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007, Craig s’en va, un nouveau chapitre va s’écrire.


Dans l’histoire de la saga de l’agent secret britannique le plus célèbre au monde depuis bientôt 60 ans, inspirée je le rappelle des romans d’espionnage de l’auteur anglais Ian Fleming (qui fut aussi journaliste et officier du renseignement naval militaire britannique), le chapitre Daniel Craig (dernier à droite sur la photo ci-dessus) va se refermer avec le dernier épisode tourné avec cet acteur dans le rôle de James Bond, agent 007, dans le film « No time to die » sorti tout récemment (j’y reviens d’ailleurs en fin d’article).

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En effet, après 15 ans passés à endosser ce célèbre costume, d’abord dans « Casino Royale »(2006), titré ainsi en référence au film de 1967 réalisé John Huston avec au casting David Niven, Ursula Andress, Woody Allen, Orson Welles, Péter Sellers, qui narre les aventures de James Bond retiré du monde dans son château, après « Quantum of Solace » (2008), « Skyfall » (2012), »Spectre » (2015), « No time to die » (2021) est donc le dernier film de la série 007 dans lequel l’acteur incarne le célèbre agent secret britannique. En effet il a décidé de remiser le costume au placard des souvenirs de tournages, de rendre la fameuse Aston Martin à son garage, pour passer à autre chose. Lorsqu’il fut nommé en 2006, si certains professionnels comme fans absolus de 007 étaient sceptiques quant à son aptitude pour succéder à Pierce Brosnan dans le rôle de James Bond, il a très vite convaincu tout le monde, relancé la série, par son jeu dynamique, lié à un flegme tout britannique, son physique surentrainé lui permettant de réaliser parfois des cascades. La franchise James Bond ne s’est jamais aussi bien porté depuis qu’il a repris le rôle. Donc autant dire que celui ou celle (car oui, il est possible que dans le prochain épisode, ce soit bel et bien une femme qui tienne le rôle tant envié !, ce qui serait une première dans l’histoire de la saga), qui lui succèdera, portera une lourde responsabilité. Car vous le savez, jusqu’ici, seuls six acteurs, tous britanniques, ont incarnés James Bond : Georges Lazenby (ci-dessous, dans « Au service secret de sa Majesté », 1969), Sean Connery, Roger Moore, Timothy Dalton, Pierce Brosnan et donc Daniel Craig.

 

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Personnellement, j’ai découvert James Bond sous les traits de Roger Moore (Le Saint, Amicalement vôtre) dans les années 80, à la télévision lors de diffusion des films ou au cinéma. J’avais donc pu observer es prestations dans « Vivre et laisser mourir » (1973) avec Jane Seymour, puis aux côtés de Christopher Lee, Maud Adams, Britt Ekland dans « L’Homme au pistolet d’or » (1974), Barbara Bach, Curd Jurgens, Richard Kiel « Requin » dans « L’espion qui m’aimait » (1977), Michael Lonsdale, Richard Kiel »Requin », Lois Chiles Goodhead dans « Moonraker » (1979), ou encore Grace Jones, Christopher Walken, Patrick MacNee (connu pour sa participation à la série télévisée « Chapeau melon et bottes de cuir ») dans l’épisode titré « Dangereusement vôtre » (1985), m’ont marqué. Dans « Rien que pour vos yeux », en 1981, il a pour partenaire une jeune comédienne, Carole Bouquet. J’avais aussi beaucoup aimé « Octopussy »,(1983) avec Louis Jourdan, Steven Berkoff, Vijay Armitraj (ex-tennisman de très haut niveau époque Mac Enroe-Borg). 

