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Sélène Saint-Aimé entre dans la danse.


« Mare Undarum » est le premier opus que concocte, pour notre plus grand plaisir d’auditeurs-trices mélomanes la contrebassiste-chanteuse française Sélène Sain-Aimé. Si à l’origine, Sélène se prédestinait davantage au chant qu’à la contrebasse, lorsqu’elle vit Avishai Cohen, elle a eu comme une révélation, au festival de jazz de Sannois, alors qu’elle y travaille en tant que bénévole. C’est l’occasion de la découverte du jazz. Donc, désormais la contrebasse qui aura ses faveurs. D’autant que selon elle, cet instrument pourtant massif, offre la possibilité de jouer très rapidement en groupe, que ce soit en duo, trio ou plus. détestant les étiquettes, elle refuse obstinément, et je trouve qu’elle a cent fois raison d’être comparée à la contrebassiste américaine Esperanza Spalding. Chacune possède une démarche, un univers bien distinct. Spalding navigue depuis près de dix ans dans le monde du jazz, Sélène Saint-Aimé y débarque discographiquement, bien qu’ayant déjà bénéficié de collaborations prestigieuses telles que celles de Ron Carter ou Steve Coleman, qu’elle avait rencontré à Montreuil, en région parisienne, lors d’une master class, avant de le suivre à New-York et de bénéficier de ses conseils avisés, de sa rigueur, de son approche musicale.

Cette musicienne curieuse de sonorités diverses, s’envolera pour Cuba, le Maroc ou la Martinique, terre de ses racines, sans oublier quelques incursions en terrain classique avec des adaptations de Villa-Lobos ou Moussorgsky. Et le « Mare Undarum » est le résultat de ces voyages, de ces nourritures sonores ingurgitées, digérées patiemment, tranquillement. Mais justement arrêtons-nous dessus.

C’est justement « Mare undarum, part.1 » qui ouvre l’album. Ce qui frappe d’entrée l’auditeur est l’aspect free, un brin éclaté du morceau, avec d’abord la voix puis la contrebasse et ensuite le reste des instruments qui s’insèrent, conférant une ambiance des plus étranges. « Feuillée et Beer » est sur cette même lancée, cependant ici Sélène Saint-Aimé nous convie à un dialogue entre la voix et la contrebasse. Avec « Paene Umbra : Chez Rosa B. », la contrebassiste laisse parler son imposant instrument. Très beau. Avant de s’exprimer de manière très courte, puis de laisser son instrument reprendre le lead. Elle lui laisse libre cour, le rendant très expressif. D’abord intimiste, le morceau se termine sur un aspect fanfare, qui laisse à penser qu’en live, ça peut vite aller plus loin. « Valsa Choro » est donc une valse, lente pour le coup sur laquelle vient se poser la voix de Sélène en un langage inventé. Après, c’est un « Rings of Neptune », morceau ou percussions et trompette sont en lead, entraînant, presque envoûtant. Sur « Partialis », elle nous offre sa voix en ouverture, d’abord en vocalises puis cela s’enchaîne avec le deuxième chapitre de « Mare Undarum », sur fond de contrebasse et percussions, elle se fait récitante, puis la voix se retire, un violon prend place, plaintif, blessé. Fidèle à sa démarche Sélène Saint-Aimé, nous emmène par sa voix, dans des sphères proches de la folie, tandis que les instruments agissent en contrepoint. Dans « Totalis », elle conserve cette dualité musique-voix chantée, ce caractère mystérieux. Comme sur le reste du disque, l’ambiance se veut très aérée, épurée même parfois. Enfin pour terminer son album, la contrebassiste nous propose un « Cum mortuis in lingua mortua », ce qui pour moi ressemble à une sorte de marche funèbre. Une fin étrange et bien sombre pour un album plutôt lumineux, aérien, prometteur, qui donne envie d’écouter la suite le plus vite possible. L’ensemble de cet album est très agréable à écouter, parfois déroutant, mais il nous amène vers des rivages sonores et rythmiques inattendus. Et c’est ce qui parfois fait le sel des découvertes, la belle surprise. Car ce disque révèle l’évidence : Sélène Saint-Aimé possède talent et personnalité. 

Guillaume.

Pour fêter le printemps, Avishai Cohen fait escale à Fontenay-sous-Bois!


Evènement à la salle Jacques Brel le 20 Mars prochain! En effet, pour la première fois, le grand contrebassiste (mais également pianiste et chanteur à ses heures) israélien Avishaï Cohen va venir nous régaler de son jazz qui résonne autant de sonorités orientales que de modernisme européen, de rythmes latins, ou d’improvisations dont lui seul a le secret. En trio, quatuor, l’homme est à l’aise. Ici il viendra en trio, seulement accompagné par Elchin Shirinov au piano, Noam David à la batterie. Autant dire que le menu musical varié et les musiciens qui seront sur le plateau de Jacques Brel le 20 mars prochain, nous promettent une belle soirée.

Ce compositeur sensible et virtuose aime à explorer des territoires sonores nouveaux, pour enrichir son registre, sa palette musicale de compositeur. Il n’a pas hésité à aller du coté du flamenco avec le projet Duende, sur lequel il était accompagné de son compatriote Nitaï Hershkovits au piano.

Avishai Cohen, je l’ai personnellement découvert avec l’album « Duende » sorti en 2012, puis par la suite avec le « Night of Magic : Avishai Cohen Trio Live »paru en 2007, et à la suite, « As if… live at Blue Note »(2007), « Gently disturbed » (2008), « Aurora »(2009), « Seven Seas » (2011), et « 1970 » (2017). Sa musicalité, son sens de la mélodie, les silences qu’il laisse aussi s’installer et la faculté qu’il a de dialoguer avec ses musiciens, sont tout à fait remarquables. Il n’y a jamais de choses inutiles, en trop, tout est à sa place. J’avais d’ailleurs pu me rendre compte de son talent lors de son passage, voilà quelques années à la Scène Watteau, à Nogent-sur-Marne, où il était venu se produire en quartet, avec notamment Shaï Maestro au piano. Une soirée magnifique!

Grâce à lui, j’ai découvert l’existence de la talentueuse scène jazz israélienne. A côté de lui, il y a également son homonyme trompettiste, le saxophoniste Eli Degibri, le contrebassiste Ehud Ettun, enfin le pianiste Shaï Maestro. Aujourd’hui Avishaï Cohen est sinon la tête de proue, en tous cas une figure importante du jazz israélien et international. Son succès depuis une quinzaine d’années, sur les scènes du monde entier, a réveiller l’intérêt pour ce jazz si particulier, si riche, par le mélange culturel qu’il offre.
C’est tout cela que Avishai Cohen, Elchin Shirinov et Noam David viendront partager avec nous. Le concert affiche complet! belle preuve de la cote d’amour et de fidélité dont bénéficie ce musicien en France.

Parmi sa discographie, je recommande absolument « Night of Magic : Avishaï Cohen Live » ; « As if… Live at blue note » ; « Gently Disturbed » ; « Seven Seas » ; « 1970 ». Ainsi que le disque « Road to Ithaca » de Shaï Maestro.

Guillaume.

Hubert Dupont, passeur de musiques


Golan-ImageEn cet été, je vous propose une série de découvertes d’artistes-musiciens fontenaysiens.

La première découverte, concerne Hubert Dupont, contrebassiste. Pour celles et ceux qui ne l’ont jamais vu-écouté, il est régulièrement programmé à Musiques au Comptoir, Halle Roublot, ou plus récemment lors de Fontenay-Sous-Soleil, le 15 juillet dernier, ainsi bien sûr que dans des festivals en France ou à l’étranger.

Outre son instrument fétiche, qu’il manie superbement, Hubert s’avère être aussi un chef de bande, de Brass Band, directeur musical de différents groupes et projets (voir son blog). Il  habite Fontenay depuis très longtemps, y mène une action musicale, éducative, de transmission, d’échanges en tous genres, de rencontres, riches, variées, toujours avec le soucis de la qualité (http://www.ultrabolic.com/). Certains d’entre vous ont pu le découvrir, en 2014,  lors de la fête de la musique, lorsqu’il était venu diriger  son Brass Band, alors composé d’une douzaine de musiciens, sur le perron de la Médiathèque de Fontenay-sous-Bois.

Ici, il est partie prenante de l’Ensemble « Golan », accompagné de la flutiste traversière Naïssam Jalal et du percussionniste Youssef Hbeisch, entourés de Ahmad Al Khatib à l’oud, Zied Zouari au violon et Matthieu Donarier à la clarinette. Cet ensemble musical a enregistré un album, »Golan, Al Joulan, Vol.1 » (qui donc sera suivi d’un volume 2, en préparation), à Musiques au Comptoir, en octobre 2015. Ce projet musical a emmené le groupe en tournée en  Palestine, ou l’accueil réservé fut tout simplement « magique », d’après Hubert.

Sur « Golan », dès le premier morceau, on est embarqué dans les contrées moyen-orientales, avec ces musiques rythmées, chaloupées, et ces sonorités si reconnaissables, ici magistralement servies, par la bande de musicien réunies. Un vrai voyage musical, culturel, qui, à l’heure de la montée des radicalismes, des tensions communautaires réelles ou artificielles, fait un bien énorme à écouter, savourer. Oui l’ailleurs est source de richesse humaine, d’échanges.. c’est tout le sens de ce projet « Golan », et plus largement de l’aventure musicale que mène Hubert Dupont depuis des années, à travers ses différents projets.

Si le disque n’est composé que de 6 morceaux (ce qui peut paraître peu, mais bon, la qualité est au rendez-vous, alors ne boudons pas ce plaisir, savourons-le!), c’est une belle échappée que nous délivrent ici les membres de ce Golan Project. Vivement le second chapitre!!!

Hubert Dupont, à travers tous ses projets, se veut être un passeur de musiques, un homme de rencontres culturelles, artistiques, humaines.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient découvrir cet artiste, ce musicien, les disques sont disponibles à la médiathèque.

Guillaume.

 

Stanley Clarke, la Basse dans tous ses états.


Stanley Clarke est un musicien qu’on ne présente plus. A 63 ans, celui qui a révolutionné le jazz rock dans les années 70 avec Herbie Hancock, Chick Corea, a toujours évolué entre 2 univers : Le jazz acoustique et le jazz électrique. Pour l’avoir vu cet été à Marciac en duo acoustique avec Chick Corea au piano, l’homme est en pleine forme, le musicien toujours aussi éblouissant. Sa version à la contrebasse de « la cancion de Sofia », morceau composé en l’honneur de sa femme, fut un moment de pur bonheur musical. Outre la subtilité de son jeu, Clarke passa en revue toutes les techniques de jeu sur son instrument. Magique!

Sur la pochette de « Up« , Stanley Clarke est debout, son instrument en main. Il annonce la couleur. « Up », démarre sur le tonique « Pop Virgil », histoire de convaincre l’auditeur que le bassiste américain a encore des choses à dire, à écrire, à jouer. La suite, avec le très beau « Last train to Sanity », mélange de jazz rock, de musique classique, illustre à merveille cet ecléctisme dont Stanley Clarke a toujours fait preuve. « Up » qui donne son nom au disque, est un pur morceau de jazz-rock. « Brazilian love affair », nous plonge dès l’entame dans l’univers musical brésilien, avant de revenir à un jazz rock de bonne facture comme les aimaient son ami George Duke, décédé l’an dernier. Le triptique « Bass Folk Song » tantôt acoustique, tantôt électrique, est un régal, tant Stanley Clarke y étale sans esbrouffes son talent, son sens musical. En clôture de ce magnifique disque, la fameuse « Cancion de Sofia », enregistrée avec son compère pianiste Chick Corea.

Merci de ce beau moment, Mr. Clarke!

Guillaume.

La dernière danse de Charlie Haden.


Avec Keith Jarrett, qu’il avait rencontré en 1968, au sein de son premier trio, Charlie Haden, contrebassiste américain, venait de sortir un album, en duo, laconiquement intitulé « Last dance« , publié chez ECM. Cet album sera donc la dernière oeuvre enregistrée par Charlie Haden.

Né aux Etats-Unis en 1937, Haden ne démarre la contrebasse qu’à 19 ans, après avoir dû renoncer au chant à l’âge de 14 ans, pour cause de poliomélyte. Durant la décennie 50-6O, il fait ses débuts au sein du quartet de Ornette Coleman. Ensuite il joue avec Dexter Gordon, Art Pepper. La fin des années 60 est l’occasion pour Charlie Haden de s’engager dans des causes sociales, à travers la musique.

Ainsi, alors que le Free jazz, mouvement musical qui chamboule les codes du jazz, est à la mode, notamment à New-York, avec pour figures de proue Archie Shepp et Albert Ayler, il rejoint le Jazz Composer’s orchestra, fondé et dirigé par Bill Dixon, puis en 1969, décide de fonder avec la pianiste Carla Bley le Liberation Music Orchestra, qui existe encore aujourd’hui. Il s’engage pour dénoncer les initiatives américaines au Viet-Nam et en Amérique du Sud, écrit une chanson sur Che Guevarra « Song for Che » (1971), qui lui vaudra d’être arrêté et interrogé par les services secrets.

La décade 70-80’s marque un tournant dans les aventures musicales de Charlie Haden. Il participe à la musique du film « Dernier Tango à Paris », rejoue, cette fois en duo, avec ses accolytes préférés : Keith Jarrett, Alice Coltrane, Ornette Coleman, Archie Shepp. Charlie Haden fait par la suite connaissance avec la vague montante du jazz-rock, Pat Metheny (écouter l’album « Beyond Missouri Sky »), mais aussi Michael Brecker, John Scofield. Sa renommée, déjà grande, s’étend auprès du public.

Après une parenthèse longue dans les années 90, il est revenu sur le devant de la scène et a multiplié les collaborations musicales, les rencontres, les projets, enregistrant succesivement avec Enrico Pieranunzi (pianiste), Hank Jones (batteur), Kenny Barron (piano) ou Pat Metheny (guitare).

Duo, trio, quartet, en leader, ou en accompagnateur, du free jazz (Ornette Coleman, Alice Coltrane), au jazz rock (Pat Metheny, John Scofield, Michael Brecker) en passant par le latin jazz (collaborations avec Egberto Gismonti, Gonzalo Rubalcaba), Charlie Haden a tout essayé, joué, expérimenté.  il s’en est allé sans bruit au milieu de l’été, laissant une oeuvre aussi variée qu’intéressante.

Quelques albums  à (re) découvrir : « Life between the exit signs »  ; « Nocturne » ; « Jasmine » ; « Beyond the Missouri sky » ; « Rejoicing » ; « Land of the Sun » ; « Rambling boy » ; « Come sunday » ; « The Montreal Tapes ».

Guillaume.

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