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Michel Legrand, entre jazz et musiques de films, chapitre 2.

Suite au volume 1 déjà chroniqué ici, voilà donc le second volet du coffret « Le monde musical de Michel Legrand » concocté par l’excellent label Frémeaux & Associés. Dans le précédent article consacré à ce coffret magistral, je m’étais arrêté sur la partie jazz de ce grand musicien, qui consacrait un disque entier à Cole Porter, immense musicien de jazz du début du vingtième siècle.
Pour ouvrir ce deuxième chapitre du coffret intitulé « Le monde instrumental de Michel Legrand : Jazz et Musiques de films », sur le disque numéro 7, on démarre avec la formation orchestrale de Michel Legrand, qui interprète le titre « Falling in love again », classique du jazz américain, puis on arrive à la chanson « Avoir un bon copain » chanté par Jean Boyer, puis on découvre « qu’avez-vous fait de mon amant », le fameux « Cheek to Cheek » de Irving Berlin », la belle chanson de Jacques Prévert « Démons et merveilles », l’illustre thème musical composé par Dimitri Tlomkin, du film « Le train sifflera trois fois » (1952, Fred Zinnemann), avec notamment Gary Cooper et Grace Kelly. Puisque j’évoque les musique de films, vous y retrouverez aussi la musique de « La rivière sans retour » (1954), d’Otto Preminger, avec le duo Robert Mitchum-Marilyn Monroe. Une version orchestrale surprenante de « Only you » est au menu de ce disque. Le saxophone remplace le lead vocal. S’en suit « Un américain à Paris », morceau écrit par le célèbre compositeur de jazz George Gershwin, et qui servit de bande-son au film du même réalisé par Vincente Minnelli en 1951, avec à l’affiche Gene Kelly, Leslie Caron et George Guétary. Cette fois Michel Legrand reste au piano tout en dirigeant un orchestre symphonique. Pour finir ce disque, Michel Legrand nous gratifie de morceaux qui composent la bande originale du film « Une femme est une femme » (1961, Jean-Luc Godard), avec Anna Karina, Marie Dubois, Jean-Claude Brialy et Jean-Paul Belmondo.
Dans le disque suivant, le numéro 8, Michel Legrand nous emmène cette fois dans l’univers des musiques de films qu’il a écrit et dirigé. Cela démarre par « L’Amérique insolite » (1960), documentaire de François Reichenbach, sur le quel il a travaillé et dont il composé la musique. Puis on enchaine avec « Terrain vague »(1960), réalisé par Marcel Carné, dont là encore il écrit en collaboration avec Francis Lemarque la musique. Après arrivent plusieurs titres évoquant « Le Cave se rebiffe », célèbre film de Gilles Grangier (1961), sur des dialogues de Michel Audiard, avec un casting au petits oignons, puisque Jean Gabin est entouré de Bernard Blier, Maurice Biraud, Françoise Rosay, Robert Dalban ou Ginette Leclerc. En 1962, Michel Legrand retrouve le trio Grangier-Audiard-Gabin pour « Le Gentleman d’Epsom » (1962), avec sa thématique autour des courses de chevaux… monde cher à Jean Gabin. Y figurent Louis de Funès, Paul Frankeur, Jean Lefebvre, Madeleine Robinson. Puis on change de registre cinématographique avec tout d’abord « Eva » (1962, Joseph Losey), avec Jeanne Moreau dans le rôle principal. Michel Legrand nous invite à écouter le thème d’Eva, puis celui de Adam et Eva, chanté par Tony Middleton. Enfin pour clore ce disque, Michel Legrand nous offre des extraits de la bande musicale de « Lola » (1962, Jacques Demy), avec Anouk Aimée dans le rôle-titre. Un joli choix.
Pour aborder le neuvième disque, Michel Legrand nous offre un voyage entre la France et es Etats-Unis, entre Paris et New-York, plus précisément Broadway, deux villes où il a vécu, travaillé pendant de longues années. Dans la première partie de ce disque, là encore avec son orchestre Michel Legrand revisite ou joue fidèlement des airs de chansons comme « C’est si bon », « Milord » (écrite par Marguerite Monnot et Georges Moustaki pour la grande Edith Piaf), « que reste-t-il de nos amours » et « Boum » du grand Charles Trenet, un standard du jazz signé Cole Porter « c’est magnifique », « la maladie d’amour », morceau traditionnel antillais, puis la « Petite Fleur » du clarinettiste Sidney Bechet. C’est très agréable de replonger dans ce patrimoine musical, qui avec le temps, peut avoir tendance à disparaître des rayons, des mémoires. C’est donc un travail bien utile accompli par Michel Legrand et encore davantage par Frémeaux & Associés, de ressortir ces pépites. Sur l’autre partie du disque, consacrée à sa période « Broadway », Michel Legrand nous sert une farandole de titres jazz, toujours accompagné de son orchestre. On y trouve « On the street where you live », « Yesterdays », ensuite deux titres de Georges Gershwin, le classique incontournable multi-interprété « Summertime », de même que « I got plenty of nuttin’ « , ou encore « Smoke gets in your eyes ».
Enfin pour clore ce deuxième chapitre de ce long coffret, le dernier disque rassemble 3 albums, « Strings on fire » (1962), puis un album avec orchestre à cordes, et le troisième, « Michel Legrand se joue Nougaro » (1962) . Sur « Strings on fire », on trouve des perles de morceaux orchestrés, comme « Perfidia » chanté à l’origine par Alberto Dominguez, « Boulevard of the Broken Dreams », autrefois chantée par Frances Langford, « Close your eyes » immortalisé par Bernice Petkere en 1933, « Come-back to Sorrento » donnée en version originale (italien) par Dino « Dean » Martin en 1953, et pour terminer, une orchestration du « All or nothing at all » que Franck Sinatra chanta merveilleusement dès 1939. Sur le second album, ça démarre en douceur avec la chanson « Venus » mise en valeur par des cordes très en avant et des choeurs trop discrets hélas. Puis nous avons droit à une très belle version de la chanson d’Orphée (Mahna de Carnaval), tirée du film Orfeu Negro, réalisé par Marcel Camus (1959), dont la musique originale est dû à Luiz Bonfa et Antonio Carlos Jobim. Figure aussi le titre « Adieu tristesse »(Felicidade), également extrait de Orfeu Negro.
Sur le disque consacré au taureau de Toulouse, Claude Nougaro, Michel Legrand reprend quatre chansons célèbres du chanteur français. Il s’agit de « Les Dom Juan », « Le cinéma », « Où? », et « Le jazz et la java ». Que du bonheur en barre d’écouter les orchestrations de ces morceaux. Le son ici est plus moderne, les orchestrations plus jazz-pop, en tous cas sur « Les Dom Juan » où synthés classiques, piano et synthés électroniques se côtoient joyeusement. « Le cinéma » se voit habillé d’un orchestration swinguante et syncopée, un peu folle, mais bien dans l’esprit original. « Où » nous embarque sur des atmosphères très habitées, des rythmes qui se suivent à une cadence folle, le tout dans une ambiance sonore qui fleure bon le psychédélique des 70’s. « Le jazz et la java » qui clôt ce disque et ce long coffret est un morceau qui résume parfaitement ce qu’a été la vie et la musique pour Michel Legrand. Une promenade sonore dans des univers différents, un amusement permanent effectué dans le sérieux, pour toujours donner le meilleur de lui-même.
Le résultat est magnifique.
En cadeau bonus, nous avons droit à des titres comme « Sans toi », chantée par Corinne Marchand, « La belle P…. », « La joueuse », La menteuse », ces titres figurant sur la bande originale du film « Cléo de 5 à 7 » (1962) d’Agnès Varda. Bref c’est un joli coffret, un objet musical à savourer tranquillement.
Guillaume.
Michel Legrand, entre jazz et musiques de films, chapitre 1.