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Puis grâce à mon père j’ai découvert les premiers James Bond, ceux incarnés par Sean Connery (ci-dessus). Quel régal. Présence, flegme, détachement, jeu juste et des films, qui s’ils ont vieilli aujourd’hui, n’en conservent pas moins un charme évident. Outre celui cité en début d’article, je peux évoquer « Bons baisers de Russie » (1963), avec Robert Shaw (« Jaws,1975, Steven Spielberg), « Goldfinger »(1964) avec Gert Fröbe (Paris Brûle t-il », « Le salaire de la peur »…), Desmond Llewelyn alias « Q » (qui d’ailleurs sera de toute la saga jusqu’à « World is not enough » (1999), Harold Sakata, « Opération Tonnerre » avec Adolfo Celli, Claudine Auger (1965). Tous de très bonne facture. Plus tard il reviendra en 1983, dans « Jamais plus Jamais » (affiche ci-dessous), où il se confronte à Klaus Maria Brandauer et sa partenaire féminine Kim Basinger. Il affrontera Barbara Carrera. La musique du film sera signée de Michel Legrand.

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Puis vient la période incarnée par Timothy Dalton, avec des films sans grand intérêt. D’abord, en 1987, « The living daylight » (« Tuer n’est pas jouer »), puis deux ans après, en 1989, « Licence to kill », avec Carey Lowell, Robert Davi, ou encore le jeune Benicio Del Toro, et toujours Desmond Lewelyn, bien sûr, dans le rôle de « Q ». Dalton est trop limité dans son jeu, celui-ci se réduisant à des jeux de regards, de sourires entendus, bref là comédie n’avait que peu de place. Dur pour lui qui possède une formation d’art dramatique théâtral. Les deux épisodes ne seront pas des succès commerciaux escomptés.

 

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Ensuite c’est l’acteur Pierce Brosnan , vu notamment dans « Mrs. Doubtfire en 1993, avec Robin Williams et Sally Field, ou encore dans « The Ghostwriter »qui date de 2010, avec Eli Wallach, Ewan Mac Gregor, James Belushi, Kim Cattrall, qui va endosser le costume du célèbre agent secret. Avec lui et son style gravure de mode au sourire ultra-bright, coiffure toujours nickel, le sens de la comédie reviendra dans le jeu. Nous le verrons d’abord dans « Golden eye » (1995), où il fait face à Sean Bean. Ce film voit aussi pour la première fois apparaître « M » sous le traits de Judi Dench. Elle sera présente dans les deux films suivants World is not enough » (1999)et « Meurs un autre jour » (2002) .Enfin il faut savoir que c’est le premier James Bond tourné après la chute de l’URSS et la fin de la guerre froide. Un très bon cru.

Les scènes de Pierce Brosnan face à Sophie Marceau dans « World is not enough » (« Le Monde ne suffit pas »), sorti en 1999, prouvent que ce duo (Sophie Marceau incarne la méchante Elektra King) fonctionne très bien. Son sens de la comédie, de la répartie, alliés à cet humour so british, cet air détaché qu’il donne à son personnage le rendent très sympathique aux yeux du public. Loin de l’image dure et froide des agents secrets. Ce film sera d’ailleurs un vrai gros succès international pour la franchise, avec Brosnan dans le costume de 007.

Nous aurons droit en 2002 à un très spectaculaire « Meurs un autre jour »(Die another day »). Ce film vient célébrer les 40 ans d’existence de la série James Bond. Il sera truffé de références au premier de la série  » James Bond contre Dr. No ». Les scènes censées se passer à la frontière de la Corée, d’où il s’échappe en char, les scènes d’escrimes, la scène finale avec l’avion en feu qui se désintègre (curieusement l’épisode 9 de « Star Wars » possède ce même genre de scène), feront de ce film un des meilleurs de la saga. Le tout sur un rythme incroyable.

En 2006, Daniel Craig prendra le relais jusqu’à aujourd’hui, avec le succès que l’on sait. « No time To Die », réalisé par Cary Joji Fukunaga, qui clôt donc sa participation à la saga 007, nous montre Craig, retiré des affaires, passé du côté de la CIA, mais rappelé par le MI6, pour résoudre une affaire suite au vol d’arme bactériologique mortelle. On y retrouve aussi Léa Seydoux, témoin de la mort de sa mère, puis plus tard, confrontée à son tueur. On découvre Craig en père de famille, tourmenté, tiraillé, loin du personnage parfois froid, lisse qu’il pouvait incarner au début et qu’il s’est évertué à rendre plus humain au fil des films.

