teas from the Earth » et Samy quittera sans regret le fin fond de la mine de charbon qui lui use la santé et les poumons. Joséphine, Ricky, John, David et les habitants de Cash City ne verront bientôt plus ce couple dans leurs rues. Une nouvelle vie s’annonce.
Guillaume.
Lettuce, du groove qui résonne plein pot.

Originaire de la ville de Boston (comme les groupe de hard-rock Aerosmisth cher à Joe Perry et Steven Tyler, et bien sûr.. Boston), Lettuce, combo de musique funk au groove extrêmement fondé en 1992, contient six musiciens, nous a proposé da dernière galette musicale l’an dernier, intitulée « Resonate« . Le titre de ce septième album du groupe (depuis Outta here, 2002) est plus que bien choisi tant la musique de ce quintet groove avec une efficacité redoutable, un sens rhythmique qui vous emmène dès la première mesure du premier morceau « Blaze ». C’est ultra puissant. Les titres s’enfilent comme des perles, sans jamais se reposer.

Moi qui ne qui ne connaissais pas ce groupe avant d’écouter cet album, je suis sous le charme. C’est puissant, coloré, varié. Après « Blaze »qui sert d’entrée en matière, viennent « Good Morning Mr. Shmink », le très beau « Ndugu », puis « Checker Wrecker », le doux « Silence is golden », et pour moi l’un des plus beaux morceaux du disques, « Moksha », aux influences indiennes, que restituent parfaitement guitare et claviers, mais aussi la présence très subtile d’un sitar et d’un tabla. C’est juste magnifique. On se croit immédiatement transporté au pays des Maharadjahs, du Taj Mahal, bref c’est vraiment un bonheur que d’écouter ce morceau. On sent que les gaillards ont soit voyagé là-bas, soit beaucoup écouter Ravi Shankar, George Harrison (qui lui-même a voyagé là-bas et influencé la musique des Beatles à son retour), le guitariste John McLaughlin et le percussionniste Trilok Gurtu… la durée du morceau, plus de sept minutes en est la plus belle expression. Après on passe à un « Mr. Dynamite » qui évoque forcément James Brown. avec cependant des sons de claviers un brin expérimentaux, et ce groove funky omniprésent que Father of Soul n’aurait pas renié pour danser dessus. Le dialogue entre la guitare et la trompette est très joli à écouter. Avec « Remember the children », on retombe dans un funk pur des années 70, époque George Clinton, James Brown, Tower of Power. Là, en plus des instruments, viennent se greffer des voix. Pas essentielles à mon sens… mais bon. Puis cela enchaine avec « Lude », petit intermède qui débouche sur le funky-disco » House of Lett », qui aurait eu toute sa place dans les boites de nuit des années 70 et 80. A entendre ce morceau, comme le reste de l’album, on n’a qu’une envie, se lever du canapé, direction le dance-floor, et laisser aller nos corps en rythmes (n’est-ce pas cher Laurent…😉). Ca fait tellement de bien. Pour clore le disque, « Resonate » qui donne son nom à l’album est un morceau au groove des plus planant, un peu spatial… mais très agréable pour finir cette production 2020.
Il faut noter que ce groupe, pour maitriser son travail de bout en bout, a créé son propre label, Lettuce Records, sur lequel il a enregistré plusieurs albums tels que : « Crush » (2015), « Mont Crushmore » (2016), « Elevate » (2019) ainsi que l’album live « Witches stew » (2017). Alors si vous aimer cet album, n’hésitez pas à vous plonger dans la discographie de ces bostoniens au groove chevillé au corps.
Cet album donne la pêche, le sourire, et par les temps qui courent, ça fait un bien fou. Reste plus qu’à les voir oeuvrer sur scène… mais ça, va falloir être patient encore un peu.
Guillaume.
Rymden, marins de l’espace…musical.

Vétéran de la scène musicale nordique, norvégienne en l’occurence, le pianiste-compositeur et producteur Bugge Wesseltoft (photo ci-dessous) s’est associé au duo Dan Berglund (contrebasse)-Magnus Oström (batterie), qui officiait naguère aux côtés du génial pianiste suédois Esbjörn Svensson avant que celui-ci ne disparaisse tragiquement dans un accident de plongée en 2008. Le nouveau trio, qui oeuvre sous le nom de Rymden, publie, après « Reflections & Odysseys » sorti en 2019, son nouvel album, intitulé « Space sailors« . Ce disque est une plongée dans l’univers musical nordique, entre jazz et musique contemporaine, une ballade spatio-temporelle qui si elle peut paraître au décollage, finit par vous embarquer, tant le talent des trois gaillards est au service du projet, la musicalité d’abord. Un magnifique hommage également à Esbjörn Svensson, dont l’ombre plane sur le disque.

