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Lucia D, musicienne de Fontenay.

Certains jours, la vie réserve des surprises. Venue nous déposer elle-même son premier album, Lucia Dorlet alias Lucia D est une musicienne fontenaysienne, guitariste-chanteuse en l’occurence. « Amiam« , titre de son premier opus musical, est enregistré en formation restreinte, puisque ne dépassant pas trois musiciens maximum. Elle y est en effet accompagnée de Léonce Langlois Favier au piano, et Julien Guerouet aux choeurs.

« Amiam » est donc composé de 7 titres, le premier étant « mes poèmes », le dernier « Sous mille feux ». Ce qui frappe d’entrée, outre la voix douce et légère de Lucia (photo ci-dessus), parfois même haut perchée, c’est la qualité d’écriture des textes pour décrire un ressenti, un amour perdu (« Amiam »). Dans « Fontenay-sous-Bois », elle évoque avec nostalgie ces souvenirs d’un temps passé dans notre ville, sur fond de piano. « Better days », seul titre chanté en anglais de l’album, soutenu de sa seule guitare acoustique, démarre doucement puis s’emballe un peu avec l’arrivée du piano et des choeurs. De quoi donner un peu d’épaisseur au morceau. « Ibrahim », raconte encore un amour, mais pour le cas, en plusieurs langues, français, espagnol, arabe, et avec un piano certes présent mais sans en faire trop. « Claire », une belle ode à sa soeur. Là encore l’écriture est très soignée, précise, presque littéraire. Pour finir ce premier mini album de 7 titres, Lucia D nous offre « Sous mille feux ». Une chanson sur un amour renaissant de ses cendres. Le piano se fait lyrique, superbe. L’ensemble de « Amiam » est agréable à l’écoute mais je ne peux m’empêcher de penser que la présence d’une basse ou contrebasse, voire parfois d’une guitare électrique, pourraient donner plus de densité à ce répertoire tout en gardant son aspect intimiste. Si cette jeune artiste se produit non loin de chez vous, poussez la curiosité, n’hésitez pas à la découvrir sur scène. Nul doute que vous passerez un joli moment.
Guillaume.
Monty Alexander, génie du clavier.

Monty Alexander, pianiste jamaïquain à la déjà longue carrière, que j’ai eu le bonheur d’admirer en concert à la Nouvelle Philharmonie à La Villette, il y a de cela 3 ans, est un musicien qui possède son instrument comme peu de ses confrères jazzmen contemporains. Pour moi il est du niveau d’un Chick Corea, d’un Keith Jarrett, tant son jeu est expressif, coloré, maîtrisé, fluide. Il a expérimenté beaucoup de formules au cours de sa carrière. Dans le double disque qui nous intéresse ici, intitulé « Love you Madly : Live at Bubba’s », enregistré comme son nom l’indique au Bubba’s, restaurant-club de jazz de Fort Lauderdale en Floride, dans lequel s’est aussi produit le génial Ahmad Jamal, il est entouré d’un trio composé de Paul Berner à la basse, Duffy Jackson aux baguettes et Robert Thomas Jr. aux percussions. (lire les mini entretiens très intéressants donnés par ceux-ci sur leur expérience de travail aux côtés de Monty Alexander, dans le livret qui accompagne le doublé cd).
Le premier des 2 cd s’ouvre sur « Arthur’s theme », un joli morceau tout en souplesse avec les percussions de Robert Thomas Jr. Alexander nous régale de son style, mélange d’académisme occidental et d’école latino-jamaïquaine. Après cette introduction, on tombe sur le morceau qui donne son nom à l’album, « Love you madly », écrit par le grand Duke Ellington. Sur fond de batterie aux balais, ça swingue et Alexander promène ses mains virtuoses sur le clavier avec délectation. Puis arrive la « Samba de Orfeu », composée par le musicien brésilien Luis Bonfa, qui donne furieusement envie de danser. Les 3 derniers morceaux du disque sont l’oeuvre de Monty Alexander. « Sweet Lady », qui prend la suite, démarre de façon minimale, comme si Alexander voulait peindre un tableau, puis tour s’accélère doucement. Alexander montre toute sa palette, comme un peintre. Le swing est toujours là, omniprésent, central. On le retrouve sur « Eleuthra », sur lequel il mélange allègrement ses origines jamaïquaines et les sonorités cubaines. Un régal. Pour terminer ce premier disque il nous gratifie de « Reggae later ». Un morceau superbe, rempli de breaks au piano, de virtuosité sans jamais être excessif, pas le genre du bonhomme. Bref c’est un bonheur d’écouter ce musicien. Je ne me lasse pas.