Les cascades, courses poursuites  sont réglées superbement. La séquence d’ouverture est époustouflante. Surtout ce film nous présente la personne (je garde le mystère, vous découvrirez son identité par vous-mêmes en allant voir le film) qui va succéder à Daniel Craig pour incarner 007, ce qui d’ailleurs amène des scènes assez cocaces. Le casting est brillant, avec Ralph Tiennes (M), Rami Malek (Safin), que l’on avait découvert sous les traits de Freddie Mercury dans « Bohemian Rhapsody », rôle pour lequel il fut oscarisé, Naomie Harris (Miss Moneypenny), Anna de Armas (Paloma), Lashana Lynch (Nomi), Ben Whishaw (Q). Les lieux de tournage sont encore une fois très variés, allant de l’Italie à Cuba en passant par le Japon, le Danemark. Voir ce dernier volet vaut le coup, assurément. 
Seul bémol, la musique de Hans Zimmer, et la chanson d’ouverture, qui ne restera pas dans les annales. A propos de musiques, si donc vous connaissez évidement le thème principal composé par John Barry, vous aurez sans doute noté ces dernières années que chaque film de la saga est accompagné d’une chanson-titre interprétée par un ou une artiste. Ainsi il eu récemment Adèle pour « Skyfall » en 2012, Sam Smith pour « Writing’s on the wall » tiré de la BO de « Spectre » en 2015, mais il y a eu également au générique de la saga des artistes telles que Shirley Bassey avec « Diamonds are forever » pour le film du même titre en 1971, Tina Turner en 1995, pour « Golden eye », le groupe A-HA en 1987 pour « Living Daylight », Duran Duran avec « A view to a kill » pour le film de 1985 « Dangereusement vôtre », et donc pour le tout récent « No time to die » c’est la chanteuse Billie Eilish qui s’y colle avec « No time to die ». 

Je vous laisse avec quelques bandes annonces des différents films de la saga 007. Cela rappellera sans doute des souvenirs à nombre d’entre vous.

Guillaume.

Michel Legrand, entre jazz et musiques de films, chapitre 2.



Suite au volume 1 déjà chroniqué ici, voilà donc le second volet du coffret « Le monde musical de Michel Legrand » concocté par l’excellent label Frémeaux & Associés. Dans le précédent article consacré à ce coffret magistral, je m’étais arrêté sur la partie jazz de ce grand musicien, qui consacrait un disque entier à Cole Porter, immense musicien de jazz du début du vingtième siècle.

Pour ouvrir ce deuxième chapitre du coffret intitulé « Le monde instrumental de Michel Legrand : Jazz et Musiques de films », sur le disque numéro 7, on démarre avec la formation orchestrale de Michel Legrand, qui interprète le titre « Falling in love again », classique du jazz américain, puis on arrive à la chanson « Avoir un bon copain » chanté par Jean Boyer, puis on découvre « qu’avez-vous fait de mon amant », le fameux « Cheek to Cheek » de Irving Berlin », la belle chanson de Jacques Prévert « Démons et merveilles », l’illustre thème musical composé par Dimitri Tlomkin, du film « Le train sifflera trois fois » (1952, Fred Zinnemann), avec notamment Gary Cooper et Grace Kelly. Puisque j’évoque les musique de films, vous y retrouverez aussi la musique de « La rivière sans retour » (1954), d’Otto Preminger, avec le duo Robert Mitchum-Marilyn Monroe. Une version orchestrale surprenante de « Only you » est au menu de ce disque. Le saxophone remplace le lead vocal. S’en suit « Un américain à Paris », morceau écrit par le célèbre compositeur de jazz George Gershwin, et qui servit de bande-son au film du même réalisé par Vincente Minnelli en 1951, avec à l’affiche Gene Kelly, Leslie Caron et George Guétary. Cette fois Michel Legrand reste au piano tout en dirigeant un orchestre  symphonique. Pour finir ce disque, Michel Legrand nous gratifie de morceaux qui composent la bande originale du film « Une femme est une femme » (1961, Jean-Luc Godard), avec Anna Karina, Marie Dubois, Jean-Claude Brialy et Jean-Paul Belmondo.

Dans le disque suivant, le numéro 8, Michel Legrand nous emmène cette fois dans l’univers des musiques de films qu’il a écrit et dirigé. Cela démarre par « L’Amérique insolite » (1960), documentaire de François Reichenbach, sur le quel il a travaillé et dont il composé la musique. Puis on enchaine avec « Terrain vague »(1960), réalisé par Marcel Carné, dont là encore il écrit en collaboration avec Francis Lemarque la musique. Après arrivent plusieurs titres évoquant « Le Cave se rebiffe », célèbre film de Gilles Grangier (1961), sur des dialogues de Michel Audiard, avec un casting au petits oignons, puisque Jean Gabin est entouré de Bernard Blier, Maurice Biraud, Françoise Rosay, Robert Dalban ou Ginette Leclerc. En 1962, Michel Legrand retrouve le trio Grangier-Audiard-Gabin pour « Le Gentleman d’Epsom » (1962), avec sa thématique autour des courses de chevaux… monde cher à Jean Gabin. Y figurent Louis de Funès, Paul Frankeur, Jean Lefebvre, Madeleine Robinson. Puis on change de registre cinématographique avec tout d’abord « Eva » (1962, Joseph Losey), avec Jeanne Moreau dans le rôle principal. Michel Legrand nous invite à écouter le thème d’Eva, puis celui de Adam et Eva, chanté par Tony Middleton. Enfin pour clore ce disque, Michel Legrand nous offre des extraits de la bande musicale de « Lola » (1962, Jacques Demy), avec Anouk Aimée dans le rôle-titre. Un joli choix.

Pour aborder le neuvième disque, Michel Legrand nous offre un voyage entre la France et es Etats-Unis, entre Paris et New-York, plus précisément Broadway, deux villes où il a vécu, travaillé pendant de longues années. Dans la première partie de ce disque, là encore avec son orchestre Michel Legrand revisite ou joue fidèlement des airs de chansons comme « C’est si bon », « Milord » (écrite par Marguerite Monnot et Georges Moustaki pour la grande Edith Piaf), « que reste-t-il de nos amours » et « Boum » du grand Charles Trenet, un standard du jazz signé Cole Porter « c’est magnifique », « la maladie d’amour », morceau traditionnel antillais, puis la « Petite Fleur » du clarinettiste Sidney Bechet. C’est très agréable de replonger dans ce patrimoine musical, qui avec le temps, peut avoir tendance à disparaître des rayons, des mémoires. C’est donc un travail bien utile accompli par Michel Legrand et encore davantage par Frémeaux & Associés, de ressortir ces pépites. Sur l’autre partie du disque, consacrée à sa période « Broadway », Michel Legrand nous sert une farandole de titres jazz, toujours accompagné de son orchestre. On y trouve « On the street where you live », « Yesterdays », ensuite deux titres de Georges Gershwin, le classique incontournable multi-interprété « Summertime », de même que « I got plenty of nuttin’ « , ou encore « Smoke gets in your eyes ». 

