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Charlie Watts, métronome des Rolling Stones, ne battra plus la mesure.


C’est une bien triste nouvelle qui est tombée en ce soir du 24 août 2021. En effet, Charlie Watts, membre et batteur des Rolling Stones depuis 1963, est décédé à l’âge de 80 ans à Londres. Malade, il avait refusé de repartir en tournée américaine avec son groupe de toujours ces derniers mois. Amateur patenté de jazz, mais aussi de dessin (il réalisera quelques pochettes d’albums des Stones), il a toujours été là, présent, traînant sa grande silhouette et son visage anguleux et énigmatique derrière les deux joyeux lurons que sont Mick Jagger et Keith Richards

Sur disque comme sur scène, il agissait en véritable maître du temps, du tempo. C’est d’ailleurs sur lui que se reposait, se calait le virevoltant Mick Jagger. J’en ai eu la preuve à deux reprises. La première fois, en 1995, à l’Olympia, dans une salle chauffée à blanc, qui voyait arriver Darryl Jones à la basse en lieu et place de Bill Wyman. Watts, installé derrière sa batterie, donnera ce soir-là un récital de justesse, de précision. Un régal. La deuxième fois, c’était à l’automne 2017, pour l’inauguration l’Arena de Nanterre, plus grande salle couverte d’Europe (40.000 places). Les Rolling Stones faisaient l’ouverture . 2h15 de show, un Jagger déchaîné, un Richards cabot mais en forme, Ron Wood appliqué dans ses rythmiques et pendant que Darryl Jones faisait le boulot à la basse, Charlie Watts, lui, assurait imperturbable, le rythme du groupe, telle une horloge de précision, sans jamais ou presque pourtant montrer un rictus de plaisir. Concentration maximum. Pour leur retour les Pierres qui Roulent avalent frappé fort, malgré le son parfois difficile de la salle.

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Avant d’intégrer le groupe en 1963, Charlie Watts avait mené une carrière de descinateur publicitaire, jusqu’à sa rencontre avec Brian Jones, alors chanteur et guitariste des Rolling Stones, en 1962.  A la suite du décès de Jones, c’est donc Mick Jagger qui reprendra le micro, pour ne plus jamais le lâcher. Watts, depuis son entrée au sein du groupe a participé à tous les albums studios, de même qu’aux multiples tournées de plus en plus rentables et attirant sans cesse un public toujours plus nombreux au fil des décennies. Mais je me souviens d’une de ses déclarations lors d’une interview dans les années 90 je crois, au cours de laquelle il disait que « jouer avec les Rolling Stones était une récréation, mon vrai métier étant musicien de jazz ». Incroyable mais vrai. Dans un entretien accordé au magazine Télérama en 1998, à l’occasion de la sortie de l’album live « No security », il évoque nombre de sujets comme sa  vie au sein des Stones, la relation Jagger-Richards « Tant qu’ils seront ensemble, les Stones existeront », la popularité lors des présentations sur scène « C’est un immense compliment » disait-il, le peu de souvenir de son premier concert avec les Stones au Flamingo Jazz Club de Londres, en janvier 1963, mais garde un « merveilleux souvenir » de sa première tournée avec Bo Diddley, Les Everly Brothers, Little Richard. Il raconte également devoir à Alexis Korner, rencontré dans les années 60, son entrée dans la musique via le groupe Blues Incorporated. Charlie Watts n’avait à cette époque jamais écouté, entendu de blues (qu’il assimilait à la tristesse de Charlie Parker), aussi le son d’un harmonica fut pour une révélation. Viendra donc ensuite sa rencontre avec Brian Jones, au sein de ce groupe, puis les rencontres avec Mick Jagger et Keith Richards, ce dernier venant voir son pote chanter sur scène. Au sein de ce groupe protéiforme, à l’époque, on croise aussi Jack Bruce (contrebasse) et Ginger Baker (batterie), deux futurs membres de Cream (avec Eric Clapton).