Michel Legrand, pianiste-compositeur de génie, décédé en janvier 2019, à qui j’ai déjà consacré ici un article, lsur sa collaboration musicale avec le réalisateur Jacques Demy, fait l’objet par le label Frémeaux, d’un coffret 10 cd retraçant son travail de création de musique jazz, ses orchestrations de chansons françaises, d’airs traditionnels, de musiques de films, sur lesquels il a travaillé ou non. L’inventaire est copieux et ne couvre que la période allant de 1953 à 1962. Avant que Michel Legrand ne devienne un musicien ultra demandé après les succès des « Parapluies de Cherbourg »(1963), et quatre ans après des « Demoiselles de Rochefort »(1967), réalisés par Jacques Demy. Une nouvelle carrière s’offrira lui désormais.
Dans la première partie du coffret, qui regroupe les six premiers disques, que je vais évoquer ici, il est possible de découvrir un Michel Legrand, qui dès 1953, dirige, sous le pseudo de Big Mike, un orchestre à cordes, avec lequel il interprète des chansons françaises de Gilbert Bécaud (« viens »), puis en 1955 Vincent Scotto (« sous les ponts de Paris »), ou Francis Le marque (« à Paris »). Et même du jazz avec Cole Porter (« I love Paris »).
Dès le second disque, qui aborde l’année 1956, on passe aux musiques de films que Michel Legrand, sans les avoir écrites, dirige avec sa grande formation orchestrale. On y trouve « La complainte de la butte », tirée du film « French Can-Can » (1955) de Jean Renoir, « le grisbi », extrait de « Touchez pas au grisbi »(1954), de Jacques Becker, avec un casting royal Jean Gabin-Lino Ventura-Paul Frankeur, « si tu m’aimais » tirée du film de René Clair « Les grandes manoeuvres »(1955), ou encore « Smile » qui vient de « Les temps modernes » (1936) de Chaplin. Les orchestrations sont brillantes, parfois enjouées, toujours dans un style très aéré, plaisant à écouter. Il en va de même pour le rock, nouveau genre pour lui, vers lesquels il se dirige, avec entre autres « rock around the clock », popularisé aux États-Unis par Bill Haley.
Dans le troisième disque, Michel Legrand aborde avec bonheur les airs traditionnels notamment américains. Ainsi « Red river valley », « Greensleeves », « All throught the night » et « Along the Colorado » subissent-ils sa patte orchestrale. Le résultat est frais, agréable à entendre. Il ajoute même sa patte musicale sur la fameuse chanson française » en passant par la Lorraine ».
Sur le quatrième opus, année 1957, on change d’univers, pour aborder le jazz. Là, on sent que le musicien-mélomane se régale véritablement. Michel Legrand aborde le morceau mythique écrit par Duke Ellington (« Caravan »), puis il nous embarque vers les rivages colorés du Brésil avec « Bahia », de Ary Barroso, et d’Espagne avec le chatoyant « Granada » signé de Augustin Lara. Il nous régalé aussi d’une très belle version de « Besame mucho ». C’est un régal que d’écouter ce voyage en musiques ici rassemblées par Frémeaux. Et le plaisir n’est pas terminé.
En effet dans le chapitre 5 de ce gros coffret, est abordé la partie jazz de Michel Legrand, à travers l’année 1958. Imaginez le bonheur ressenti par ce musicien-mélomane lorsqu’il fut amené à diriger des oeuvres écrites par de grands noms de l’histoire du jazz. Que ce soit Duke Ellington (photo ci-dessus) avec « Dont get around much anymore », Fats Waller (première photo ci-dessus) et sa « The Jitterburg waltz », Benny Goodman avec « Stompin’at the Savoy », Dizzy Gillespie et son célèbre « Night in Tunisia », ou encore Django Reinhardt et son fameux « Nuages », que demander de mieux ? Michel Legrand a donc eu le plaisir de jouer de faire revivre ces standards du jazz sous sa direction, sentiment jubilatoire à n’en pas douter. Le résultat est une fidélité à l’esprit des oeuvres telles que conçues par leurs auteurs, mais là encore Michel Legrand y met sa touche personnelle, tout en subtilité.
Sûr la sixième partie de ce coffret, qui évoque là aussi l’année 1958, on retrouve Michel Legrand à la direction d’orchestre pour honorer l’un des plus grands compositeurs de musique jazz du vingtième siècle, Cole Porter. A ce monsieur désormais un peu oublié, et c’est fort dommage, le grand public, les musiciens, chanteurs et chanteuses de jazz doivent de pouvoir entendre, jouer, chanter des titres tels que : « Just one of things », « in the still of the night », « What was this thing called love », « Anything goes », « I get a kick out of you », « I’ve got you under my skin », « Night and Day »…et beaucoup d’autres encore. Des interprètes aussi nombreux et célèbres que Frank Sinatra, Michael Bublé, Jamie Cullum, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan, Diana Krall, Lisa Ekdhal, Harry Connick Jr., Herbie Hancock, Bill Evans, Oscar Peterson, Dinah Washington, Charlie Parker, Marlène Dietrich, Natalie Cole, Rod Stewart, pour ne citer qu’eux …ont repris un jour où l’autre les chansons citées ci-dessus. Michel Legrand se tire à merveille de cet exercice et on sent pleinement le plaisir qu’il prend à jouer ce répertoire de standards.
Cette première partie du coffret consacré à Michel Legrand nous montre donc un musicien multi-cartes, passionné et passionnant, sautant d’un genre à l’autre avec une aisance déconcertante et une facilité incroyable.
La suite sera l’occasion d’une prochaine chronique.
En attendant je vous laisse avec une playlist regroupant les titres évoqués dans cet articles, soit interprétés donc par Michel Legrand, mais aussi par leur compositeurs originaux, et par quelques interprètes célèbres. Régalez-vous.
Guillaume.
François Truffaut-Georges Delerue, 2 talents associés.