Passons au second cd. Il démarre par « Blues for Edith », est un morceau composé en hommage à Edith Piaf par le musicien Milt Jackson. Vient ensuite ‘Fungii Mama », dû à Blue Mitchell. Un morceau qui mélange swing, bebop et moments plus free, mais là encore le maestro se et nous régale. Solo de piano, de contrebasse (Paul Berner). Superbe. Ensuite c’est un « Consider » écrit de sa main que nous joue Alexander. Tout en douceur. Volupté. Derrière, le furieux et chaotique « Montevideo », qui cavale…nous entraîne dans son tourbillon. On en vient alors à écouter sa version très personnelle de « Body and Soul », co-écrite en 1930 par Johnny Green, Edward Heyman, Robert Sour et Franck Eyton. Classique du répertoire jazz, de nombreuses fois repris depuis sa création, Alexander y apporte ici sa touche de créativité, son touché de piano exceptionnel, sa technique unique. Le tout donne un joli morceau. Ses trois compères de jeu ne sont pas en reste, ils assurent tout au long des morceaux évoqués jusqu’ici. L’avant-dernier morceau c’est un cavalant « Swamp fire ». Ça va à toute vitesse, on craint le déraillement, mais non, jamais cela ne se produit. Duffy Jackson aux baguettes assure un tempo de feu, avec de rares moments de calme. Magistral. Enfin pour terminer ce disque et du coup ce coffret « Live at Bubba’s », un morceau écrit par Milt Jackson, « SKJ ». Ça balance, swingue, c’est frais, on en redemande. Merci Monsieur Alexander. Je conseille ce disque à celles et ceux qui ont envie de découvrir ce génial pianiste-compositeur-interprète. Cette chronique est la dernière de l’année avant un repos bien mérité. Nous vous retrouverons avec plaisir à la rentrée. Bon été à vous toutes et tous, où que vous soyez, en France, à l’étranger. A bientôt.
Guillaume.
https://www.youtube.com/watch?v=U8gdVIXaFVg
Quand le Jazz se chante et joue au féminin.

On le sait, vous le savez sans doute depuis longtemps, le label français Frémeaux & Associés, basé à Vincennes en région parisienne, n’a de cesse de rendre hommage au patrimoine du jazz, a mettre en exergue son histoire, ses héros ou héroïnes oublié.e.s en ressortant des pépites, toujours avec des enregistrements de qualité, et des livrets qui ne le sont pas moins. C’est encore le cas cette fois-ci avec le coffret intitulé « Jazz Ladies : The singing pianists (1926-1961) ». Dans ce nouveau superbe coffret qui contient 3 disques s’étalant chacun sur une période (CD1 : 1926-1961; CD2 : 1930-1961 ; CD3 : 1944-1961), uniquement dédié aux femmes chanteuses et pianistes de jazz, il est possible de retrouver des noms connus tels que Nina Simone, Shirley Horn, Blossom Dearie, Aretha Franklin, et d’autres qui ont disparu des radars comme Cleo Brown, Lil Armstrong, Una Mae Carlisle, Camille Howard, ou encore Rose Murphy. Ce n’est que justice de rendre hommage à celles qui ont également écrit parmi les plus belles pages de l’histoire du Jazz. Dans un précédent coffret, Frémeaux avait rendu hommage aux femmes instrumentistes dans le jazz tout en évoquant les nombreux obstacles auxquels elles se trouvaient confrontées. Il y était notamment indiqué que si, historiquement, dès la fin du XIXème siècle, lorsque le piano, ou plutôt de petits orgues, ont fait leur apparition dans certaines familles d’anciens esclaves, les chanteuses étaient admises du fait de leur présence dans les chorales de gospel, les rares chanteuses solo acceptées dans le monde du jazz étant les pianistes. Pour les autres instrumentistes, la tâche s’avérera plus ardue. Mais revenons à notre coffret du jour.
Dans le premier cd, qui couvre les années 1926 à 1961, il est donné à re- découvrir des artistes telles que Cleo Brown, virtuose du piano, qui propose un jazz swinguant, comme sur « The stuff is here and it’s mellow » ou sur « When Hollywood goes black and tan », qui évoque un Hollywood fréquenté par beaucoup d’artistes noirs, comme Louis Armstrong. Avec LR Armstrong, on arrive sur un jazz plus enlevé, avec des cuivres bien présents. Prémices d’un futur bebop. Écoutez donc « Harlem on saturday night ». Puis vient la voix plaintive de Una Mae Carlisle, sur « Love walked in ». On peut remarquer son phrasé précis, son timbre de voix équilibré, le tout sur des orchestrations qui là encore swinguent. Julia Lee est une pianiste davantage portée sur le boogie-blues. Écoutez « Dream Lucky blues » et son jeu précis, moderne. Cela se précise avec « Comme watcha you got », qui pourrait presque être un rock. Enfin elle est l’auteur d’une belle version de « Nobody knows when you’re down and out ». Paula Watson, elle, assume un style blues évident (« Pretty papa blues »). Plus loin sur le disque, on trouve aussi Ira Mae Littlejohn, qui veux voir Jésus en mode blues, Clara Ward qui pousse la voix comme à l’église le dimanche pour chanter le gospel, enfin Aretha Franklin, qui nous indique que le sang devient chaud dans les veines (« While the blood runs warm », et qu’elle résiste à la tentation (« Yeld not to temptation »). Ce premier chapitre ouvre des horizons intéressants, Aussi le second cd, qui va de 1930 à 1961, s’annonce bien.