Charlie Watts disait ne conserver qu’un vague souvenir des années 60-70, ce qui signifie qu’il n’a sans doute pas apprécié cette période de multiples expériences, en tous genres, auxquelles n’ont pas échappé ses camarades de jeu. Lui le discret, semblait peu goûter le barnum des stades, qu’il comparait à des « jeux du cirque », leur préférant cent fois l’intimité d’un club de jazz ou d’une petite salle de rock. la proximité, C’était son plaisir. l’échange, le partage. De la précédente tournée stonienne, en 2017, il ne gardait que le souvenir des personnes lui indiquant quoi faire ou bien où se rendre. Lassant. Lassé. et sans doute déjà atteint par la maladie qui le rongeait de l’intérieur.

Lui le jazzman d’origine, Il n’aura pourtant que peu eu l’occasion de faire son vrai métier puisqu’il n’a enregistré que de rares albums de jazz, entre deux tournées et albums des Stones. Lui qui se rêvait en musicien de jazz, ayant eu comme idole le batteur Kenny Clarke, avec l’envie de jouer aux cotés des plus grands maîtres du jazz. Il a donc enregistré des albums de jazz tout au long de sa carrière, comme par exemple « Vol pour Sydney » en 1986, avec des participants comme Evan Parker, Elvin Jones, Michel Doneda, Taj Mahal, excusez du peu! … ou celui consacré à Charlie Parker en 1992 « Tribute to Charlie Parker with strings », puis avec Jim Keltner Project  (photo ci-dessous) en 2000. Jim Keltner ayant notamment participé aux deux albums des Travelling Wilburys (super groupe composé de Jeff Lynne, Bob Dylan, Tom Petty, Roy Orbison, George Harrison), tout comme il joué aussi sur l’album solo de Mick Jagger « Wandering Spirit » en 1993, et sur Bridges to Babylon » des Rolling Stones en 1997 entre beaucoup d’autres. Charlie Watts lui, En 2004,  avec son Tentet Watts, enregistre un album de reprises jazz de Miles Davis et Duke Ellington, qui contient aussi version revisitée de « Satisfaction », enfin celui avec le Danish Radio Big Band en 2017.

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Loin des exubérances de Jagger, Richards et Wood, pendant que Wyman se cantonnait au rôle de mémoire de l’histoire du groupe vu de l’intérieur, Charlie Watts  était lui le membre le plus flegmatique, discret, secret des Rolling Stones. Il n’en a pas moins été le socle, la pierre fondamentale, sans laquelle, pendant plus de 60 ans, ce groupe mythique n’aurait pas tenu la dragée haute, malgré les changements (après le départ de Bill Wyman en 1993 notamment remplacé par le talentueux Darryl Jones), car il était le véritable métronome du groupe, permettant aux autres de se reposer, se caler sur lui. Charlie Watts avait pour habitude de jouer sur un kit de batterie ridiculement petit par rapport aux standards devenus habituels chez ses confrères du rock ou du jazz. Ca ne l’empêchait pas de jouer de façon fine et précise, ou de marteler quand il fallait. Son style, sa sonorité de frappe resteront uniques. Il n’est qu’à écouter les albums des Rolling Stones ou ses disques solo pour s’en convaincre.

Il va désormais reposer au paradis des batteurs, pouvoir discuter avec Kenny Clarke, Alvin Jones, Ginger Baker, John Bonham. Nul doute qu’il sera bien accueilli. Je vous laisse avec une sélection de morceaux, des Rolling Stones bien sûr, mais aussi de sa période jazz. Savourez.

Guillaume.

Quand Delgres rend hommage à ceux qui se lèvent tôt.