Pour la cinquième fois, je vais évoquer un duo associant un réalisateur et un compositeur de musiques de films. Après avoir parlé du duo Luc Besson-Eric Serra, je vais revenir dans les années 60-70 avec la paire François Truffaut-Georges Delerue.
Né à Paris en 1932, François Truffaut d’une fille mère issu de milieu catholique fervent, puis confié à une nourrice. En 1933, sa mère rencontre et épouse Roland Truffaut qui reconnaît l’enfant civilement. Le jeune Truffaut est ensuite, à l’êge de 3 ans, confié à ses grands-parents, qui habitent en bas de Montmartre, à deux pas de chez ses parents. A 7 ans, passionné par la lecture et le cinéma qu’il fréquente plus que souvent, y compris pendant le temps d’école, il dévore tout ce qui concerne Jean Renoir, René Clair, Jean Vigo, Claude Autant-Lara, Jean Cocteau ou Yves Allégret.
Quand sa grand-mère maternelle décède, en 1942, Truffaut réintègre le domicile parental qui se trouve non loin de celui d’un jeune chanteur qui fera une immense carrière : Charles Aznavour. Le hasard fera que 18 ans plus tard, ce dernier sera le personnage principal de « Tirez sur le pianiste ». A 12 ans seulement, il fait ses premiers « 400 coups » au Lycée Rollin. Apprenant la vérité sur sa naissance à la lecture d’un carnet de son père, il est bouleversé et devient fugueur. Il fréquente alors les salles obscures des cinémas de Pigalle.
Après une enfance et adolescence difficile, ballotté entre parents, nourrice et grands-parents, puis la révélation de la vérité sur sa naissance à la lecture d’un carnet de son père, Truffaut se réfugie dans les cinémas. Puis vient à fonder un cinéclub, sur les conseils d’André Bazin, qu’il retrouvera quelques mois plus tard, au sein de la revue Travail et culture ». En 1959, Truffaut démarre la saga des aventures du personnage d’Antoine Doinel avec le film « les 400 coups » avec le jeune comédien Jean-Pierre Léaud. Ce film obtiendra d’ailleurs le prix de la mise en scène au festival de Cannes la même année. La suite, ce sera « Antoine et Colette »(1962), « Baisers volés »(1968), « Domicile conjugal »(1970) et « l’amour en fuite » (1979).
Henri-Pierre Roché auteur de « Jules et Jim », « Deux anglaises et le continent » verra François Truffaut adapter ses deux romans. Il se basera, pour ces adaptations, sur les notes laissées à sa veuve. François Truffaut, tout au long de sa filmographie, a fait tourner et parfois débuter devant sa caméra, les plus grandes actrices françaises ou américaines. Jugez plutôt :
Claude Jade (« Baisers volés »(1968), « Domicile conjugal »(1970), « L’amour en fuite »(1979), Nathalie Baye (début dans « La nuit américaine »,1973, rôle titre dans « La chambre verte », Isabelle Adjani dans « L’histoire d’Adèle H »(1975), Jacqueline Bisset dans « La nuit américaine »(1975), avec la jeune débutante Nathalie Baye. Catherine Deneuve dans « La sirène du Mississippi »(1969), « Le dernier métro »(1980), Marie-France Pisier fit ses débuts à 17 ans dans « Antoine et Colette »(1962). Fanny Ardant, qui fut son dernier amour, joua dans « La femme d’à côté »(1981) et « Vivement dimanche »(1983).
Côté acteurs, il y eut bien sûr Jean-Pierre Léaud dans « Les 400 coups »(1959), « Antoine et Colette », « Baisers volés », « Domicile conjugal », Jean-Paul Belmondo (« La sirène du Mississippi »), Jean-François Stévenin, lui, fut son assistant et joua dans « l’Argent de poche » et « La nuit américaine », Gérard Depardieu dans « La femme d’à côté », « Le dernier métro « , Jean-Louis Trintignant dans « Vivement dimanche ». Vous le voyez, un éventail de comédien.n.e.s très large. Disparu en 1984, François Truffaut laisse une oeuvre très riche et des films devenus des classiques du cinéma.

Georges Delerue, naît à Roubaix en 1925, au sein d’une famille qui aime la musique. Son père, contremaître dans une usine et sa mère, qui parfois chante des airs de Gounod ou Bizet tout en jouant au piano, emmènent leur fils assez souvent au cinéma. Un déclic et la naissance d’une passion qui le conduira à en faire son métier.
En 1939, alors élève dans une école formant aux métiers de la métallurgie, sa mère décide de l’inscrire au Conservatoire. Il y apprend la clarinette, sans plaisir. A 14 ans, il stoppe tout et retourne à l’usine pour aider sa famille. Des études de solfège au Conservatoire, une admission en classe de piano lui permettront de découvrir des compositeurs comme Bach, Mozart, Chopin, Beethoven.
1945 est un tournant. Auréolé de 3 premiers prix de Conservatoire à Roubaix (clarinette, piano, harmonie), il rentre au Conservatoire de Paris. Quatre ans plus tard, il remporte le premier prix de composition.

