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Pour Naissam Jalal, un autre monde est là, Demain.



« Un Autre Monde« , dernier album (même un double pour l’occasion, avec une partie studio, une autre live, avec l’Orchestre National de Bretagne, conduit par Zahia Ziouani) publié par Naissam Jalal, flûtiste traversière mais aussi chanteuse franco-syrienne, puisque née à Paris de parents syriens, toujours accompagnée de son fidèle groupe « Rhythms of Resistance », est une ode à la liberté, à la communication entre les hommes et les femmes de tous les continents, de toutes les cultures, religions. Cette jeune artiste, que j’ai déjà eu l’occasion de voir jouer à Fontenay-sous-Bois, à Musiques au Comptoir, à la Halle Roublot, à plusieurs reprises, aux côtés de Hubert Dupont dans le cadre de ses projets musicaux « Al-Joulan » auxquels elle a collaboré, est vraiment très intéressante tant sa démarche musicale est empreinte de générosité, d’humanisme, d’ouverture au Monde, tout en gardant un oeil lucide sur l’état de celui-ci, qui n’est pas toujours reluisant.

Car Naissam Jalal se refuse d’être seulement et uniquement une musicienne, une artiste qui traverse les frontières, rencontre le monde. Non elle est avant tout une citoyenne, bénéficiant qui plus est de la double culture franco-syrienne, car née à Paris en 1984 de parents syriens, bien consciente des enjeux qui pèsent aujourd’hui, comme le changement climatique, l’écologie, la natalité dans certains pays, mais aussi les droits de l’Homme non respectés loin s’en faut dans d’autres… bref elle a une acuité forte sur ce qui se passe autour d’elle.

Après avoir exploré un répertoire très intime, personnel, dans les deux disques précédents, cette fois-ci donc Naissam Jalal voulait se diriger vers quelque chose de plus ouvert, de très différent. Elle a comme beaucoup, l’impression que cette période que nous avons traversé, marque une fin de cycle sur des aspects économiques, sociaux, sociétaux même. Elle veut imaginer un monde meilleur, différent, autre, pour les générations à venir, avec un rapport au vivant, à autrui, empreint de lumière. Vous me direz, et la musique dans tout ça? J’y viens. Car chez elle, tout est intimement lié. sa façon de jouer, d’être sur scène, de se donner au public, d’offrir sa voix comme un instrument qu’elle maîtrise superbement.

A l’instar des jazzmen, Naissam Jalal compose des morceaux longs, ce qui permet aux auditeurs-auditrices de s’installer dedans, de profiter, savourer, de partir en voyage dans le sillage de la flûtiste et de ses compères. Ecoutez donc les très beaux « Buleria Sarkhat Al Ard », Un sourire au coeur », « Samaaï al Andalus », ou la jolie « promenade au bord du rêve » . Dans chacun de ces titres, la flûte traversière de Naissam Jalal nous emmène, se fait tantôt frivole, tantôt triste, le tout sur fond de percussions et de saxophones. La musique est très riche, chatoyante, nous envoie directement soit dans les contrées d’Afrique du Nord ou évidemment au Moyen-Orient. Pour couronner ce disque, elle nous donne à écouter « D’ailleurs nous sommes ici », véritable manifeste contre la différence, contre l’intolérance, le racisme, la violence qui peut découler de ces états de faits.

Le deuxième disque, enregistré avec l’Orchestre National de Bretagne, dirigé par Zahia Ziouani, nous permet de prendre conscience de l’ampleur de la musique de Naissam Jalal. Cela commence avec le très lyrique et envoutant « Paysages de notre destin », au sein duquel on entend violons, guitare électrique, batterie, qui viennent gonfler les orchestrations soyeuses de Naissam Jalal. Sa voix limpide fait des apparitions remarquées. Ensuite vient « Un sourire au coeur », qui figure déjà sur la face « studio » du disque. Là, c’est la voix, superbe, claire, expressive, qui domine le morceau, en une forme d’imploration. Le tout sur fond de violons et percussions. Superbe. Arrive « Un monde neuf ». Incontestablement, la présence de violons renforce l’aspect nostalgique du titre, le tout nous emmenant dans son sillage, tellement la musicalité est poussée à sa plus belle expression.

Puis c’est « Samaaï al Andalus ». Etonnamment, ici nous sommes face à une structure qui opte pour le free, entre jazz pur avec soli de saxophone et l’orchestre de Bretagne derrière. Parfois déroutant, cela reste une belle pièce musicale. Pour terminer ce mini album live, « Almot Wala Almazala », s’apparente à une pièce quasi symphonique, avec des passages pour instrument solo. Ce n’est pas le plus emballant des morceaux du disque, mais il revêt un caractère presque pictural, tout en nuances et rebondissements là où on ne les attend pas nécessairement. Elle, qui, à 17 ans seulement, fit partie de la fanfare funk Tarace Boulba, en a gardé visiblement des traces dans sa manière de composer certains titres.

