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Chick Corea, légende du jazz, laisse son piano muet.

Lui qui pendant près de 60 ans se consacra au piano, au jazz, laisse une oeuvre immense, enregistrée entre 1968 et la sortie de « Tones for Joan’s Bones« , et « Trilogy 2 » sorti en 2019, soit plus de 90 albums, studios et live confondus, et des collaborations variées. Retour sur une carrière magistrale.
Son père trompettiste dans un orchestre dixieland, pendant les années 30 et 40, va mettre le petit Armand Anthony dit « Chick » au piano dès ses 4 ans révolus. Le gamin semble doué et apprécie ce que son père lui fait écouter découvrir : ke trompettiste Dizzy Gillespie (photo du dessous), les saxophonistes Charlie Parker (deuxième photo ci-dessous) et Lester Young, les pianistes Bud Powell et Horace Silver. Un socle de solides références pour appréhender la musique jazz, qui ça occuper toute sa vie. A 8 ans, il délaisse un temps le piano pour la batterie. Le temps d’en apprendre les rythmiques et l’aspect percussions, qui vont plus tard influencer sa manière de jouer du piano, instrument qu’il retrouve très vite pour ne plus le lâcher de toute sa carrière.


Avant la décade 70 qui s’annonce, il va en 1968, remplacer Hetbie Hancock au sein du groupe de Miles Davis (photo ci-dessous). Ainsi participera t-il aux enregistrements de « Files de Kilimandjaro », « In a silent way », « Bitches Brew » au cours desquels il expérimentera des pianos électriques, des sons nouveaux pour l’époque. Il restera avec Miles Davis jusqu’en 1970, y côtoiera Keith Jarrett, autre virtuose du piano.

S’il est un homme de groupe, Chick Corea ne se refuse pas à des projets solo et il existe plusieurs traces, à l’égal d’un Keith Jarrett, d’enregistrements solos du génie américain. Je citerai « piano impro »(1971), »piano impro 2″(1972), « Solo piano-Originals »(2000), « Solo piano-Standards » (2000), enfin « Solo piano-Portraits »(2014).
Chick Corea maîtrisait aussi pleinement l’art de l’improvisation. D’ailleurs il aimait à dire souvent que avant d’entrer sur scène, lors de concerts solo, il ne savait pas forcément ce qu’il allait jouer. Cela, j’ai eu la chance de l’observer un soir d’août 2014 au festival de jazz de Marciac. La soirée s’annonçait belle. Chapiteau rempli de 6000 spectateurs venu admirer quatre virtuoses du jazz. En deux duos, le premier composé de Chick Corea et de son complice Stanley Clarke, puis en deuxième partie, Hetbie Hancock et Wayne Shorter. Plateau exceptionnel !
Donc, en premier, celui qui nous interesse ici, le duo Corea-Clarke. Les deux hommes, 70 ans passés, affichent belle santé. Corea s’installe à son.piano, Clarke enlace sa contrebasse. Démarre alors un dialogue musical tout en improvisation et question-réponse de très haut niveau. Corea est dans un grand soir, ses mains virevoltent sur le clavier de son piano, il sourit, jette à peine un oeil à Clarke qui le suit , le précède ou le rattrape au gré des improvisations. Magistral! Bien sûr, les deux compères nous gratifieront de morceaux de l’époque Return To Forever, et Stanley Clarke jouera même une adaptation de « Waltz for Debbie » dédiée à sa femme. Un moment sublime de virtuosité, d’émotion, sous le regard admiratif autant qu’amical de Chick Corea.
Une heure quinze durant, les deux compères musiciens avaient régalé l’auditoire par leur talent, leur générosité, leur complicité musicale nourrie de tant d’années à jouer ensemble. Je me rappelle être sorti de cette soirée chamboulé par ce que j’avais vu, entendu. Un de mes grands souvenirs de concerts.
Tout au long de sa carrière, Chick Corea a multiplié les rencontres et les concerts avec de très grands musiciens de jazz. Hormis ceux déjà cités, on peut noter les guitaristes Pat Metheny, Paco de Lucia, John Mac Laughlin, Mike Stern, le batteur Steve Gadd, le percussionniste Vinnie Colaiuta, le saxophoniste Michael Brecker, le contrebassiste Avishai Cohen et j’en oublie…tellement la liste est longue. Il était curieux, voulait rencontrer, découvrir de nouveaux musiciens, explorer de nouvelles formes de composition musicale.
Si Chick Corea a consacré l’essentiel de sa vie et de sa carrière au jazz, à l’écriture, il a également, mais de manière moindre joué des morceaux du répertoire classique, sans jamais y consacrer de disque entier.
Chick Corea laisse un vide immense dans le monde du jazz, mais sa musique, son talent, sa maîtrise technique de l’instrument, resteront gravés sur tous les disques qu’il a enregistré entre 1968 et 2019. Une trace indélébile. Un témoignage sublime d’un talent hors norme d’un.musicien qui aura marqué la deuxième partie du vingtième siècle et le début du vingt-et-uniéme.
Merci pour tout Chick Corea.
Je vous laisse avec une sélection de morceaux enregistrés, joués par ce virtuose.
Par ailleurs, quelques-une de ses albums sont à retrouver à la médiathèque :
Innée Space ; The Musician ; Improvisations childrens ; Two ; The Enchantement ; Chinese butterfly ; Forever ; Children of Forever.
Guillaume.
https://www.youtube.com/playlist?list=PLwaqz1wV9_eWnkQtWjMHet9hHH-fsoNSS
Corsican Trio, au cœur des traditions
Composé de Arnaud Giacomoni (guitare rythmique, chant), Fanou Torracinta (guitare solo) et William Brunard (contrebasse), le Corsican Trio, ici accompagné du violoniste Bastien Ribot, nous offre une promenade entre les univers traditionnels corses, le jazz, ainsi que le swing manouche.
C’est d’ailleurs sur ce mode que s’ouvre l’album avec une surprenante et audacieuse reprise de « Cleopatra’s dream » de Bud Powell. Histoire de tout de suite emmener l’auditeur sur les chemins de la mixité des genres musicaux… Et ça marche ! La suite fait place à deux morceaux aux accents baignés de soleil et tradition corses… « L’ultima strinta », « U Sirinatu » nous embarquent au cœur des villages corses, de la tradition vocale, de la nostalgie.
Oui ce disque qui mélange traditions, vocales et musicales, et genres musicaux, est une belle réussite tant il fait voyager, partir loin… « Gypsy swing », qui enchaîne est une perle de virtuosité, signée Georges Samson Schmidt, ici magnifiquement jouée par Fanou Torracinta. Puis sans nous laisser souffler, le trio nous emmène dans la citadelle d’Ajaccio, au rythme d’une valse. A noter la belle reprise de « You and the Night and the Music »… Le violon de Bastien Ribot, comme tout au long de l’album, y fait merveille, amenant une touche de swing manouche à ce classique du jazz. Jolie prouesse.
La suite, alternant toujours entre jazz (« Walkin my baby back home ») et tradition corse « Solenzara »… ne faiblit pas. « A via », qui ferme cette balade musicale, se fait en mode swing, invitant l’auditeur à danser.
Un bel ouvrage, un trio à suivre.
Guillaume.