Mais plongeons-nous au plus près de ce disque. Ca démarre fort, sans fioriture avec « The life and death of Hugo Brax », un titre qui plante le décor d’entrée. L’ambiance est spatiale, aérée, avec une contrebasse omniprésente. Le trio virevolte au gré du morceau, et Wesseltoft s’en donne à coeur joie au clavier de son piano. Pour rester sur la notion d’espace, le trio nous embarque ensuite dans l’univers des 70’s avec un « Spacesailor », qui est une sorte de couloir à remonter le temps. Ca sonne très pop, presque proche également de la musique répétitive un brin lancinante avec ce rythme donné par la batterie de Magnus Oström. Derrière, avec « Sondan », c’est un ambiance minimaliste, avec un jeu très progressif de Wesseltoft, qui donne à ce morceau une couleur très intime, presque introspective. « Terminal One » nous change de registre et offre une couleur dansante, jusqu’ici absente, au disque. C’est chaloupé. Ca swingue tranquillement. Le trio se régale, s’envole doucement et nous avec… c’est juste beau. « Final goodbye » propose un univers mélangé de percussions et de bruits étranges, sur lesquels le piano va se greffer, en douceur, posant des mélopées de notes, sans jamais se noyer dedans et nous avec. Toujours la subtilité d’abord. C’est un plaisir à écouter.
« Pligrimstad », qui suit, démarre par un thème à la contrebasse, superbement tenue par le talentueux Dan Berglund, puis piano et batterie rentrent doucement. Progressivement. C’est un régal d’écouter les trois musiciens dialoguer ensemble, chose qui ne se dément pas avec les deux morceaux qui suivent, » Arriving at Ramajay, Part 1″ et « Arriving at Ramajay, Part 2 ». Là, si Wesseltoft, via ses synthés, nous concocte un univers sonore très futuriste (mais surtout très emprunt de ce qui se faisait chez les groupes pop des 70’s, je pense ici à Barclay James Harvest, Yes, Genesis période Peter Gabriel des débuts…. ), je dois avouer que ça fonctionne très bien, c’est efficace. Il ne manque plus que les combinaisons de cosmonautes et nous sommes partis… ailleurs. « The Actor », sur fond de basse-batterie bien posées, est un morceau qui pourrait servir de générique à une série ou du moins de thème à un personnage de série policière. Ca roule, c’est efficace, puis bien bientôt, Wesseltoft rebascule dans l’antre des 70’s. Obsession. « My life in a mirror » est un très beau morceau, plein de lyrisme, de douleur exprimée, de nostalgie (un clin d’oeil à Esbjörn Svensson??). Enfin les deux morceaux qui terminent le disque sont « Free as a bird » (non pas une reprise du titre de Supertramp, encore moins celui des Beatles ou de John Lennon !), et par « Sondan Outro », qui est la suite et la fin de « Sondan ». Ces deux titres achèvent bien l’écoute de ce très bel album, au contenu très épuré, parfois planant, maitrisé par trois musiciens de grand talent.
Maintenant que j’ai découvert ce trio, qui est dans l’esprit de ce que faisait le regretté Esbjörn Svensson, mais aussi à l’instar de l’univers musical de Trygve Seim, autre grande figure du jazz nordique contemporain, je vais suivre ce groupe de près. Je vous invite à en faire de même.
Guillaume.
Victor Wainwright, long train Blues… and more.