Ca démarre avec Martha Davis, voix douce, suave, qui enchaîne « The be bop bounce », « I’m fer it » et « Cincinatti » avec un égal bonheur. Puis vient son « Kitchen blues », lent à souhait. Nellie Lutcher nous offre « Do you or don’t you love me? », sur un tempo très rapide, tenu aux balais à la batterie. Style enjoué, un brin clownesque, elle tient la rampe. J’arrive à Rose Murphy qui nous chante « I can’t give you anything but love » de sa voix fluette, quasi minaudante. Elle se risque également sur « Honeysuckle Rose » et « I wanna be loved by you » (reprise notamment par Marilyn Monroe). La voix gorgée de blues de Frantic Fay Thomas nous susurre « I lost my sign in Salt Lake City ». La Vergne Smith chante « un blues dans la nuit », avec une ton quasi descriptif, comme sur « One of the road ». « Double trouble blues », interprété par Kansas City Kitty est un blues piano-voix efficace, entraînant. Pour clore le disque, c’est la voix de Victoria Spivey qui surgit et nous chante « That man ». Un blues au piano.
Maintenant, voyons le dernier chapitre, période 1944-1961. Tout commence avec Blossom Dearie, dont le phrasé rappelle celui de Diana Krall, la voix en moins grave, qui après un « Thou swell » attrayant, nous gratifie d’une jolie version de « plus je t’embrasse », en français dans le texte, au ton très enjoleur. Elle joue tout en douceur, et sur ce rythme là, entonne « Someone to watch over me ». Vient derrière « Let’s fall in love » (repris par Diana Krall) qui nous est donné par Jeri Southern. Un swing au balais très agréable à écouter. Audrey Morris, voix légèrement grave, s’aventure sur « Good morning heartache ». « Day in day out », signé de la très grande Shirley Horn, fleure bon le swing d’un bebop, est exécuté à mon goût de manière un peu désordonnée. Arrive le célèbre « Makin whoopee », qui me réconcilie avec cette immense pianiste et chanteuse. A la suite, c’est la talentueuse Nina Simone qui se joue du « classique » de jazz « Mood indigo »dans une très belle interprétation. Son jeu de piano autant que sa voix sont un régal à entendre. S’en viennent ensuite « Love me or leave me », puis le très beau « Black is the color of my true love’s hair », un manifeste pour l’homme qu’elle aime. On peut aussi l’écouter jouer un Boogie-woogie, intitulé « Boogie-woogie roots ». De Boogie-woogie il est encore question avec Christine Chatman (« Bootin’the boogie »), Lilette Thomas, qui joue « Boogie-woogie time down south « , Madonna Martin avec « Madonna’s boogie », enfin Kate Webster qui déroule un « Baby comme on » et « Kate Lee », que n’aurait pas renié Jerry Lee Lewis.
En résumé, ce coffret regorge de trésors à decouvrir, tant au niveau des morceaux que des artistes. Ne passez pas à côté.
Guillaume.
Chick Corea, légende du jazz, laisse son piano muet.

Lui qui pendant près de 60 ans se consacra au piano, au jazz, laisse une oeuvre immense, enregistrée entre 1968 et la sortie de « Tones for Joan’s Bones« , et « Trilogy 2 » sorti en 2019, soit plus de 90 albums, studios et live confondus, et des collaborations variées. Retour sur une carrière magistrale.
Son père trompettiste dans un orchestre dixieland, pendant les années 30 et 40, va mettre le petit Armand Anthony dit « Chick » au piano dès ses 4 ans révolus. Le gamin semble doué et apprécie ce que son père lui fait écouter découvrir : ke trompettiste Dizzy Gillespie (photo du dessous), les saxophonistes Charlie Parker (deuxième photo ci-dessous) et Lester Young, les pianistes Bud Powell et Horace Silver. Un socle de solides références pour appréhender la musique jazz, qui ça occuper toute sa vie. A 8 ans, il délaisse un temps le piano pour la batterie. Le temps d’en apprendre les rythmiques et l’aspect percussions, qui vont plus tard influencer sa manière de jouer du piano, instrument qu’il retrouve très vite pour ne plus le lâcher de toute sa carrière.


Avant la décade 70 qui s’annonce, il va en 1968, remplacer Hetbie Hancock au sein du groupe de Miles Davis (photo ci-dessous). Ainsi participera t-il aux enregistrements de « Files de Kilimandjaro », « In a silent way », « Bitches Brew » au cours desquels il expérimentera des pianos électriques, des sons nouveaux pour l’époque. Il restera avec Miles Davis jusqu’en 1970, y côtoiera Keith Jarrett, autre virtuose du piano.

S’il est un homme de groupe, Chick Corea ne se refuse pas à des projets solo et il existe plusieurs traces, à l’égal d’un Keith Jarrett, d’enregistrements solos du génie américain. Je citerai « piano impro »(1971), »piano impro 2″(1972), « Solo piano-Originals »(2000), « Solo piano-Standards » (2000), enfin « Solo piano-Portraits »(2014).
Chick Corea maîtrisait aussi pleinement l’art de l’improvisation. D’ailleurs il aimait à dire souvent que avant d’entrer sur scène, lors de concerts solo, il ne savait pas forcément ce qu’il allait jouer. Cela, j’ai eu la chance de l’observer un soir d’août 2014 au festival de jazz de Marciac. La soirée s’annonçait belle. Chapiteau rempli de 6000 spectateurs venu admirer quatre virtuoses du jazz. En deux duos, le premier composé de Chick Corea et de son complice Stanley Clarke, puis en deuxième partie, Hetbie Hancock et Wayne Shorter. Plateau exceptionnel !
Donc, en premier, celui qui nous interesse ici, le duo Corea-Clarke. Les deux hommes, 70 ans passés, affichent belle santé. Corea s’installe à son.piano, Clarke enlace sa contrebasse. Démarre alors un dialogue musical tout en improvisation et question-réponse de très haut niveau. Corea est dans un grand soir, ses mains virevoltent sur le clavier de son piano, il sourit, jette à peine un oeil à Clarke qui le suit , le précède ou le rattrape au gré des improvisations. Magistral! Bien sûr, les deux compères nous gratifieront de morceaux de l’époque Return To Forever, et Stanley Clarke jouera même une adaptation de « Waltz for Debbie » dédiée à sa femme. Un moment sublime de virtuosité, d’émotion, sous le regard admiratif autant qu’amical de Chick Corea.
Une heure quinze durant, les deux compères musiciens avaient régalé l’auditoire par leur talent, leur générosité, leur complicité musicale nourrie de tant d’années à jouer ensemble. Je me rappelle être sorti de cette soirée chamboulé par ce que j’avais vu, entendu. Un de mes grands souvenirs de concerts.
Tout au long de sa carrière, Chick Corea a multiplié les rencontres et les concerts avec de très grands musiciens de jazz. Hormis ceux déjà cités, on peut noter les guitaristes Pat Metheny, Paco de Lucia, John Mac Laughlin, Mike Stern, le batteur Steve Gadd, le percussionniste Vinnie Colaiuta, le saxophoniste Michael Brecker, le contrebassiste Avishai Cohen et j’en oublie…tellement la liste est longue. Il était curieux, voulait rencontrer, découvrir de nouveaux musiciens, explorer de nouvelles formes de composition musicale.
Si Chick Corea a consacré l’essentiel de sa vie et de sa carrière au jazz, à l’écriture, il a également, mais de manière moindre joué des morceaux du répertoire classique, sans jamais y consacrer de disque entier.
Chick Corea laisse un vide immense dans le monde du jazz, mais sa musique, son talent, sa maîtrise technique de l’instrument, resteront gravés sur tous les disques qu’il a enregistré entre 1968 et 2019. Une trace indélébile. Un témoignage sublime d’un talent hors norme d’un.musicien qui aura marqué la deuxième partie du vingtième siècle et le début du vingt-et-uniéme.
Merci pour tout Chick Corea.
Je vous laisse avec une sélection de morceaux enregistrés, joués par ce virtuose.
Par ailleurs, quelques-une de ses albums sont à retrouver à la médiathèque :
Innée Space ; The Musician ; Improvisations childrens ; Two ; The Enchantement ; Chinese butterfly ; Forever ; Children of Forever.
Guillaume.
https://www.youtube.com/playlist?list=PLwaqz1wV9_eWnkQtWjMHet9hHH-fsoNSS
Claude Bolling, un géant s’en va.

Décidément cette année 2020 se sera terminée de façon triste pour le monde de la culture, et je ne parle pas ici du problème plus qu’épineux de la fermeture de ses lieux culturels. Non je veux bien sûr évoquer, après les départs de Caroline Cellier le 15 décembre dernier (je lui consacrerai bientôt un article), de Claude Brasseur le 22, et du violoniste Ivry Gitlis le 24, le décès d’un très grand musicien de jazz et compositeur de musiques de films, Claude Bolling, parti le 30 décembre à 90 ans.
Claude Bolling, naît à Cannes en 1930, fera ses études musicales au Conservatoire de Nice. Enfant surdoué, il démarre à 14 ans seulement sa carrière professionnelle aux côtés du monstre sacré vibraphoniste Lionel Hampton. Puis il enchaîne en intégrant l’orchestre du Hot Club de France. Dès lors tout s’enchaîne. Au début des années 50 il joue avec les jazzmen américains Roy Eldridge et Kenny Clarke. En 1956, il décide de fonder le Claude Bolling Big Band.
Mais Claude Bolling au delà d’être un pianiste de jazz, est avant tout et surtout un musicien. Curieux de croiser les univers sonores, les modes de compositions. C’est ainsi qu’il entreprendra de composer pour des musiciens classiques tels que Jean-Pierre Rampal (suite pour flûte et jazz piano trio,1975), Alexandre Lagoya (concerto pour guitare et jazz piano trio, 1975), Maurice André (Toot suite, suite pour trompette et jazz piano trio,1981). Il jouera aussi bien dans des registres swing en avec son Big Band, mais s’aventurera dans le ragtime (cf la B.O.F de Borsalino), et fera des rencontres musicales et humaines avec des monstres sacrés comme Duke Ellington, Michel Legrand, Stéphane Grappelli.
Compositeur, Claude Bolling est également un créateur, puisqu’il est à la base de la naissance du groupe vocal féminin Les Parisiennes, dans les années 60. Il leur écrira paroles et musique, qui déboucheront sur des succès : « Il faut trop beau pour travailler « , « L’argent ne fait pas le bonheur », « Le 30 février », parmi d’autres.