En 1952, Georges Delerue obtient le poste de compositeur et chef d’orchestre à la Radiodiffusion française. Créateur du Conservatoire de Nancy en1957, deux ans plus tard, sur les conseils de Darius Milhaud, il se lance dans la composition pour le cinéma, avec « Hiroshima mon amour »d’alain Resnais (1959). Dans les années 60, en plein mouvement de la Nouvelle Vague, Delerue fera deux rencontres qui vont faire basculer son destin, celles de François Truffaut et Jean-Luc Godard. Il composera pour le premier la musique de « Jules et Jim », et pour le second celle du film « Le Mépris ». Ces deux films obtiendront un tel succès à l’étranger que Georges Delerue verra son statut de compositeur changer. Il est désormais un musicien qui compte, un compositeur que l’on s’arrache.

Georges Delerue verra son travail salué et récompensé à plusieurs reprises. En France, ce sont 3 Césars successifs en 1979, 1980 et 1981 pour respectivement les films « Préparez vos mouchoirs », « L’amour en fuite », et « Le dernier Métro ». Aux Etats-Unis, c’est pour le film « I love you, je t’aime » qu’il recevra un Oscar en 1981.
Outre son travail pour les musiques de film, Delerue a aussi composé des musiques au registre plus classique, comme des musiques de chambre, des musiques pour orchestres. Décédé à l’âge de 67 ans, Georges Delerue laisse derrière lui une œuvre musicale considérable, riche, variée.
Le début d’une prodigieuse carrière ornée de 300 musiques de films, dont outre « Jules et Jim « , « Le mépris », il signera « Le corniaud », « Le cerveau », « Platoon », »Le dernier métro », »Les rois maudits »… et j’en passe.
Outre Francois Truffaut et Jean-Luc Godard, Georges Delerue aura également prêté son talent à des réalisateurs tels que Gérard Oury, Oliver Stone, Claude Barma, Agnès Varda, René Clair, Georges Lautner, Philippe de Broca, Alain Corneau, Bertrand Blier.
Un casting de rêve pour ce compositeur qui côtoiera les plus grands comédiens : Yves Montand, Bourvil, Jean-Paul Belmondo, Michel Piccoli, Brigitte Bardot, Louis de Funès, Jacqueline Bisset, Kevin Bacon et bien d’autres encore…
En tous cas, le travail commun mené par le duo Truffaut-Delerue a laissé en héritage de très beaux films.
Je vous laisse avec un sélection des musiques de Georges Delerue.
Guillaume.
Jacques Demy-Michel Legrand, inititateurs de la comédie musicale française.

Originaire de Pontchâteau, près de Nantes, Jacques Demy est né en 1931, d’un père garagiste, et de mère coiffeuse. Le père tient son garage jusqu’en 1934, année au cours de laquelle il décède. Il a toujours imaginé que son fils prendrait sa suite. Mais le jeune Jacques a d’autres projets en tête. Lui qui dès l’âge de quatre ans utilisait des marionnettes pour raconter des histoires, puis ensuite à neuf il utilise un petit projecteur de cinéma, et va même jusqu’à peindre la pellicule pour travailler à des films d’animations.
Fin 1944, il achète sa première caméra, et réalise alors des films avec des comédiens puis plus tard des documentaires, comme « Le Sabot » (1947) et « Le sabotier du Val de Loire » (1955). Dans les années 50’s, il réalise quelques courts-métrages, comme « Le bel indifférent » (1957), « La mère et l’enfant »(1959).
Dès 1961, Jacques Demy réalise le film qui va vraiment lancer sa carrière et le faire connaitre auprès du public. « Lola », avec Anouk Aimée, qui interprète le rôle titre, à savoir une danseuse-entraîneuse dans un cabaret nommé « L’Eldorado ». Tombée enceinte très jeune d’un aventurier, Michel, qui part en Amérique, elle élève son enfant seule puis avec un marin fraîchement débarqué de Chicago, qui lui rappelle Michel. C’est aussi grâce à ce film que l’actrice va voir sa carrière décoller.

Par la suite, il va tourner, dans la belle ville de Nantes, deux films qui vont devenir des classiques, tout d’abord « Les parapluies de Cherbourg », en 1964, film pour lequel il obtiendra la palme d’Or au festival de Cannes et le prix Louis Delluc. La comédie musicale à la française est née. Au casting, une certaine Catherine Deneuve. La musique est signée Michel Legrand.

Grâce au succès international du film, Deneuve et Legrand verront leur notoriété exploser. Suite à ce très grand succès, Jacques Demy travaille sur le scénario des « Demoiselles de Rochefort »(1967), avec Catherine Deneuve et sa sa soeur, la regrettée Françoise Dorléac (photo ci-dessous), mais également le jeune Jacques Perrin (qui produira le film animalier « Microcosmos », sorti en 1996), les danseurs et comédiens américains Gene Kelly (connu notamment pour ses prestations dans « Chantons sous la pluie », aux côté de Fred Astaire), et Georges Chakiris, qui a signé une très belle prestation dans le film « West Side Story » (1962), aux côtés notamment de la jeune comédienne Nathalie Wood.
En 1970, il tournera « Peau d’âne » avec Catherine Deneuve dans le rôle titre avec également la star française Jean Marais. Michel Legrand composera évidemment la musique du film. Dans la foulée, Jacques Demy s’attaque à nouveau scénario, celui de « une chambre en ville »(un des rares films dont de Jacques Demy dont Michel Legrand n’a pas fait la musique, confiée à à Michel Colombier). Tout d’abord prévu pour être tourné en 1972, il subira de nombreux avatars (problème de productions, refus de comédiens), puis après moult péripéties, verra le jour en 1982, avec au casting une belle brochette de talents, puisque Dominique Sanda, Michel Piccoli, Jean-François Stevenin, Richard Berry, Danielle Darrieux. Du très lourd!
Au milieu des années 70’s, Jacques Demy écrit un scénario intitulé « Dancing »… qui attendra quelques années avant de voir le jour sous le titre « 3 places pour le 26 » (1988), avec au casting Yves Montand, acteur-chanteur, Mathilda May, mais aussi Françoise Fabian. Le film ne rencontrera pas un grand succès auprès du public.

Michel Legrand, né en 1932 à Paris, baigne dans un environnement musical, son père Raymond Legrand étant compositeur et sa mère n’est autre que la soeur du chef d’orchestre arménien Jacques Hélian. De 1942 à 1949, Michel Legrand étudie le piano et la composition sous la férule de Nadia Boulanger notamment. Mais loin de cet univers classique, il se prend de passion pour le jazz, après avoir découvert le trompettiste américain Dizzy Gillespie, avec qui il travaillera quelques temps plus tard, en 1952, à l’occasion de la venue en Europe du musicien. Véritable touche à tout, il pratique pas moins de 12 instruments! Devant tant de facilités, son père décide de l’introduire dans le milieu musical de Paris. Il devient ainsi arrangeur au célèbre cabaret des Trois Baudets, dirigé par Jacques Canetti, qui a vu passer Brel, Brassens, Gainsbourg… Legrand travaillera auprès d’Henri Salvador, Catherine Sauvage, ou encore Jacques Brel.