Sur la pochette de leur dernier album, une locomotive ancienne lancée à pleine vitesse, toute fumée dehors. Cela annonce clairement les choses. Victor Wainwright and The Train ne sont pas là pour plaisanter.
Ce chanteur-pianiste-organiste américain et son groupe nous proposent d’entrée de jeu sur leur nouvel album « Memphis Loud » paru l’an dernier, un blues puissant, cuivré, mâtiné de plein de sources musicales, comme le boogie-woogie, le blues, la soul, et même des sons issus de la Nouvelle-Orléans.
Dès le début donc, c’est un hommage au Mississippi, terre de blues s’il en est et qui vit naitre nombre de grands noms du genre. Ensuite il se souvient de la ville de Memphis. Aretha Franklin ou encore Booker T. Jones, sont nés dans cette ville. Les bluesmen John Lee Hooker, B.B.King; Muddy Waters, Howlin’Wolf sont également nés dans les environs, au sein de ce Mississippi alors frappé, comme les autres états du sud des Etats-Unis, par le ségrégationisme officiel, qui ne sera abrogé qu’en 1968. Ville historique de la musique américaine, et considérée comme le berceau historique du Blues, c’est aussi une ville où se trouve la fameuse Beale Street, qui rassemble nombre de clubs dédiés à cette musique, dont ceux de B.B.King et Buddy Guy.
Mais Memphis est aussi un berceau du rock puisque Elvis Presley a vu le jour à quelques encablures de cette mythique cité. Sans parler des nombreux studios d’enregistrement qui s’y trouvent, comme les fameux Sun Records, fondés par Sam Phillips dans les années 50, lui qui fut le premier découvreur de Presley lorsque celui-ci fit sa version de « That’s all right Mama ». D’autres grands noms du rock émergeront grâce à Sun Records, je veux parler ici de Carl Perkins, Jerry Lee Lewis, Johnny Cash. Des bluesmen comme James Cotton, B.B.King ont également enregistré des albums sous la direction de Sam Phillips. Memphis voit défiler dans ses studios depuis des décennies tout ce qui compte de stars de la chanson, de la pop, du jazz, de la soul music ( notamment dans les studios Stax et Hi Records, où passeront Booker T. and the MG’s., Otis Redding, Carla Thomas, Isaac Hayes, Al Green. Bref Memphis, vous l’aurez compris, est partie incontournable de l’histoire de la musique américaine des 70 dernières années.
Mais revenons à l’album qui nous occupe. On retrouve l’évocation de cette ville dans le troisième morceau de l’album, morceau qui démarre sur les chapeaux de roues, celui d’un train qui arrive en gare (peut-être un hommage lointain au fameux premier film projeté par les frères Lumières dans un hangar, devant un public incrédule). C’est du blues nerveux, bien servi, sans fioritures. Wainwright possède par ailleurs une voix un peu nasale qui n’est pas sans rappeler parfois celle du célèbre pianiste-chanteur de la Nouvelle-Orléans, Dr. John. La musique développée est gorgée de couleurs, de cuivres, de sueurs, on se sent transporté dans ce sud des Etats-Unis historique, berceau de la musique américaine. Mieux vaut s’attacher au siège, le voyage démarre fort, avec donc l’enchainement « Mississippi »-« Walk the walk »-« Memphis Loud ». Moi qui ne connaissait pas ce musicien et son groupe, je me régale.
Après un départ en fanfare, les gaillards changent de registre. En effet sur « Sing », c’est un esprit fanfare qui prédomine. On se croirait à un carnaval (oui je sais dur à imaginer par les temps qui courent ). Puis vient une ballade, « Disappear », qui permet à Wainwright de nous offrir un autre aspect de sa voix puissante. Ici elle est plus posée. La musique d’abord tranquille, se fait plus présente via les cuivres et le piano, et une section rythmique qui veille au grain. Ensuite c’est un « Green don’t rise » entamée tambours battant qui nous tend les bras. Un blues-rock sans temps morts, mené à l’allure d’une locomotive lancée plein pot, les instruments prenants efficacement leur place dans ce tourbillon bluesy. « Golden rule », qui suit, est un morceau aux sonorités davantage pop, voire soul des années 70, comme un hommage à la Motown et certaines de ses grandes figures. Avec « America », Wainwright dresse un constat amer de son pays, renforcé par les évènements survenus en 2020, les émeutes. Il prêche pour un respect de l’autre, d’où qu’il vienne. « South end of a North bound mule », fleure bon le blues du sud, il me fait penser à des morceaux de Robben Ford, ou de Calvin Russell, deux bluesmen que j’adore et vous recommande si vous ne les connaissez déjà. Le jeu de guitare est ici fin et précis, la voix de Wainwright presque joyeuse et joueuse. Un bon boogie-blues. « My Dog Riley », avant-dernier morceau de l’album, nous ramène à un boogie-blues mélangé à une pincée de fanfare, ca swingue, ça balance, c’est entrainant au possible. Ca Roll’ comme ils disent là-bas. Pour finir, Wainwright nous propose le très beau « Reconcile ». Une chanson en forme de blues plaintif… soutenue par une guitare et des cuivres. Superbe.
Personnellement, une belle découverte que cet artiste à travers cet album.
Alors si vous aimez la musique en forme de cocktail bien secoué, ce disque est pour vos oreilles.
Guillaume.