Cette carrière de compositeur de musiques de films, il l’a entamé dans les années 50, avec notamment « Oh que Mambo » (1955), et « cette nuit-là »(1957). En 1963, il écrit la musique du film « Le jour et l’heure » de René Clément. Son talent de composition est maintenant reconnu dans le monde du cinéma et au cours de la décennie 70-80, il va enchaîner les gros films et certains gros succès : « Borsalino »(Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Nicole Calfan.. etc.. 1970), puis « Borsalino and Co » (1974), mais aussi « Le magnifique » (avec Jean-Paul Belmondo, Jacqueline Bisset, 1973), « Lucky Luke »(1971), « Flic Story » (avec Alain Delon, 1975), ou encore « L’année Sainte »(avec Jean Gabin et Jean-Claude Brialy,1976), « Un papillon sur l’épaule »(1978) ou « 3 hommes à abattre », (avec Alain Delon, Michel Auclair, Jean-Pierre Darras..etc,1981), « La Gitane »(avec Claude Brasseur et Valérie Kaprisky, 1986), puis dans les années 90, « Hasards ou coïncidences » (1998).
Il aura ainsi côtoyé les cinéastes français tels Alain Corneau, Jacques Deray, Philippe de Broca, Claude Lelouch, Claude Pinoteau, de même que des acteurs ou actrices tels que Alain Delon, Jean Gabin, Bernard Blier, Danielle Darrieux, Claude Brasseur, Valérie Kaprisky, Caroline Cellier, Jean-Paul Belmondo, et une ribambelle d’autres.
Un grand nom du jazz s’en va. Il laisse une oeuvre importante et riche, que jeunes et moins jeunes peuvent à l’envi (re) découvrir. Je vous laisse avec une floraison de morceaux composés par ce grand musicien.
Guillaume.
Little Richard, premier de cordée du rock’n’roll.
Souvenez-vous, le 13 mai dernier, nous apprenions le décès de Little Richard, pionner et légende du rock américain, à qui j’avais ici-même consacré un article à cette funeste occasion. Cette fois-ci, c’est autour de la ressorti de 4 premiers albums ressortis par le label Avid Entertainement. L’occasion pour l’auditeur que je suis, de replonger dans une période que je n’ai pas connu, étant né quelques années plus tard (1967). Quatre albums, enregistrés entre 1957, 1958 et 1959.

Le premier des quatre albums donnés à réentendre est « Here’s Little Richard », que l’on pourrait traduire par « Voici (qui est) Little Richard ». Il démarre par le tube qui a lancé la carrière de Little Richard, « Tutti Frutti« . Sur ce disque on retrouve aussi des titres qui ont fait la célébrité du musicien, à savoir « Slippin » and slidin’ « , « Long tall Sally« repris et adapté par de nombreux artistes du rock, sur le second les tubes « Good golly Miss Molly« , ou le célébrissime « Lucille« .
A cette période bénie, c’est à dire les 50’s et les 60’s, les artistes, outre atlantique comme en Angleterre ou en France, soutenus par les labels, les radios du coin et des producteurs-dénicheurs de talents passionnés, loin des comptables qui envahissent aujourd’hui les multinationales de la musique, pouvaient donc enregistrer des albums à la chaine, de manière très rapprochée, manière de garder intact l’attrait du public suscité lors de l’album précédent.
C’est ainsi que démarra la folle histoire de Little Richard, comme après lui celle d’Elvis Presley,(ce dernier vite surnommé le « King », cornaqué par un producteur, le célèbre « colonel » Parker, qui n’avait d’ailleurs de colonel que le nom, car aucune légitimité militaire à se faire nommer ainsi si ce n’est pour impressionner l’interlocuteur).
En Europe, les carrières des Beatles, des Rolling Stones, du British Blues Boom bénéficieront aussi de ce mode de promotion et de production. Ca parait si loin.
Mais revenons à Little Richard. Et à ces quatre albums. Comme je le disais plus haut, ils ont été enregistré entre 1957 et 1959. L’artiste se montre prolixe, inventif, écrivant donc des titres qui vont rentrer au panthéon du rock, mais ça bien sûr, il l’ignore à l’heure de les écrire. Même de les jouer en live. Le garçon est virevoltant, énergique, sur scène il ne tient pas en place…. et fait le show en mettant ses jambes sur le clavier, en jouant debout, en chantant fort de sa voix puissante. Sur ces 4 albums, pêle-mêle, on trouve donc des classiques mais aussi des ballades, des titres certes plaisants mais qui ne renversent pas la table. Pourtant tout cela ramène à l’époque où nos parents étaient pour la plupart adolescents boutonneux et commençant à nourrir un sentiment de révolte. Les jupes des filles se raccourcissaient, les garons sortaient à peine des tenues étriquées costumes-cravates pour petit à petit se lâcher vers le jean et le cuir qui sera l’emblème de la génération de 68.