L’année 1954 marque un tournant dans la carrière de Michel Legrand. En effet, la firme Columbia, par l’intermédiaire de Jacques Canetti, lui passe une commande, composer des relectures de standards français en versions jazzy. Cet album, « I Love Paris », lui conférera une renommée internationale. Quatre ans plus tard, il fait connaissance avec trois monstres de l’histoire du jazz, Miles Davis, John Coltrane et Bill Evans, enregistrant avec eux « Legrand jazz ».
Les années 60, l’arrivée de la « nouvelle vague » au cinéma, avec des noms comme Godard, Truffaut, Chabrol, Demy, Varda, Resnais, Rivette, vont permettre à Michel Legrand de démarrer une carrière dans le cinéma en tant que compositeur de musique. Dans les années 70, il ira aussi aux Etats-Unis, où aidé de Quincy Jones et Henry Mancini, il intégrera les studios de Hollywood et travaillera avec plusieurs grands noms du cinéma américain.
Bref, Legrand est partout, il touche à tout. Un bourreau de travail, travaillant sur plusieurs projets de front. Comme il déclare dans l’une de ses ultimes interviews, il « aime apprendre, changer de discipline, de style, d’univers, ça (lui) permet de garder l’esprit ouvert, vif, alerte ». Apprendre est son moteur pour tout projet dans lequel il se lance.
Nombre de stars ont eu le privilège de côtoyer, travailler avec lui. De la chanson française comme Claude Nougaro, Henri Salvador, Charles Aznavour, Nana Mouskouri, Franck Sinatra, du jazz avec Lena Horne, Sarah Vaughan, Ella Fitzgerald, du classique comme Natalie Dessay, Kiri Te Kanawa, Jessye Norman, ou encore le monde la variété internationale avec Barbara Streisand. Sacré casting !
Lui et Jacques Demy ont donc écrits ensemble quelques unes des plus belles pages du cinéma français des 60 dernières années. Quant à Michel Legrand, outre donc son travail avec le réalisateur nantais, il a collaboré avec de très nombreux grands noms du cinéma français, mondial : Marcel Carné, François Reichenbach, Henri Verneuil, Yves Allégret, Jean-Luc Godard, Jean-Paul Rappeneau, Edouard Molinaro, Norman Jewison, Richard Brooks, John Sturges, Richard Lester ou encore Clint Eastwood, pour n’en citer que quelques-uns.
Disparu il y a tout juste un an, Michel Legrand, compositeur, musicien, producteur, chanteur, laisse une oeuvre musicale aussi considérable (200 musiques !!) que variée.
Je vous laisse donc (re) découvrir l’univers de ces deux grands noms du 7ème art, avec des musiques de films qui vous rappelleront sans doute des souvenirs de cinéma.
Guillaume.
Alfred Hitchcock-Bernard Hermann, maîtres de la psychose.

Quand on évoque le lien entre le cinéma et la musique, il est impossible de passer à côté de ce duo constitué de Alfred Hitchcock et Bernard Herrmann. Dans le cinéma américain des années 50-60, Alfred Hitchcock et sa silhouette ronde passe-partout, avait réussi à imposer, au travers de films aux genres différents ( j’y reviendrai), un style narratif très reconnaissable et une manière de filmer ses personnages très précise.
Alfred Joseph Hitchcock, réalisateur-producteur, est né à Londres en 1899. Issu d’une famille catholique, notamment par la filiation maternelle, d’origine irlandaise, Hitchcock va pour autant suivre une éducation dans un collège tenu par des jésuites. Comparativement à son frère et sa soeur, il passe une enfance marquée par la solitude, due surtout à son obésité précoce, se mettant alors à l’écart de ses camarades. Subissant parfois des punitions sévères de la part de sa mère, il s’inspirera de cela pour forger le portrait de Norman Bates (joué par Anthony Perkins), dans le film « Psychose ».
A 14 ans, suite au décès de son père en 1914, il part s’inscrire à la London County Council School of Enginering and Navigaton. Diplôme en poche, il se tourne alors vers l’écriture de petites nouvelles.
Plus tard, après un passage dans le monde la publicité où il peaufine ses talents de graphiste, il se tourne vers le cinéma au début des années 20. Engagé aux Studios d’Islington, il y fait ses armes. En 1923, profitant de la maladie du réalisateur de « Always tell your wife », il fait ses grands débuts derrière la caméra. Le pied à l’étrier, Hitchcock ne quittera plus ce rôle, lui l’amateur de suspense, d’humour noir, grinçant, amateur d’expressionnisme puisé dans le cinéma allemand, surtout Murnau.
Après une première tentative américaine dabs les années 30, décevante malgré des films qui deviendront des références comme « L’homme qui en savait trop »(1934), « les 39 marches »(1935), « La taverne de la Jamaïque » (1939) et des débuts avec le producteur David Selznick dans les années 40 pour qui il réalisera 4 films (« Rebacca », 1940 ; « La Maison du Docteur Edwardes », 1945 ; « Les Enchainés », 1946 ; « Le Procès Paradine », 1947), il décide de devenir son propre producteur, d’être ainsi totalement libre et maître de son travail.
Après un retour en Angleterre, il revient au pays du cinéma dans les années 50 et entame alors une période faste et réalise des films qui deviendront des « classiques » du cinéma. Pêle-mêle, outre « Rebecca »(1940) et « La maison du docteur Edwardes »(1945) déjà cités, viendront ensuite « Les amants du Capricorne »(1949), « L’inconnu du Nord-Express » (1951), »Le crime était presque parfait » (1954), »Fenêtre sur Cour » (1954), « La main au collet » (1955), « Vertigo » (1958), « La mort aux trousses »(1959), « Psychose »(1960), « Les Oiseaux »(1963). Chaque film est un bijou, que l’on ne se lasse pas de revoir. Intrigue, suspense, description des personnages, castings très judicieux, bref Hitchcock maîtrisait son art à la perfection.