Fondé en 2016, ce trio de Hard-Blues franco-caribéen doit son nom à un citoyen guadeloupéen qui s’est battu contre l’esclavagisme aux Antilles, Louis Delgrès (portrait ci-dessous), dont la sépulture se trouve au Panthéon à Paris. Le groupe, depuis 5 ans, écume les scènes antillaises et hexagonales, de concerts en festivals, comme aux Aventuriers, à Fontenay-sous-Bois en décembre 2018, la même année où la médiathèque accueillait le concert du groupe toulousain Agathe Da Rama. La prestation de Delgres ce soir-là, avait clairement réchauffé l’ambiance. Le trio, composé d’une guitare-voix, d’une batterie et d’un soubassophone, avait fait chavirer la salle par un set énergique, plein d’engagement, tant musical, physique que dans les textes.

« 4:00 » enfanté en 2020, est donc le troisième opus du groupe après « Mo Jodi » paru en 2018 et « Mo Jodi, extended gold edition », sorti en 2019.

Donc que vaut ce « 4:00? », titré ainsi en hommage à celles et ceux qui se lèvent tôt pour aller travailler, exercer des professions difficiles et ingrates parfois, mais indispensables à la société, aux entreprises, à la vie des hommes et femmes.

Le disque démarre sur les chapeaux de roues avec « 4 Ed Maten », chanson qui évoque donc ces invisibles, qui bravent les intempéries, quand la ville dort, pour aller prendre leur travail. Le tout sur une musique énergique. « Aléas » parle du courage qu’il faut d’avancer malgré les coups durs de la vie (esclavage, misère), qu’il faut continuer à croire en l’Humanité. « Assez Assez », sur fond de blues dénonce le gâchis effectué par ceux qui nous dirigent. « Se Mola » dénonce le racisme subi dès l’enfance, à la cour d’école.

Delgres aborde comme toujours des thèmes sérieux, sur fond de musique rock. C’est très agréable à écouter, rafraîchissant. A celles et ceux qui ne n’auraient pas encore vu ce trio sur scène, si jamais il est annoncé près de chez vous, foncez, vous passerez  un excellent moment.

Guillaume.


Pour Ben Harper, la saison des amoureux, c’est l’Hiver.



Benjamin Chase Harper, alias Ben Harper, né il y bientôt 52 ans ( il les aura le 29 octobre prochain) à Claremont en Californie, est un guitariste-auteur-compositeur-interprète, se produisant tantôt en solo, tantôt accompagné de groupes comme les Innocent Criminals, Blind Boys of Alabama, ou Relentless Seven. Aux confluences de divers musiques, à la manière d’un Lenny Kravitz, ou même d’un Prince auparavant, Ben Harper ne se gêne pas pour aller sur divers terrains musicaux, qu’il s’agisse du reggae, de la folk music, du blues, du gospel, du rock ou de la funk. Son spectre musical est très vaste, le gars ne s’interdit rien. Il se sent libre de tout faire, il ose tout. Sa carrière jusqu’ici jalonnée de succès jamais démentis, en témoignent ses concerts devant des salles remplies, est des plus riche artistiquement.

En 2020, en pleine période de confinement généralisé, il s’est offert de publier  » Winter is for lovers’ « . Et moi qui croyais que la saison des amours était naturellement le printemps voire l’été, voilà que ce gaillard nous assène que non, pour lui, tout se passe en hiver, au chaud des alcôves. Fidèle à ses habitudes, Ben Harper a enregistré cet album de manière très sobre, presque artisanale. Voilà vingt-huit ans que ce grand musicien trimballe sa carcasse et son sourire un peu partout dans le monde, depuis la sortie de « Pleasure and Pain » en 1992, suivi des deux albums à succès « Welcome to the cruel world » en 1994 et « Fight for your mind » dans la foulée en 1995.

Car Harper, très vite s’est identifié comme un musicien-citoyen à l’instar des Bob Dylan, Bruce Springsteen, Neil Young, Joan Baez, ou encore le légendaire Johnny Cash. Ben Harper le musicien est également un vrai conteur, parfois débarrassé des oripeaux de la star adulée qui empli les salles et les stades. Non il préfère les ambiances intimes, la proximité, la relation vraie à l’humain. C’est pourquoi aussi il fait rarement parler de lui en dehors de son activité musicale. Il sépare pleinement le professionnel et le privé.