Enfin pour clore ce deuxième chapitre de ce long coffret, le dernier disque rassemble 3 albums, « Strings on fire » (1962), puis un album avec orchestre à cordes, et le troisième, « Michel Legrand se joue Nougaro » (1962) . Sur « Strings on fire », on trouve des perles de morceaux  orchestrés, comme « Perfidia » chanté à l’origine par Alberto Dominguez, « Boulevard of the Broken Dreams », autrefois chantée par Frances Langford, « Close your eyes » immortalisé par Bernice Petkere en 1933, « Come-back to Sorrento » donnée en version originale (italien) par Dino « Dean » Martin en 1953, et pour terminer, une orchestration du « All or nothing at all » que Franck Sinatra chanta merveilleusement dès 1939.  Sur le second album, ça démarre en douceur avec la chanson « Venus » mise en valeur par des cordes très en avant et des choeurs trop discrets hélas. Puis nous avons droit à une très belle version de la chanson d’Orphée (Mahna de Carnaval), tirée du film Orfeu Negro, réalisé par Marcel Camus (1959), dont la musique originale est dû à Luiz Bonfa et Antonio Carlos Jobim. Figure aussi le titre « Adieu tristesse »(Felicidade), également extrait de Orfeu Negro.

Sur le disque consacré au taureau de Toulouse, Claude Nougaro, Michel Legrand reprend quatre chansons célèbres du chanteur français. Il s’agit de « Les Dom Juan », « Le cinéma », « Où? », et « Le jazz et la java ». Que du bonheur en barre d’écouter les orchestrations de ces morceaux. Le son ici est plus moderne, les orchestrations plus jazz-pop, en tous cas sur « Les Dom Juan » où synthés classiques, piano et synthés électroniques se côtoient joyeusement. « Le cinéma » se voit habillé d’un orchestration swinguante et syncopée, un peu folle, mais bien dans l’esprit original. « Où » nous embarque sur des atmosphères très habitées, des rythmes qui se suivent à une cadence folle, le tout dans une ambiance sonore qui fleure bon le psychédélique des 70’s. « Le jazz et la java » qui clôt ce disque et ce long coffret est un morceau qui résume parfaitement ce qu’a été la vie et la musique pour Michel Legrand. Une promenade sonore dans des univers différents, un amusement permanent effectué dans le sérieux, pour toujours donner le meilleur de lui-même.

Le résultat est magnifique. 

En cadeau bonus, nous avons droit à des titres comme « Sans toi », chantée par Corinne Marchand, « La belle P…. », « La joueuse », La menteuse », ces titres figurant sur la bande originale du film « Cléo de 5 à 7 » (1962) d’Agnès Varda. Bref c’est un joli coffret, un objet musical à savourer tranquillement. 

Guillaume.

Michel Legrand, entre jazz et musiques de films, chapitre 1.


Michel Legrand, pianiste-compositeur de génie, décédé en janvier 2019, à qui j’ai déjà consacré ici  un article, lsur sa collaboration musicale avec le réalisateur Jacques Demy, fait l’objet par le label Frémeaux, d’un coffret 10 cd retraçant son travail de création de musique jazz, ses orchestrations de chansons françaises, d’airs traditionnels, de musiques de films, sur lesquels il a travaillé ou non. L’inventaire est copieux et ne couvre que la période allant de 1953 à 1962. Avant que Michel Legrand ne devienne un musicien ultra demandé après les succès des « Parapluies de Cherbourg »(1963), et quatre ans après des « Demoiselles de Rochefort »(1967), réalisés par Jacques Demy. Une nouvelle carrière s’offrira lui désormais.

Dans la première partie du coffret, qui regroupe les six premiers disques, que je vais évoquer ici, il est possible de découvrir un Michel Legrand, qui dès 1953, dirige, sous le pseudo de Big Mike, un orchestre à cordes, avec lequel il interprète des chansons françaises de Gilbert Bécaud (« viens »), puis en 1955 Vincent Scotto (« sous les ponts de Paris »), ou Francis Le marque (« à Paris »). Et même du jazz avec Cole Porter (« I love Paris »).