Castings : A propos des acteurs et actrices qu’il a eu devant sa caméra, on peut citer John Gielgud, Peter Lorre, Madeleine Carroll, Laurence Olivier, Maureen O’hara, Charles Laughton, Joan Fontaine, James Stewart, Kim Novak, Martin Landau, Cary Grant, Gregory Peck, James Mason, Ingrid Bergman, ou encore Grace Kelly… vous le voyez, une pluie d’étoiles du cinéma américain, à l’époque de l’âge du cinéma hollywoodien.
Personnage aussi mystérieux sur lui-même que directif sur les plateaux de tournage, Hitchcock avait toujours dans ses films deux stéréotypes concernant ses personnages principaux : L’homme était toujours un être élégant, séducteur, parfois naïf, fragile, parfois curieux plus que de rigueur, embarqué malgré lui dans une histoire qui le dépasse (James Stewart et Cary Grant ont incarnés ces rôles-là à merveille. L’héroïne, souvent interprétée par Kim Novak, Eva Marie-Saint, Grace Kelly, est un brin naïve, tombe sous le charme du héros et / ou le manipulent à dessein. Hitchcock traita tout au long de ses films de sujets aussi divers que la folie, l’espionnage, le polar, la voyeurisme.

Bernard Herrmann a d’abord travaillé chez CBS, entre 1934 et 1939, comme chef d’orchestre, pour illustrer les pièces radiophoniques diffusées à l’époque sur ce média incontournable. Il a démarré sa carrière en écrivant la musique du fameux « Citizen Kane »(1940) d’Orson Welles, pour qui il composera aussi la partition musicale de « la splendeur des Amberson »(1942).
C’est David Selznick, qui, en 1955, impressionné par le travail d’ Herrmann sur le film »Tous les biens de la Terre », facilite la rencontre avec Alfred Hitchcock. De 1958 à 1963, Herrmann compose des musiques pour des films de genres très différents comme l’aventure avec « le 7eme voyage de Sinbad », « L’île mystérieuse » (1961) ou le fantastique avec « Jason et les Argonautes » (1963).
Outre d’avoir composé les musiques de beaucoup de films d’Alfred Hitchcock, Herrmann travaillera avec des réalisateurs très différents comme Robert Stevenson (« Jane Eyre », 1944), Joseph Mankiewicz (« L’aventure de Madame Muir », 1947 ; « L’affaire Ciceron », 1954), Martin Scorsese ( « Taxi Driver », 1976) ou Robert Wise (« le jour où Terre s’arrêta », 1951), François Truffaut (« Farenheit 451 », 1966 ; « La mariée était en noir », 1967), Brian de Palma (« Soeur de sang », 1973 ; « Obsession », 1974).
Musicien qui s’est adapté à tous les genres de cinéma, Bernard Herrmann a cotoyé les plus grands du cinéma du 20ème siècle. Il laisse une oeuvre très importante et remarquable par sa qualité.
N’hésitez pas à vous plonger ou à redécouvrir sa musique, cela vous emportera sans doute ou vous rappellera des souvenirs de cinéma, et vous donnera pourquoi pas l’envie de revoir des films d’Hitchcock et les autres.
Guillaume.
Besson-Serra, à l’unisson.

En 1983, le cinéma français va voir débarquer un jeune réalisateur dont il faudra désormais retenir le nom: Luc Besson. Réalisateur de son premier film, »le dernier combat » tourné en noir et blanc, Besson va révéler in acteur, une nature physique, du nom de Jean Reno.
Luc Besson fera donc tourner le colossal Jean Reno dans plusieurs de ses films, « le Grand Bleu », (film hommage à Jacques Mayol, avec Jean-Marc Barr, Rosanna Arquette), « Leon », tourné avec la jeune Nathalie Portman, puis bien plus tard « Immortal ». Mais aussi un musicien, qui va composer pratiquement toutes ses musiques de films par la suite. Son nom, Eric Serra. Bassiste, mais également batteur, il a notamment accompagné Jacques Higelin lors des concerts donnés à Bercy, alors qu’il n’avait que 20 ans et fut nommé directeur musical à l’époque par Maître Jacques.
Suite au succès de son premier film, Besson va s’attaquer à ce qui sera son plus grand succès populaire, « le grand bleu », qui raconte la relation d’amitié sur fond de concurrence, ayant lié le plongeur-apnéiste français Jacques Mayol et l’italien Enzo Pelizzari.
Ce film, invité de dernière minute au prestigieux festival de Cannes, sous la pression du succès public, va concrétiser le succès du duo Besson-Serra.
Dès lors, Besson va enchaîner les films à succès aidés du talent musical de Eric Serra. Suivront donc « Subway » avec une distribution de haut vol (Isabelle Adjani, Jean-Hugues Anglade, Christophe Lambert), « Léon », avec Jean Reno, la jeune révélation Nathalie Portman, et le comédien Gary Oldman. A chaque fois, Serra compose des musiques qui collent à l’identité des films, avec un talent évident et une « patte » sonore très reconnaissable.
Plus tard, le réalisateur nous offrira un « Cinquième élément » futuriste, aux allures de bd sur grand écran. La musique de Serra là encore est de toute beauté. Par la suite « Nikita », avec dans le rôle-titre Anne Parillaud, ou le superbe et épique « Jeanne D’Arc » avec Mila Jovovic, seront des films là aussi totalement opposés d’un point de vue du style, et le travail musical d’Éric Serra une bénédiction.
Le duo Besson-Serra travaille en parfaite symbiose. Cela se voit à l’écran.
Chaque nouveau film est un pari pour les deux compères. Qu’il s’agisse du milieu aquatique, de nettoyeur, de polar dans le métro, de film futuriste, de fresque historique, Besson et Serra s’entendent si bien que le premier fait une confiance aveugle au second pour écrire la musique.
Depuis plus d 35 ans après leur première collaboration artistique, ce binôme fonctionne encore, la dernière preuve en est « Anna » sorti cette année. Cette longévité est extrêmement rare dans le milieu du cinéma. A l’étranger, seul le « couple » hollywoodien Spielberg-Williams les devance;avec un travail commun entamé en 1975, sur le film « Duel », et qui se poursuit encore aujourd’hui. Sans oublier évidemment les deux duos mythiques du cinéma italien, Rota-Fellini (que j’évoquerai prochainement ) et Morricone-Leone (précédemment évoqué sur ce blog) les devance.
Je vous laisse (re)découvrir les musiques de film composées par Éric Serra. Cela vous rappellera sans doute des souvenirs.
Guillaume.
Spielberg-Williams, une complicité en cinémascope.

