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Shemekia Copeland is back !



Cette chanteuse, que j’avais rencontré dans une autre vie (dans les années 90’s), pour un entretien, au hard-rock Café près d’Opéra à Paris, avant qu’elle ne s’y produise pour un set promotionnel, étant alors inconnue en France, a fait un sacré et bon bout de chemin depuis. Devenue une artiste plus que confirmée, une chanteuse reconnue dans le milieu du blues, portant le lourd héritage patronymique et musical de son défunt et talentueux père, le guitariste-chanteur Johnny Copeland. Une carrière jalonnée de succès, des tournées qui sont pleines, bref tout va bien. Ou pourrait aller bien. Car aux Etats-Unis, ces dernières années, pour Shemekia Copeland, comme pour nombre de ses concitoyens noirs, la vie n’a pas été des plus facile. Bavures, émeutes, chômage qui ne baisse pas, pauvreté stagnante, voire qui s’accroit, jusqu’au triste épisode du Capitole en janvier dernier. Musicienne, mais citoyenne engagée et vigilante, Shemekia Copeland n’hésite jamais à donner de la voix (qu’elle a puissante). Deux ans après « America’s child (2018), qui montrait déjà la voie, elle publie « Uncivil War« , son dernier album, sorti l’an dernier, c’est encore le cas. Elle sort les crocs.

Dès le premier titre, « Clotilda’s on fire », elle donne le ton. Vocalement et musicalement. Un blues électrique lourd, gras, et cette voix qui se fait le porte-voix des petites-gens en colère. L’album se poursuit avec le très beau « Walk until I ride » soutenu par des choeurs et des orgues hammond, façon gospel d’église, avant d’accélerer. Rafraîchissant. Dans « Uncivil war », elle traite des douleurs liées au conflit permanent entre les communautés qui déchirent régulièrement son pays. Mais elle se veut optimiste. Elle milite pour une cohabitation pacifique plutôt que pour des affrontements violents, qu’ils soient verbaux, physiques. Avec « Money makes you ugly », Shemekia Copeland dénonce le pouvoir de l’argent qui parfois rend les gens moches, du jour au lendemain. Attention à ce miroir aux alouettes dit-elle. Le tout avec une voix toujours aussi précise, investie, vindicative. Puis arrive sans crier gare une superbe reprise du stonien « Under my thumb », immortalisé par la voix de Mick Jaggersur l’album « Aftermath » en 1966 et dont la version la plus célèbre reste celle du fameux et triste concert d’Altamont en 1969. Ici c’est un travail tout en douceur, acoustique, avec guitare, tambourin, percussion, et la voix de Copeland qui se régale sur ce standard.

Puis s’en vient « Apple Pie and a .45 », blues rugissant, avec guitare saturée. « Give God the Blues », qui suit est une chanson sur la tolérance, sur le fait que Dieu aime toutes les religions, les types de pensées, philosophies, bref tout le monde, mais que ce qui se passe ici-bas sur Terre, doit filer lui le Blues. Un titre un peu simpliste, qui n’est pas mon préféré car musicalement, cela s’en ressent. Derrière, ça repart sur les chapeaux de roues, avec « She don’t wear pink ». L’histoire d’une femme mariée, qui décide de changer de vie, de plus s’habiller en rose. Elle explore alors différentes choses. Copeland exprime ici la liberté de la femme de ne pas répondre à des stéréotypes sociaux, sociétaux, de se forger, se tracer un parcours comme elle l’entend, le ressent, même si cela provoque, choque, déstabilise autrui, famille, relations, collègues, et pour finir la société dans son ensemble. Pour terminer, elle nous offre d’abord « In the dark », une chanson d’amour, sur un couple en plein doute, puis ensuite un bon blues teinté de sonorités des années 50-60, une chanson où il est question de partage de la musique (ici le blues) dans sa maison, entre amis, de passer du bon temps, à chanter des chansons d’amour d’où le titre « Love song ».

Ce « Uncivil War » est un bon album, très agréable à écouter. Et cette artiste, à la personnalité forte et riche, intéressante, vaut qu’on la découvre, si ce n’est déjà fait, et qu’on la suive.

Guillaume.

Shemekia Copeland, le blues dans les veines.


Déjà 20 ans de carrière pour la fille du talentueux et regretté bluesman guitariste-chanteur Johnny Copeland. Depuis la sortie en 1998 de « Turn up the heat« sorti sur le label Alligator Records. Shemekia Copeland revient avec son neuvième album « America’s child« , toujours sur ce label, qu’elle a retrouvé en 2015. Le disque sort dans un contexte particulier, celui de l’Amérique version Trump. Une Amérique radicalisée, décomplexée, où les tensions entre communautés ont redoublées.

Mon premier souvenir de Shemekia Copeland, fut à l’occasion d’une interview pour le magazine « Standards », que j’avais cofondé au début des années 90’s avec Marc Sapolin, ancien programmateur musical de l’Espace Gérard Philipe de Fontenay. Une rencontre de 30 minutes avant un set dans le cadre du Hard Rock Café situé sur les Grands Boulevards à Paris. Bien que très jeune à l’époque, elle avait déjà une personnalité très assurée, une présence évidente. Ce qu’allait confirmer sa prestation scénique, devant le public et quelques journalistes conviés pour l’occasion. Un talent évident se révélait à nous, à moi.

Depuis j’ai eu l’occasion de la voir sur scène en France à plusieurs reprises. A l’évidence, sa voix puissante, son registre large, allant du blues à la country en passant la soul music, tout cela rend Shemekia Copeland intéressante, captivante. Elle ne reste pas enfermée sur les rails d’un blues qu’elle connait pourtant par coeur. C’est ce que confirme avec plaisir « America’s child« . Un album qui file à toute allure, une tornade musicale, une longue traversée des styles musicaux qu’elle chérie depuis toujours. Ce qui frappe quand on l’écoute chanter, c’est sa capacité à être aussi touchante sur des morceaux lents tels « Promised myself » (écrit par son père Johnny Copeland) que de lâcher la machine vocale sur des titres plus rythmés comme « Ain’t got time for hate », « Wrong Idea », « In the blood of the blues ».

Pour elle qui est désormais une jeune maman, le regard sur le monde tel qu’il est a radicalement changé. Elle est désormais plus à l’affût, plus à l’écoute des ses vibrations, de ses tensions, de ses changements. ainsi « Smoked ham and peaches » évoque la recherche et le besoin de vérité et de tranquillité aujourd’hui aux Etats-Unis. « Americans » quant à lui, se veut une évocation de la richesse de la diversité des origines fondatrices de la société américaine, à travers la différence de couleurs de peaux. Figure également sur cet album une reprise en mode blues d’un titre des Kinks, »I’m not like everybody else ». Une vraie déclaration d’indépendance, portée de superbe manière par la puissante voix de Shemekia Copeland. Sur cet album, la chanteuse s’est entourée du guitariste / producteur Will Kimbrough, et de pointures telles que Steve Cropper, Emmy Lou Harris. Excusez du peu ! « America’s child » se termine par une petite douceur, un chant traditionnel « Go to sleepy little baby ». Cet album nous fait retrouver une artiste revigorée, plus déterminée que jamais. Tant mieux!

Vous l’aurez compris, j’ai beaucoup aimé cet album. A vous maintenant de le découvrir.

Guillaume.

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