Mais revenons au disque. Chacun des titres de cet album est une référence pour Ben Harper. Tantôt à l’enfance et aux quartiers où il a grandi avec « Inland Empire », mais aussi au désert de « Joshua Tree », pour le coté quasi hypnotique et mystique de l’endroit. Il évoque aussi évidemment un des hauts lieux du jazz de New-York, le quartier de Harlem, qui a été très important dans la renaissance de ce courant musical. Et puis bien sûr, il fait allusion à Londres, ville berceau de tant de guitaristes anglais de talents, dont le grand Jimmy Page notamment. Sur cet album d’une pureté absolue, très dépouillé musicalement, Ben Harper s’en donne à coeur joie et nous régale de son talent. Il nous fait un joli cadeau en terminant son disque avec une chanson sur Paris, ville qui pour lui signifie plus jamais le printemps, la vie, après l’hiver vécu dans le grand nord américain, new-yorkais ou canadien.

Ben Haper, tout jeune, eût la chance, grâce à son père qui tenait un magasin de guitare à Claremont, sa ville natale, le « Folk Music Center », de croiser des musiciens prestigieux tels que Ry Cooder ou Taj Mahal, qui deviendra son vrai mentor et l’emmènera même en tournée à ses débuts. Il voue d’ailleurs une reconnaissance éternelle à son mentor, sans qui rien n’aurait été possible selon Ben Harper.

« Winter is for lovers » est un projet musical que Ben Harper murissait dans sa tête depuis dix ans. Il souhaitait tant mettre en avant et mixer les cultures blues, amérindiennes, hawaïennes. Le résultat est bluffant de qualité. Je vous invite à l’écouter tant cet artiste propose ici un projet musical sans faille.

Guillaume.

Après Prince, Jimi, Bob et David, voici John Lennon version Jazz.


Dans la série « que valent le répertoire de vos idoles en mode jazz? », j’ai déjà ici donné mon point de vue sur les disques concernant Prince, Bob Marley ou Jimi Hendrix et plus récemment David Bowie. Voilà maintenant que c’est le tour de la légende John Lennon, ex-Beatles, devenu chantre de la paix et de l’amour dans le monde aux côtés de Yoko Ono dans les années 70’s, jusqu’à son assassinat le 8 décembre 1980, de « subir » cet assaut musical de jazzmen et jazzwomen pour réinterpréter son répertoire. Toujours à la baguette, le talentueux Lionel Eskenazi a rassemblé pour l’occasion des noms prestigieux tels que le saxophoniste-guitariste et chanteur Curtis Stigers, le chanteur anglais Joe Jackson, le guitariste et chanteur de blues Lucky Peterson (disparu en 2020), NGuyen Lê (déjà présent sur la version hommage à Jimi Hendrix), le guitariste Al di Meola, la chanteuse-pianiste brésilienne Tania Maria et le pianiste, compositeur et chanteur italien Stefano Bollani, pour les plus connus. Bref, du très lourd! Voyons maintenant ce que ça donne. L’album s’ouvre avec la voix plaintive et bluesy de Curtis Stigers qui chante un très beau « Jealous Guy ». Ça sent la douleur, la tristesse. Le tout accompagné d’un tres bon trio piano-batterie-contrebasse. Superbe. Ensuite c’est une fille, entendez « Girl » qui s’invite à nos oreilles, magnifiquement chantée par le vétéran de la pop anglaise Joe Jackson, dans un registre piano-voix que je ne lui connaissait pas. Bluffant. Après quoi les Pink Turtle (les Pink..Floyd étaient pas disponibles😉) revisitent le tube mondial « Imagine » en mode instrumental ambiance funk cool. Ça fonctionne. Retour au Blues avec l’immense et regretté Lucky Peterson qui chante l’évidence même « Yes Blues ». Un régal.