Deuxième volet de notre nouvelle rubrique, qui met en lumière le couple « realisateur-compositeur de musiques de films ».
L’une des plus célèbres est celle reliant Steven Spielberg à John Williams. D’autres seront évoquées dans les semaines qui viennent.
Après avoir réalisé « Duel » en 1971, chef d’oeuvre de suspens entre une voiture conduite par un cadre qui rentre du boulot et un camion, dont on ne voit jamais le visage du conducteur, le jeune Spielberg se fera connaitre au monde le film d’épouvante « La Chose » en 1972, puis « Sugarland Express » (première collaboration entre les deux hommes) en 1974. L’année suivante, il réalise le fameux « Jaws » (« Les dents de la mer »). Ce film qui met en scène un grand requin blanc mangeur d’hommes (ce qui dans la réalité n’est pas la autant la vérité, fort heureusement, que celle montrée dans le film), fera un carton mondial.
Je me souviens avoir vu « Duel »( avec Dennis Weaver) avec mon père, puis « Jaws » (avec Roy Scheider, Lorraine Gary, Richard Dreyfuss et Robert Shaw) dans un cinéma du quartier Latin. Les deux fois, j’en étais sorti remué.
Les deux histoires, très différentes évidemment, formidablement mises en scène, étaient portés par des musiques très identifiables, fortes. Si celle de « Duel » est l’oeuvre de Bill Goldenberg, celle de « Jaws » est donc signée de Williams.
John Williams, pianiste mais également compositeur de musique, va se faire connaître du grand public, après « Jaws », en signant la musique (certes fortement inspirée de Gustav Holst et de son « Lost Planet ») de la première trilogie intergalactique sortie de l’esprit de Georges Lucas, à savoir « Star Wars ».
Cette saga, débutée en 1977, avec le fameux épisodes IV « la guerre des étoiles : un nouvel espoir », puis V « l’Empire contre-attaque », enfin le VI « le retour du Jedi », fera de lui une véritable référence en la matière.
La trilogie fera une pause jusqu’en 1999, année où sortira l’épisode 1″la menace fantôme », bientôt suivi des épisodes 2 « l’attaque des clônes »(2002) et 3 « La revanche des Sith » (2005).
Partagé désormais entre ces deux monstres du cinéma, il composera aussi les musiques de la saga « Aventuriers de l’arche perdue », avec Harrison Ford dans le rôle titre. 2 autres films seront tournés, ‘Indiana Jones et le temple maudit », « Indiana Jones et La dernière croisade » (avec Sean Connery).
Il signera aussi les formidables musiques de « E.T », »La liste de Schindler », « il faut sauver le soldat Ryan », « Rencontres du Troisième type », le drôle « Arrête-moi si tu peux « , la fresque historique « Lincoln », sans oublier « Amistad », fresque sur la période esclavagiste aux États-Unis, « A.I intelligence », sur l’intelligence artificielle, « 1941 », sur l’attaque de Pearl Harbour par le Japon, qui fera entrer les États-Unis dans la seconde guerre mondiale, et le superbe « Tintin ».
Il a également composé la musique de « Harry Potter », d’abord « l’école des sorciers » (2001), puis les deux suivants, avant de passer le relais à d’autres musiciens.
Bref, vous le voyez, les deux hommes ont travaillé ensemble sur de très nombreux films, qui pour la plupart sont devenus des classiques du cinéma.
Revoir ces films de Spielberg, c’est aussi pouvoir réécouter la musique de John Williams. Ecouter John Williams nous replonge dans les films de Spielberg.
Pourquoi se priver de ce double plaisir ?
Je vous laisse donc ici en compagnie de John Williams.
Guillaume.
Miles… (still) ahead… !
Depuis des années, un film sur le trompettiste Miles Davis (1926-1991) était en gestation, mais encore fallait-il trouver un studio qui accepte de financer le projet mené par le comédien-réalisateur Don Cheadle. Une fois que ce fut fait, restait à trouver LA personne qui allait s’occuper de la musique de Miles Davis, pour le film. Un nom s’imposa très vite à Don Cheadle : Herbie Hancock. Le pianiste, qui fut un compagnon de route pendant de longues années de Miles Davis, s’occupa donc de la bande-son du film. Le film s’appellera « Miles Ahead« .. oui Miles Davis sera toujours devant.. les autres ! Un génie irremplaçable, un musicien hors norme, un révélateur de talents (Jaco Pastorius, John Scofield, Marcus Miller, Mike Stern, Bill Evans (le saxophoniste) et j’en oublie… Mais aussi une personnalité aussi mystérieuse qu’imprévisible et incontournable pour ce qui est du jazz des 60 dernières années !! La période choisie par Don Cheadle (réalisateur du film et rôle-titre) est celle de 1975 à 1981 qui précède le grand retour musical de Miles Davis sur scène et auprès du public.
Dès l’ouverture de cet album hommage, l’auditeur entend la voix du maître trompettiste. S’en suit une revue des périodes musicales traversées ou innovées par Miles Davis, dans de très belles versions. « Miles Ahead » bien sûr, qui ouvre l’album, puis le subtil « So What », période bebop. Par la suite, sous la direction de Gil Evans, une pièce de de jazz expérimental, « Solea ». « Néfertiti », écrit par Wayne Shorter, fait la part belle à la trompette. Des compositions signées Miles Davis figurent bien entendu au menu musical de cet opus : outre le « So what » déjà évoqué, on trouve « Seven Steps to Heaven », « Frelon burn », « Duran », »Go ahead John, part 2″, « Black Satin », « Prelude » et « Back seat Betty ». Le pianiste Robert Glasper, grandi au son de Miles Davis y pose aussi sa patte musicale, sur « Junior’s Jam », « Franceessence », « What’s wrong with that », « Gone ».
Cette bande-son, à l’image du film, est une vraie réussite !
Bien sûr les connaisseurs éclairés du trompettiste ne découvriront sans doute pas grand-chose de nouveau, mais c’est une belle introduction au génial musicien, pour celles et ceux qui le découvriraient aujourd’hui.
Guillaume.
Ennio Morricone, chef d’œuvres musicales sur grand écran
Tout récemment et enfin oscarisé (à sa 6ème nomination !!… Il était temps !!! ) pour sa musique du film « Les 8 salopards » de Quentin Tarantino, Ennio Morricone, 87 ans, est un immense compositeur de musiques de films, l’un des derniers géants du genre, avec John Williams, ou comme le fut Maurice Jarre. Il avait déjà reçu, à titre honorifique, un oscar pour l’ensemble de sa carrière, en 2007!
Personnellement, je l’ai découvert lorsque j’ai vu pour la première fois le film de Sergio Leone « Il était une fois dans l’Ouest« . Véritable fresque (certaines images sont comparables à des tableaux), western grand spectacle, décors naturels, personnages souvent filmés en gros plans… La musique orchestrale se veut lyrique, mélodieuse, qui décrit aussi bien les personnages que les situations filmées. Sa patte musicale, son style lyrique et innovant (il intègre des chœurs, de l’harmonica, des guitares électriques… ) va marquer, influencer très durablement le cinéma et les nouvelles générations de compositeurs de musiques de films.
« Le bon, la brute et le truand » (avec Clint Eastwood, Lee Van Cleef, Eli Wallach), « Pour une poignée de dollars« (avec Clint Eastwood), « Les Incorruptibles » (avec Sean Connery, Robert de Niro, Kevin Costner), « Le Professionnel« (avec Jean-Paul Belmondo), « I comme Icare » (avec Yves Montand), « Wolf » (avec Jack Nicholson), « Bugsy » (avec Warren Beatty, Harvey Keitel), « Sacco et Vanzetti« , et j’en passe forcément, sont des films qui portent la patte musicale de ce génie de la musique de films. Il n’est qu’à écouter les musiques réalisées pour le film « Mission » (Robert De Niro-Jeremy Irons) de Roland Joffé ou « Cinema Paradiso » (avec Philippe Noiret) de Giuseppe Tornatore, ou « Vattel » (avec Gérard Depardieu) pour se rendre compte du talent, de la palette, du style Morricone. Sergio Leone, Brian de Palma, Barry Levinson, Georges Lautner, Henri Verneuil, Jean-Jacques Annaud, Wolfgang Petersen comptent parmi les grands réalisateurs avec qui Ennio Morricone a travaillé! Sacré générique!
Compositeur au talent unanimement reconnu par le public, Ennio Morricone est un géant de la musique, dont les mélodies et compositions auront marqué de son empreinte le cinéma du 20ème siècle, traversant plusieurs générations.
Guillaume.
Musiques Césarisées….
Les Césars 2016 viennent d’être attribués. L’occasion est donc belle de revenir sur les musiques de films qui ont marqué l’histoire du cinéma français depuis 1976, année de la première cérémonie des Césars, créée par l’Académie des Arts et Spectacles et du Cinéma.
De la musique de « Le Vieux Fusil« , composée par François de Roubaix à celle de « Mustang » écrite par Vincent Ellis, récompensée en 2016, 39 autres ont été composées par des musiciens venus d’horizons très divers (Italie, Pologne, Hongrie, France, Argentine, Espagne, Etats-Unis, etc…), de différents courants musicaux (Jazz, World Music, Rock, Musique classique entre autres). Au cours de ces 41 dernières années, de grands noms ont été récompensés, certains plusieurs fois : George Delerue (3 Césars consécutifs, pour « Préparez vos mouchoirs », 1979 ; « L’amour en fuite », 1980 ; « Le dernier métro », 1981 ), Vladimir Cosma (2 césars pour « Diva », 1982 ; « Le Bal », 1984), Tony Gatlif (2 fois, pour « Gadjo di Lo », 1999 ; »Vengo », 2001), Michel Portal, 3 fois (« Le retour de Martin Guerre »,1983 ; « Les Cavaliers de l’Orage », 1985 ; « Champ d’honneur », 1988), Bruno Coulais (3 Césars pour « Microcosmos », 1997 ; « Himalaya, l’enfance d’un chef », 2000 ; « Les Choristes », 2005), Alexandre Desplat 3 fois couronné pour « De battre moncoeur s’est arrêté, 2006 ; « Ghost Writer », 2011 ; « De rouille et d’Os », 2013. A côté de ces multi-primés, on trouve Eric Serra (Le Grand Bleu) ; Astor Piazzola (Tango, l’exil de Gardel, 1986) ; Jordi Savall (Tous les matins du Monde, 1992), Gabriel Yared (L’Amant, 1993), Mathieu Chédid (Ne le dis à Personne, 2007) et plus près de nous, Ludovic Bource (« The Artist », 2012), Amine Bouhafa (« Timbuktu », 2015).
La musique, qui dans certains cas, est un véritable « personnage » d’un film, est un élément fort d’identification, autant voir davantage que l’histoire elle-même.
Vive le Cinéma, Vive la Musique de Film !
Guillaume.
Le chagrin des oiseaux
Rarement une musique de film m’a autant émue (depuis la Liste de Schindler). Quand vous regardez le film Timbuktu du réalisateur mauritanien Abderrahmane Sissako, vous découvrez deux oeuvres sublimes : la musique et le film, et celles-ci s’entremêlent, dialoguent, se complètent. Là où il n’y a plus de mot face à la cruauté, la musique, que certains veulent interdir, reprend sa place et sa force de résistance et de liberté.
« Timbuktu est un film qui revêt un message universel. Ce qui s’est passé à Timbuktu aurait pu se passer n’importe où dans le monde. Et donc, la musique accompagne ce message universel ; elle part de couleurs, d’instruments locaux, d’un langage, d’une identité locale et transporte ce langage avec une musique plus ample, plus lyrique pour relayer ce message de tolérance, ce message de paix. » présente Amine Bouhafa le compositeur.
Effectivement dans le choix d’instruments solistes africains et de l’Orchestre de la ville de Prague, avec Richard Hein comme dirigeant, Amine Bouhafa a choisi une musique cosmopolite, universelle. La musique africaine et occidentale dialoguent entre elles, elles renforcent donc le message de la tolérance, de la paix et de l’intelligence.
A retenir la magnifique chanson Timbuktu Fasso, écrite et chantée par Fatoumata Diawara (et oui encore elle et je ne m’en lasse pas), qui ajoute à ce superbe bijou, une perle fragile et brute à la fois, une interprétation qui vous donne envie de croire encore au pouvoir de la beauté, de l’art et de l’espérance.
Michèle