Sur ces 4 disques, qui jalonnent donc son début de carrière américaine, c’est aussi un voyage dans l’univers de la soul, du gospel. Comme nombre des des congénères afro-américains il vient de là. C’est d’ailleurs vers les églises qu’il est retourné, une fois qu’il a vu sa popularité décliner. Redonner ce qu’il avait reçu, partagé sa passion de la musique, du chant.
Prince, seul face à lui-même.

C’est l’histoire d’une séance dont seul Prince Roger Nelson avait le secret. Une nuit de 1983, il s’enferme au Studio Kiowa Trail, et décide de s’installer seul à son piano. Au début du disque, on l’entend s’adresser à un ingénieur pour régler le son et mettre une ambiance lumineuse plutôt soft. Il se met ainsi dans un climat serein, tranquille. Et nous permet, en tant qu’auditeur, de nous sentir, très privilégiés, tout proche de lui, comme si nous étions tapis dans l’ombre du studio, écoutant le maître en pleine séance de travail intime.
Vient la magie. L’artiste se met à son piano, et commence par une petite improvisation, en guise d’échauffement, avant de se lancer dans l’interprétation de « 17 days ». Tout en finesse. Superbe. Il enchaîne alors avec une version toute en retenue, modulant sa voix à l’envie, sur son titre fétiche, « Purple rain ». Vient ensuite « Case of you », chanson composée par Joni Mitchell, dont il s’approprie très joliment l’univers musical. Ensuite, Prince nous offre une farandole de morceaux de sa composition, de « Strange relationship » au final « Why the butterflies », dont les versions piano-voix sont un vrai régal, car il transforme l’architecture originale des morceaux, en y intégrant parfois des digressions, et toujours avec une justesse, un sens du rythme incroyable, sans oublier bien entendu cette voix unique, ce timbre inimitable et reconnaissable qu’il modifie, travaille, teste, au fil des morceaux. Une introspection artistique, une séance de travail autant qu’un moment de plaisir pour ce génial musicien-compositeur.
Cette séance, longtemps restée dans les tiroirs de la Warner, dont il fut un temps co-président, est un petit bijou, qu’il faut écouter attentivement, et découvrir avec appétit toute la subtilité, les nuances que Prince amène à ses propres morceaux comme à la chanson de Joni Mitchell. Le tout est une enfilade savoureuse de morceaux sublimes concoctés par le génie de Minneapolis.
Prince, homme de scène, capable de performances scéniques incroyables tant par la qualité, que par la durée (celles et ceux qui le virent au New Morning il y a quelques années s’en souviennent encore.. il avait démarré à 22H pour terminer à 6H du matin!!!), nous montre ici toute l’intelligence de sa musique, de son immense talent. Un joyau à déguster sans aucune modération. Cet enregistrement sorti des tiroirs n’est sûrement pas le dernier que Warner nous proposera tant Prince passait son temps à composer, écrire, enregistrer dans son antre de Paisley Park. Du coup, il est facile d’envisager que d’autres joyaux, dormant dans les armoires des studios, ou de la compagnie Warner, ressortiront un jour ou l’autre. Pour notre plus grand bonheur. Prince manque clairement à la musique aujourd’hui. Qui sait ce qu’il aurait encore composé, imaginé.
Alors, que vous soyez fan de l’artiste ou que vous souhaitiez simplement le découvrir, ce disque est tout indiqué.
Guillaume.
Essai transformé pour Gaël Faye.
Comme il était attendu ce second opus de Gaël Faye… Après son premier “Pili pili sur un croissant au beurre” de haut niveau et surtout ses prix littéraire pour “Petit pays”, nombre de ses auditeurs étaient curieux de savoir ce qu’allait nous pondre le mc Franco-Burundais, moi le premier.
Ce n’est pas véritablement un album que nous propose Gaël, mais un EP, puisqu’il n’est composé que de cinq titres, encore plus risqué donc puisqu’avec si peu de morceaux proposés, le droit à l’erreur n’est pas permis et là encore, le pari est réussi, vous allez pouvoir écouter ce disque en boucle sans problème.
Drôle de titre que “Rythmes et botanique” me direz-vous, surtout pour un disque rap, mais l’artiste n’est pas coutumier de faire comme les autres alors pourquoi pas…C’est le mélange entre la MPC et le piano, les deux éléments sonores de l’album avec d’un côté DJ Blanka et Guillaume Poncelet pour le piano, mais selon Gaël Faye, l’idée du titre lui est véritablement venu au jardin botanique de Lisbonne, devant un ficus elastica, dont les racines lui firent penser aux câbles que l’on peut retrouver par terre sur une scène musicale et l’envie lui est venu d’envoyer un freestyle végétal, j’adore le concept!!!
Musicalement, c’est très léché et assez proche de l’univers de “Pili Pili” sans thème défini, l’artiste est parfois révolté, comme dans “Irruption” parfois pensif, comme avec Saul Williams (seul invité de l’album) sur “Solstice”, Gaël jongle d’un style à l’autre avec brio.
Pour conclure, je dirais que ce disque n’est, j’espère, qu’un prémice à un disque encore plus fourni, car je suis absolument conquis par Gaël Faye, un artiste aux multiples facettes.
Laurent
Avec « Border Lines », Stéphane Tsapis dépasse les frontières.
La vie est curieuse. Je me retrouve dans la position de vous parler du nouvel album de Stéphane Tsapis, membre de ma famille, que j’ai vu grandir pendant quelques années, avant de le perdre de vue, puis de le retrouver au sein de Norig, de le reperdre de vue, pour enfin le « retrouver » à l’occasion de son nouvel album « Border Lines« , en mode trio. Dans cette aventure musicale, Stéphane est accompagné du contrebassiste Marc Buronfosse, du batteur Arnaud Biscay. Le sujet central de ce disque, pour moi tourne autour d’un thème : la Famille, les familles. Je m’explique.
C’est d’abord lié à l’histoire de sa famille : Stéphane à grandi, nourri à la double culture hellénique (par son père) et française (par sa mère). C’est sans doute son album le plus personnel, important, au regard des ses origines, de son parcours, des lien familiaux et culturels qui le nourrissent.
Ensuite c’est une histoire de musiques : il a démarré le piano sur les genoux de son grand-père à l’âge de 3 ans (!) (je fus témoin de ces jeunes années), étudie d’abord l’instrument par la voie classique. Par la suite,tombé sous le charme de Duke Ellington et son sens de l’improvisation il délaisse alors le classique et s’oriente vers le jazz et ses différentes couleurs, qui lui offrent davantage l’occasion d’improviser, ce qu’il aime. Lauréat du concours… Duke Ellington en 2012, il est passé par les cours et conseils de Benjamin Moussay. Après cet apprentissage, il démarre en tant que sideman (Norig), évolue dans des formations différentes, (Kaïmaki ; duo Nakano) qui lui correspondent. Puis il forme son trio, y jouant une musique plus personnelle. Aujourd’hui, il est un musicien sans frontières, allant jouer partout où c’est possible. Histoire humaine enfin : le titre « Border lines » n’est pas choisi au hasard. Outre son parcours personnel, et un hommage à ses racines helléniques, c’est aussi un clin d’œil à la situation d’un pays (La Grèce), des hommes, femmes et enfants, qui ont subi une grave crise économique, sociale.
Au fil d’un jeu tout en subtilité, en douceur, en maîtrise éprouvée, il nous délivre une carte de la géographie musicale de la Grèce. D’entrée il nous dit « Welcome to my country », dans ce pays berceau de la culture moderne, carrefour des cultures entre Orient et Occident. La suite, un régal de feeling, d’intelligence, de complicité avec ses deux acolytes. Stéphane nous livre son univers musical, à travers les pièces issues de la culture hellénique, macédonienne, moyen-orientale. A l’écouter jouer, je lui trouve des similitudes avec Shaï Maestro, Or Solomon, Gilad Atzmon ou Ahmad Jamal… finesse, légèreté, musicalité, sens de la mélodie.
Stéphane est également compositeur de musiques pour le cinéma. « Khaos, les visages humains de la crise grecque » (2012), pour lequel il fut récompensé, ainsi que « Chaplin, The Immigrant » (2016) sont les plus récentes. Stéphane Tsapis livre avec « Border Lines » un album sans frontières musicales de très belle facture! J’attend déjà la suite de l’histoire de ce trio.
Guillaume.
Solomon, de l’Or au bout des doigts !
« Le piano est comme le prolongement naturel de mes bras »… « La musique fut ma langue primaire, avant même de savoir parler »… Dans ces deux phrases, Or Solomon, pianiste israélien, qui démarra très tôt l’étude de cet instrument (à 4 ans ! ), dit tout (ou presque). Très vite, il montre des dispositions très étonnantes et précoces pour son âge. De 11 à 17 ans, il étudie le classique, puis rompt avec cet apprentissage, pour éviter de devenir un musicien-prodige. Bien lui en prend, puisque derrière, il va se tourner vers le jazz, en parcourant la discothèque de son frère, après avoir notamment écouter « Night train » d’Oscar Peterson. Un choc, une révélation pour lui, qui va désormais explorer les chemins libres et rythmés du jazz. Oui Or Solomon est un pianiste libre, pour qui l’improvisation tient une grande part dans sa musique. Rencontrer, partager, échanger, trois besoins naturels pour celui qui refuse de rester seul assis à son piano.
A 22 ans, Il débarque à Paris, sans parler un mot de français. Tous ses camarades d’études dont Yuval Cohen (saxophone), Omer Avital (contrebasse), décident l’aventure américaine, à New-York. Il va dès lors travailler dans de multiple directions, côtoyant aussi bien Camille que Mathieu Bogaerts, Abd El Malik ou Magik Malik Orchestra. S’il est inspiré par Thélonious Monk, John Cage, Joachim Kühn, et s’il plonge encore parfois son nez dans la musique classique (Beethoven, Prokofiev et surtout J.S Bach) il vole aujourd’hui de ses propres ailes, libre de nourrir sa musique comme il le souhaite.
C’est cette liberté, précieuse, que l’on découvre sur « Round trips« , album paru en 2011. Il s’agit certes d’un exercice solo, mais il permet de découvrir la sensibilité, le toucher subtile de ce pianiste. 12 morceaux sans failles, 12 plages pendant lesquelles l’auditeur se laisse prendre par la subtilité, le talent, les couleurs que met Or Solomon dans son jeu. Sans être un grand disque, inoubliable, « Round trips » est un beau moment de musique. Tout simplement. Celles et ceux qui étaient au bar musical « Musiques au Comptoir » le 11 Mars dernier, ont pu apprécier son talent, ce soir-là notamment accompagné de Sylvain Kassap.
Aux autres d’en faire autant à l’écoute de « Round trips ».
Guillaume.
Amouroux (re) visite les légendes du rock’n’roll.
Jean-Paul Amouroux, figure emblématique du piano à la sauce épicée au boogie-woogie, s’était fait discret ces dernières années. Le public amateur du genre peut néanmoins le retrouver tous les ans, fidèle au festival de Laroquebrou.
C‘est donc un bonheur de le retrouver sur disque, d’autant qu’il a entrepris un challenge intéressant : revisiter les standards du rock’n’ roll ainsi que quelques autres moins connus (soit 26 titres au total), tous écrits entre 1954 et 1969, rendant ainsi hommage à leurs auteurs (Fats Domino, Chuck Berry, Gene Vincent, Little Richard…), en mode boogie-woogie. Ce disque est un retour aux sources pour lui, une évocation par la musique de son adolescence, de sa découverte du boogie-woogie, du rock’n’roll.
Pour l’accompagner dans ce retour vers le passé, Amouroux s’est attaché les services du guitariste Franck Fournet, d‘Enzo Mucci à la contrebasse, du saxophoniste ténor Claude Braud, et du batteur Simon Boyer. L’idée originale, pour séduisante et originale qu’elle soit, est réussie dans sa plus grande partie, avec des morceaux tels que « I’m walking » (Fats Domino), « Lucille » (Gene Vincent), ou le triptyque « Memphis Tennessee », « School days », « No particular place to go (Chuck Berry), « Pony time » (Chubby Cheker), « Tutti Frutti » (Little Richard).
Cependant, sur les 26 morceaux de ce disque, figurent également à mon goût, quelques « jolis » ratés telles les adaptations de « Be Bop a Lulla » (Gene Vincent), « Rock around the clock » (Bill Haley and the Comets), « You talk to much » (Joe Jones) ou « Don’t be cruel »(Elvis Presley).
Au final, malgré les déceptions ci-dessus évoquées, le voyage vaut le détour, et démontre que Jean-Paul Amouroux reste la figure de proue du boogie-woogie made in France.
Guillaume.
Antoine Hervé fait jazzer les Stones!
Groupe mythique de la pop-music anglaise depuis leur émergence au cours des années 60, les Rolling Stones, devenus une véritable institution musicale, ayant influencés de nombreux artistes par la suite, n’avaient pas connus les honneurs d’une revisite de leur répertoire en mode jazz. C’est désormais chose faite « sur Complètement Stones », l’album du pianiste Antoine Hervé, ici accompagné de François Moutin à la contrebasse et Philippe Garcia à la batterie.
Ce trio passe en revue quelques-uns des nombreux standards écrits et composés par le duo Jagger-Richards, ici « Angie », « I can’t get no satisfaction », « Factory girl », « Wild horses », « Sympathy for the Devil », « Ruby tuesday », « Paint it black ».
Si la démarche surprend à la première écoute de »can’t you hear me knocking » qui ouvre l’album, j’avoue que je me suis pris au jeu, laissant de côté l’ombre de la voix de Jagger, et des envolées de guitare du gars Richards. Le dialogue qui s’instaure entre les membres du trio est un régal.
Les versions que j’ai préféré sont celles de « Factory girl », « Wild Horses », « Ruby Tuesday ».
Fans des Pierres qui Roulent comme amateurs de jazz sortant des sentiers (re) battus, vous trouverez ici un superbe compromis, tout en maitrise et en inventivité. A savourer.
Guillaume.
Pieranunzi-Casagrande, conversation musicale.
Enrico Pieranunzi, élégant autant que discret pianiste italien, nous revient avec un »double circle« , théâtre d’un dialogue musical partagé, échangé, avec le jeune guitariste Federico Casagrande.
Echange est le mot juste tant les deux musiciens laissent leurs instruments se répondre sans jamais vouloir prendre le pas sur l’autre. Deux générations échangent autour d’une seul sujet : La musique. Le dialogue, savoureux, sans excès. « Anne Blomster Song » qui ouvre ce Double Cercle en est l’illustration parfaite.
Federico Casagrande, guitariste originaire de Trévise, que je découvre à l’occasion de ce disque, dégage une virtuosité qui ne pousse jamais l’auditeur à l’ennui, mais au contraire à savourer ce sens musical, qu’il soit en position de leader sur un morceau ou en soutien d’Enrico Pieranunzi.
Ce dialogue, développé au cours de 11 morceaux, nous dévoile une musique aérée, intemporelle, mélodieuse. « Sector 1 », « Clear », « Within the house » ainsi que « Charlie Haden » (en hommage au contrebassiste américain décédé l’an dernier), sont mes pièces favorites au sein de ce dialogue à cordes sensibles.
« Double Circle », un disque à savourer tranquillement.
Guillaume.