Puis arrive sans crier gare une voix féminine qui m’est inconnue, celle de Daria, qui interprète « Strawberry fields forever » avec délicatesse, souplesse vocale sur fond de musique indienne. Plaisir. A peine suis-je sorti de ce morceau que déboule un pianiste de jazz finlandais, IIro Rantala qui m’attrape et joue un « oh my love » tout en subtilité comme savent le faire les musiciens nordiques qui ont une sensibilité vraiment particulière. Ce titre figure sur l’album « My working class hero » qu’il avait composé en hommage à John Lennon en 2015. Je vais me dépêcher de découvrir sa discographie. Après cet amour en mode finlandais, Nguyen Lê, guitariste, nous trimballe en Inde pour un « Comme together » étonnant, sur lequel il laisse son expression se dérouler, ce qui donne une très belle couleur au titre. De plus il est accompagné de 3 chanteurs (2 hommes, 1 femme). L’aspect jazz-fusion du morceau le rend totalement neuf. Superbe. Un autre virtuose de la guitare succède à Nguyen Le, il s’agit de Al di Meola. Sa version de « Dear Prudence », sur des tonalités quasi flamencas, est très belle. Son jeu est fluide. On entend presque ses doigts courir sur le manche. Sorti de cet instant gracieux, revoilà Jen Chapin et le Rosetta trio, entendue sur l’opus dédié à David Bowie, elle y chantait « Starman ». Là c’est un « nobody told me » presque intimiste qu’elle interprète avec guitare, et une contrebasse. Magique. Je parlais plus de la Finlande. C’est maintenant les forêts norvégiennes que nous visitons grâce au piano de Stefano Bollani. Ça vous transporte. De là-haut j’entend la voix de la brésilienne Tania Maria qui nous dit « Imagine ».. Le tout sur un rythme de jazz cool… Ça groove en douceur, c’est juste beau.

Après ce très joli moment, un guitariste nommé Stephen Bennett (rien à voir avec Tony Bennett) nous gratifie d’un « Because » tout en touché et musicalité. Entendre ce morceau joué ainsi est vraiment spécial. Puis la voix lancinante et timbrée de Muriel Zoe, chanteuse allemande néée à..Hambourg (ville où les Beatles ont joué à leurs débuts hors Angleterre) donne à entendre une version toute en retenue du classique « A hard day’s night ». « Nowhere man » qui suit est joué sur un rythme très cool, de presque fin de jour, ou fin de nuit, selon votre humeur d’écoute, par un duo de jazzmen allemands, les frères Roman (piano) et Julian (trompette) Wasserfuhr. Une belle découverte. Un « Beautiful Boy » est ensuite appelé, sussuré devrais-je plutôt dire ici par la chanteuse Laura Crema. Une chanson en mode jazz cool. Avec un piano qui dialogue avec le chant de belle manière. Pour vraiment terminer ce bel hommage à John Lennon, place à un instrumental, qui parfois nous emmène dans les étoiles. Ici c’est carrément un voyage « Across the Universe » qui est suggéré par le piano aérien de Bill Anschell. Comme un dernier salut à l’artiste, mais aussi à l’ange bienveillant que se voulait être John Lennon vis à vis de ses condisciples humains.

Guillaume.

David Bowie version Jazz, qui l’eût crû ?


Après Prince, Bob Marley, et Jimi Hendrix, dont les répertoires musicaux en version jazz ont déjà été évoqués ici, voici donc venu le tour du grand David Bowie d’être passé à la moulinette de ce genre musical. Lui, enfin surtout son répertoire. Pour cela, Lionel Eskenazi, qui chapeaute chacun de ces projets, a réuni une belle brochette de talents. Jugez plutôt : le pianiste Bojan Z, le trompettiste Eric Le Lann, le guitariste Pierre Jean Gaucher, ou encore les chanteuses Laîla Biali, Cinzia Bavelloni, la française Keren Ann, parmi beaucoup d’autres. Cet album, « David Bowie In Jazz » est sorti en 2020.