La musique de Naissam Jalal est remplie de plusieurs sources, moyennes-orientales, arabes, mais aussi française (écouter « D’Ailleurs nous sommes ici »), mélange savamment les rythmes, bien soutenue en cela par son groupe. C’est un vrai plaisir que d’écouter cette artiste.

Alors, faites comme moi, n’hésitez pas, plongez-vous dans ce bouillonnant bain musical et culturel proposé par Naissam Jalal.

Guillaume.

Hubert Dupont, Al Joulan, second volet… et plaisir intact!


En août 2016, dans le cadre de chroniques concernant des musiciens fontenaysiens, je vous faisait découvrir le contrebassiste Hubert Dupont, à l’occasion de la parution de l’album « Al Joulan, vol.1 ».

Ce premier volet annonçait forcément… une suite! quelques mois plus tard (l’album sort officiellement le 9 mai), c’est donc chose faite, avec « Al Joulan, vol.2« ! Entouré de la même équipe de musiciens talentueux (Youssef Hbeisch, Naissam Jalal, Ahmad Al Khatib, Zied Zouari, Matthieu Donarier), au sein du Golan Project (en hommage au plateau du Golan= Al Joulan, qui surplombe la Syrie, administré par Israël depuis 1967, et revendiqué par le Liban), Hubert Dupont nous offre une séance musicale qui se veut un pont entre les cultures, les traditions, les sons, entre jazz contemporain et musiques traditionnelles.

Comme le précédent volet, celui-ci a été enregistré en live, dans le cadre accueillant et chaleureux de Musiques au Comptoir, scène musicale bien connue depuis près de 15 ans, par les amateurs de musiques. Bien que l’album ici proposé ne comporte que seulement 4 morceaux, ce qui à titre personnel me frustre un peu, la durée des compositions rattrape cela (de 8 à 12 minutes!), laissant la place aux musiciens pour s’exprimer, développer un univers sonore et nous embarquer dans leur voyage musical dans les contrées du Moyen-Orient, du Liban, de cette culture arabe, de cet héritage qui a encore tant à nous enseigner. La complémentarité des musiciens ici réunis autour de Hubert Dupont est évidente et s’entend dès les premières notes. Un régal !

L’ambiance générale de ce second volet résonne comme une longue plainte pleine d’espoir pour un monde meilleur demain, mais fait également appel à la nostalgie, à la notion de mémoire, de partage, entre les cultures et les hommes, éléments qui sont centre de la démarche artistique de Hubert Dupont à travers tous ses différents groupes (voir son site : http://www.ultrabolic.com/)

Au final, un album superbe, subtil, qui fait du bien à l’âme… Que demander de plus?

A découvrir donc sans hésiter.

Guillaume.

Naissam Jalal, musicienne en résistance…


almotwalaalmazala… contre l’obscurantisme religieux, la violence faite aux peuples, à son peuple, aux femmes, aux enfants! Celles et ceux qui fréquentent régulièrement le Comptoir ont pu découvrir et aprécier cette musicienne de talent, aux côtés du contrebassiste Hubert Dupont. Née en France il y a 32 ans, de parents syriens, Naissam Jalal est évidemment touchée par la situation dans le pays de ses ancêtres. Mais loin  des discours qui débouchent sur rien, elle utilise la musique et son instrument (flûte traversière) pour dénoncer et combattre les maux, la barbarie qui règnent dans son pays. L’album « Almot Wala Almazala » (La Mort plutôt que l’Humiliation), qu’elle a composé entièrement et enregistré en 2011, entourée du quintet bien-nommé « Rhythms of Resistance », est pour elle comme un hommage à son peuple massacré et à celles et ceux qui n’avaient plus qu’une solution, la fuite pour échapper à la mort.

Tout au long des 45 minutes de musique qu’elle nous offre, Naissam Jalal propose des mélopées et des mélodies très élaborées, une ballade entre souffrance et espoir, entre colère et tristesse, épaulée par un quintet de très haute qualité musicale. Le mélange subtil entre la culture moyen-orientale et le jazz est un vrai régal!

Parfois la flûte de Naissam Jalal se fait plus plaintive, plus stridente, lançant comme un appel à l’aide, notamment sur le morceau « Alep », lieu martyr symbole de la guerre en Syrie. 2’38 très d’une ambiance très prenante, que je place au même niveau que le morceau « Beirut » composé voilà quelques années, suite à un voyage au Liban et précisément à Beyrouth, par le trompettiste Ibrahim Maalouf.

Sans jamais tomber dans la cascade de notes, laissant quand il est nécessaire le silence s’immiscer dans les morceaux, s’installer, Naissam Jalal nous offre ici un joli carnet de voyage en musique, comme pour nous dire : « Voyez, au delà du peuple qu’on assassine, la Culture, l’Histoire, la Mémoire, que l’on souhaite réduire au silence ».

Ne passez pas à côté de ce cri de l’intérieur, de cet ode à la Liberté, de cet hymne à la Paix, à la Vie!

Guillaume.

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