Dès le second disque, qui aborde l’année 1956, on passe aux musiques de films que Michel Legrand, sans les avoir écrites, dirige avec sa grande formation orchestrale. On y trouve « La complainte de la butte », tirée du film « French Can-Can » (1955) de Jean Renoir, « le grisbi », extrait de « Touchez pas au grisbi »(1954), de Jacques Becker, avec un casting royal Jean Gabin-Lino Ventura-Paul Frankeur, « si tu m’aimais » tirée du film de René Clair « Les grandes manoeuvres »(1955), ou encore « Smile » qui vient de « Les temps modernes » (1936) de Chaplin. Les orchestrations sont brillantes, parfois enjouées, toujours dans un style très aéré, plaisant à écouter. Il en va de même pour le rock, nouveau genre pour lui, vers lesquels il se dirige, avec entre autres « rock around the clock », popularisé aux États-Unis par Bill Haley.

Dans le troisième disque, Michel Legrand aborde avec bonheur les airs traditionnels notamment américains. Ainsi « Red river valley », « Greensleeves », « All throught the night » et « Along the Colorado » subissent-ils sa patte orchestrale. Le résultat est frais, agréable à entendre. Il ajoute même sa patte musicale sur la fameuse chanson française  » en passant par la Lorraine ».

Sur le quatrième opus, année 1957, on change d’univers, pour aborder le jazz. Là, on sent que le musicien-mélomane se régale véritablement. Michel Legrand aborde le morceau mythique écrit par Duke Ellington (« Caravan »), puis il nous embarque vers les rivages colorés du Brésil avec « Bahia », de Ary Barroso, et d’Espagne avec le chatoyant « Granada » signé de Augustin Lara. Il nous régalé aussi d’une très belle version de « Besame mucho ». C’est un régal que d’écouter ce voyage en musiques ici rassemblées par Frémeaux. Et le plaisir n’est pas terminé.

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En effet dans le chapitre 5 de ce gros coffret, est abordé la partie jazz de Michel Legrand, à travers l’année 1958. Imaginez le bonheur ressenti par ce musicien-mélomane lorsqu’il fut amené à diriger des oeuvres écrites par de grands noms de l’histoire du jazz. Que ce soit Duke Ellington (photo ci-dessus) avec « Dont get around much anymore », Fats Waller (première photo ci-dessus)  et sa « The Jitterburg waltz », Benny Goodman avec « Stompin’at the Savoy », Dizzy Gillespie et son célèbre « Night in Tunisia », ou encore Django Reinhardt et son fameux « Nuages », que demander de mieux ? Michel Legrand a donc eu le plaisir de jouer de faire revivre ces standards du jazz sous sa direction, sentiment jubilatoire à n’en pas douter. Le résultat est une fidélité à l’esprit des oeuvres telles que conçues par leurs auteurs, mais là encore Michel Legrand y met sa touche personnelle, tout en subtilité.

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Sûr la sixième partie de ce coffret, qui évoque là aussi l’année 1958, on retrouve Michel Legrand à la direction d’orchestre pour honorer l’un des plus grands compositeurs de musique jazz du vingtième siècle, Cole Porter. A ce monsieur désormais un peu oublié, et c’est fort dommage, le grand public, les musiciens, chanteurs et chanteuses de jazz doivent de pouvoir entendre, jouer, chanter des titres tels que : « Just one of things », « in the still of the night », « What was this thing called love », « Anything goes », « I get a kick out of you », « I’ve got you under my skin », « Night and Day »…et beaucoup d’autres encore. Des interprètes aussi nombreux et célèbres que Frank Sinatra, Michael Bublé, Jamie Cullum, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Diana Krall, Lisa Ekdhal, Harry Connick Jr., Herbie Hancock, Bill Evans, Oscar Peterson, Dinah Washington, Charlie Parker, Marlène Dietrich, Natalie Cole, Rod Stewart, pour ne citer qu’eux …ont repris un jour où l’autre les chansons citées ci-dessus. Michel Legrand se tire à merveille de cet exercice et on sent pleinement le plaisir qu’il prend à jouer ce répertoire de standards.

Cette première partie du coffret consacré à Michel Legrand nous montre donc un musicien multi-cartes, passionné et passionnant, sautant d’un genre à l’autre avec une aisance déconcertante et une facilité incroyable.

La suite sera l’occasion d’une prochaine chronique.

En attendant je vous laisse avec une playlist regroupant les titres évoqués dans cet articles, soit interprétés donc par Michel Legrand, mais aussi par leur compositeurs originaux, et par quelques interprètes célèbres. Régalez-vous.

Guillaume.

Jacques Demy-Michel Legrand, inititateurs de la comédie musicale française.


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Originaire de Pontchâteau, près de Nantes, Jacques Demy est né en 1931, d’un père garagiste, et de mère  coiffeuse. Le père tient son garage jusqu’en 1934, année au cours de laquelle il décède. Il a toujours imaginé que son fils prendrait sa suite. Mais le jeune Jacques a d’autres projets en tête. Lui qui dès l’âge de quatre ans utilisait des marionnettes pour raconter des histoires, puis ensuite à neuf il utilise un petit projecteur de cinéma, et va même jusqu’à peindre la pellicule pour travailler à des films d’animations.

Fin 1944, il achète sa première caméra, et réalise alors des films avec des comédiens puis plus tard des documentaires, comme « Le Sabot » (1947) et « Le sabotier du Val de Loire » (1955). Dans les années 50’s, il réalise quelques courts-métrages, comme « Le bel indifférent » (1957), « La mère et l’enfant »(1959).


Dès 1961, Jacques Demy réalise le film qui va vraiment lancer sa carrière et le faire connaitre auprès du public. « Lola », avec Anouk Aimée, qui interprète le rôle titre, à savoir une danseuse-entraîneuse dans un cabaret nommé « L’Eldorado ». Tombée enceinte très jeune d’un aventurier, Michel, qui part en Amérique, elle élève son enfant seule puis avec un marin fraîchement débarqué de Chicago, qui lui rappelle Michel. C’est aussi grâce à ce film que l’actrice va voir sa carrière décoller.

Par la suite, il va tourner, dans la belle ville de Nantes, deux films qui vont devenir des classiques, tout d’abord « Les parapluies de Cherbourg », en 1964, film pour lequel il obtiendra la palme d’Or au festival de Cannes et le prix Louis Delluc. La comédie musicale à la française est née. Au casting, une certaine Catherine Deneuve. La musique est signée Michel Legrand.

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Grâce au succès international du film, Deneuve et Legrand verront leur notoriété exploser. Suite à ce très grand succès, Jacques Demy travaille sur le scénario des « Demoiselles de Rochefort »(1967), avec Catherine Deneuve et sa sa soeur, la regrettée Françoise Dorléac (photo ci-dessous), mais également le jeune Jacques Perrin (qui produira le film animalier « Microcosmos », sorti en 1996), les danseurs et comédiens américains Gene Kelly (connu notamment pour ses prestations dans « Chantons sous la pluie », aux côté de Fred Astaire), et Georges Chakiris, qui a signé une très belle prestation dans le film « West Side Story » (1962), aux côtés notamment de la jeune comédienne Nathalie Wood.

En 1970, il tournera « Peau d’âne » avec Catherine Deneuve dans le rôle titre avec également la star française Jean Marais. Michel Legrand composera évidemment la musique du film. Dans la foulée, Jacques Demy s’attaque à nouveau scénario, celui de « une chambre en ville »(un des rares films dont de Jacques Demy dont Michel Legrand n’a pas fait la musique, confiée à à Michel Colombier). Tout d’abord prévu pour être tourné en 1972, il subira de nombreux avatars (problème de productions, refus de comédiens), puis après moult péripéties, verra le jour en 1982, avec au casting une belle brochette de talents, puisque Dominique Sanda, Michel Piccoli, Jean-François Stevenin, Richard Berry, Danielle Darrieux. Du très lourd!

Au milieu des années 70’s, Jacques Demy écrit un scénario intitulé « Dancing »… qui attendra quelques années avant de voir le jour sous le titre « 3 places pour le 26 » (1988), avec au casting Yves Montand, acteur-chanteur, Mathilda May, mais aussi Françoise Fabian. Le film ne rencontrera pas un grand succès auprès du public.

Michel Legrand, né en 1932 à Paris, baigne dans un environnement musical, son père Raymond Legrand étant compositeur et sa mère n’est autre que la soeur du chef d’orchestre arménien Jacques Hélian. De 1942 à 1949, Michel Legrand étudie le piano et la composition sous la férule de Nadia Boulanger notamment. Mais loin de cet univers classique, il se prend de passion pour le jazz, après avoir découvert le trompettiste américain Dizzy Gillespie, avec qui il travaillera quelques temps plus tard, en 1952, à l’occasion de la venue en Europe du musicien. Véritable touche à tout, il pratique pas moins de 12 instruments! Devant tant de facilités, son père décide de l’introduire dans le milieu musical de Paris. Il devient ainsi arrangeur au célèbre cabaret des Trois Baudets, dirigé par Jacques Canetti, qui a vu passer Brel, Brassens, Gainsbourg… Legrand travaillera auprès d’Henri Salvador, Catherine Sauvage, ou encore Jacques Brel.

L’année 1954 marque un tournant dans la carrière de Michel Legrand. En effet, la firme Columbia, par l’intermédiaire de Jacques Canetti, lui passe une commande, composer des relectures de standards français en versions jazzy. Cet album, « I Love Paris », lui conférera une renommée internationale. Quatre ans plus tard, il fait connaissance avec trois monstres de l’histoire du jazz, Miles Davis, John Coltrane et Bill Evans, enregistrant avec eux « Legrand jazz ».

Les années 60, l’arrivée de la « nouvelle vague » au cinéma,  avec des noms comme Godard, Truffaut,  Chabrol, Demy, Varda, Resnais, Rivette, vont permettre à Michel Legrand de démarrer une carrière dans le cinéma en tant que compositeur de musique. Dans les années 70, il ira aussi aux Etats-Unis, où aidé de Quincy Jones et Henry Mancini, il intégrera les studios de Hollywood et travaillera avec plusieurs grands noms du cinéma américain.

Bref, Legrand est partout, il touche à tout. Un bourreau de travail, travaillant sur plusieurs projets de front. Comme il déclare dans l’une de ses ultimes interviews, il « aime apprendre, changer de discipline, de style, d’univers, ça (lui) permet de garder l’esprit ouvert, vif, alerte ». Apprendre est son moteur pour tout projet dans lequel il se lance.

Nombre de stars ont eu le privilège de côtoyer, travailler avec lui. De la chanson française comme Claude Nougaro, Henri Salvador, Charles Aznavour, Nana Mouskouri, Franck Sinatra, du jazz avec Lena Horne, Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald, du classique comme Natalie Dessay, Kiri Te Kanawa, Jessye Norman, ou encore le monde la variété internationale avec Barbara Streisand. Sacré casting !

Lui et Jacques Demy ont donc écrits ensemble quelques unes des plus belles pages du cinéma français des 60 dernières années. Quant à Michel Legrand, outre donc son travail avec le réalisateur nantais, il a collaboré avec de très nombreux grands noms du cinéma français, mondial : Marcel Carné, François Reichenbach, Henri Verneuil, Yves Allégret, Jean-Luc Godard, Jean-Paul Rappeneau, Edouard Molinaro, Norman Jewison, Richard Brooks, John Sturges, Richard Lester ou encore Clint Eastwood, pour n’en citer que quelques-uns.

Disparu il y a tout juste un an, Michel Legrand, compositeur, musicien, producteur, chanteur, laisse une oeuvre musicale aussi considérable (200 musiques !!) que variée.

Je vous laisse donc (re) découvrir l’univers de ces deux grands noms du 7ème art, avec des musiques de films qui vous rappelleront sans doute des souvenirs de cinéma.

Guillaume.

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