Cet hommage au dandy anglais démarre par une superbe version du tube « Let’s dance ». Ça commence par une intro voix-contrebasse, puis le piano, les claviers s’installent très vite et tout s’emballe. La voix souple et chaleureuse de Laila Biali, chanteuse canadienne qui a travaillé avec Sting, et l’ambiance installée, forment une très belle entrée en matière. Nul doute que Thin White Duke eut apprécié cette version. Dans la lignée, c’est une autre chanteuse qui prend la suite, Cinzia Bavelloni. Elle s’attaque à « Lady Stardust », sur un mode smooth jazz des plus agréables à écouter. La trompette qui prend le solo (dommage que nous n’ayons pas le détail des accompagnateurs…), puis le xylophone nous transporte vers un rivage qu’on imagine calme et paisible. Bojan Z (Zulfikarpasic de son vrai nom), que j’avais découvert à l’Européen à Paris voilà 15ans, revisite en mode trio le classique « Ashes to Ashes ». Le résultat, subtil, est très beau. Bojan Z y met toute sa musicalité.

Vient ensuite une chanson écrite en hommage à Andy Warhol, ici interprétée par la chanteuse Caecilie Norby, soutenu par un trio de haute qualité. Sa voix se promène sans souci, se faisant transmetteuse de l’administration éprouvée par Bowie envers Warhol. On enchaîne ensuite avec « The Jean Genie », chanson maintes fois reprise, ici jouée façon blues avec guitare dobro et harmonica par le groupe Yelloworld, spécialiste des reprises de David Bowie. Très belle version. Puis le trompettiste Eric Le Lann, accompagné d’un solide trio, revisite « Lire on Mars ? », chanson qui résonne étrangement à l’heure des explorations de la planète rouge, de son sol, son atmosphère, en vue de futurs voyages. Mais revenons à la musique. La trompette de Le Lann joue comme chantait Bowie, dans une forme de complainte. C’est très réussi. « The man who sold the world », ici pris en voix par Miriam Aida, est joué sur un rythme flamenco et chanté en mode jazz. Le mariage des 2 vaut l’écoute. Puis arrive l’un des titres phares de la carrière de Bowie, « Space Oddity », qui démarre par ces fameux mots « Ground Control To Major Tom ». S’il est difficile, là plus que sur les autres titres déjà évoqués, de ne pas « entendre » la voix de Bowie quand la chanteuse Grazzia Giu se coltine ce titre, elle s’en sort plus que bien, remplaçant le côté dramatique initial voulu par Bowie, par une longue plainte, une douleur retenue, sentiment renforcé par cette voix qui tient sur un fil, en équilibre, celui de la vie. Superbe. S’en vient ensuite « Aladdin Sane » ici joliment rendu par le talentueux guitariste Pierre-Jean Gaucher dans une version mi jazz cool mi jazz fusion. Federica Zammarchi offre une version « club de de jazz » de « Lady grinning soul ». La voix est là, tout est en place, mais aucune émotion ne sort de cette interprétation. Gâchis. Tout l’inverse avec Jen Chapin et le Rosetta trio sur « Starman », c’est enlevé, léger, la voix est appliquée sans trop appuyer, le timbre légèrement aiguë ajoute une petite touche très agréable à ce morceau virevoltant. Puis on tombe sur une interprétation déroutante de « Heroes », par le Delta Saxophone Quartet. C’est lent, presque méconnaissable. Déroutant au possible. Heureusement arrivent les Yelloworld, spécialistes ès Bowie. Ils nous embarquent pour un « Moonage daydream » de haute tenue. Le voyage musical est réussi. Tiens revoilà Cinzia Bavelloni, sur un fond de trio jazz très swinguant, avec « DJ ». On se croirait transporté dans les 30’s.

Après avoir eu droit à la superbe version vocale par Grazzia Giu, c’est maintenant Franck Wolf, pianiste, qui nous donne son interprétation de « Space Oddity ». Tout en subtilité, en douceur. Le groupe vocal Puppini Sisters revisite « Changes » en y donnant un aspect swing assez ravissant. Pour terminer cet hommage au génial David Bowie, c’est Mike Garson  qui se colle à la tâche. