Archives du 21 juillet 2021

Monty Alexander, génie du clavier.


Monty Alexander, pianiste jamaïquain à la déjà longue carrière, que j’ai eu le bonheur d’admirer en concert à la Nouvelle Philharmonie à La Villette, il y a de cela 3 ans, est un musicien qui possède son instrument comme peu de ses confrères jazzmen contemporains. Pour moi il est du niveau d’un Chick Corea, d’un Keith Jarrett, tant son jeu est expressif, coloré, maîtrisé, fluide. Il a expérimenté beaucoup de formules au cours de sa carrière. Dans le double disque qui nous intéresse ici, intitulé « Love you Madly : Live at Bubba’s », enregistré comme son nom l’indique au Bubba’s, restaurant-club de jazz de Fort Lauderdale en Floride, dans lequel s’est aussi produit le génial Ahmad Jamal, il est entouré d’un trio composé de Paul Berner à la basse, Duffy Jackson aux baguettes et Robert Thomas Jr. aux percussions. (lire les mini entretiens très intéressants donnés par ceux-ci sur leur expérience de travail aux côtés de Monty Alexander, dans le livret qui accompagne le doublé cd).

Le premier des 2 cd s’ouvre sur « Arthur’s theme », un joli morceau tout en souplesse avec les percussions de Robert Thomas Jr. Alexander nous régale de son style, mélange d’académisme occidental et d’école latino-jamaïquaine. Après cette introduction, on tombe sur le morceau qui donne son nom à l’album, « Love you madly », écrit par le grand Duke Ellington. Sur fond de batterie aux balais, ça swingue et Alexander promène ses mains virtuoses sur le clavier avec délectation. Puis arrive la « Samba de Orfeu », composée par le musicien brésilien Luis Bonfa, qui donne furieusement envie de danser. Les 3 derniers morceaux du disque sont l’oeuvre de Monty Alexander. « Sweet Lady », qui prend la suite, démarre de façon minimale, comme si Alexander voulait peindre un tableau, puis tour s’accélère doucement. Alexander montre toute sa palette, comme un peintre. Le swing est toujours là, omniprésent, central. On le retrouve sur « Eleuthra », sur lequel il mélange allègrement ses origines jamaïquaines et les sonorités cubaines. Un régal. Pour terminer ce premier disque il nous gratifie de « Reggae later ». Un morceau superbe, rempli de breaks au piano, de virtuosité sans jamais être excessif, pas le genre du bonhomme. Bref c’est un bonheur d’écouter ce musicien. Je ne me lasse pas.

Passons au second cd. Il démarre par « Blues for Edith », est un morceau composé en hommage à Edith Piaf par le musicien Milt Jackson. Vient ensuite ‘Fungii Mama », dû à Blue Mitchell. Un morceau qui mélange swing, bebop et moments plus free, mais là encore le maestro se et nous régale. Solo de piano, de contrebasse (Paul Berner). Superbe. Ensuite c’est un « Consider » écrit de sa main que nous joue Alexander. Tout en douceur. Volupté. Derrière, le furieux et chaotique « Montevideo », qui cavale…nous entraîne dans son tourbillon. On en vient alors à écouter sa version très personnelle de « Body and Soul », co-écrite en 1930 par Johnny Green, Edward Heyman, Robert Sour et Franck Eyton. Classique du répertoire jazz, de nombreuses fois repris depuis sa création, Alexander y apporte ici sa touche de créativité, son touché de piano exceptionnel, sa technique unique. Le tout donne un joli morceau. Ses trois compères de jeu ne sont pas en reste, ils assurent tout au long des morceaux évoqués jusqu’ici. L’avant-dernier morceau c’est un cavalant « Swamp fire ». Ça va à toute vitesse, on craint le déraillement, mais non, jamais cela ne se produit. Duffy Jackson aux baguettes assure un tempo de feu, avec de rares moments de calme. Magistral. Enfin pour terminer ce disque et du coup ce coffret « Live at Bubba’s », un morceau écrit par Milt Jackson, « SKJ ». Ça balance, swingue, c’est frais, on en redemande. Merci Monsieur Alexander. Je conseille ce disque à celles et ceux qui ont envie de découvrir ce génial pianiste-compositeur-interprète. Cette chronique est la dernière de l’année avant un repos bien mérité. Nous vous retrouverons avec plaisir à la rentrée. Bon été à vous toutes et tous, où que vous soyez, en France, à l’étranger. A bientôt.

Guillaume.
https://www.youtube.com/watch?v=U8gdVIXaFVg

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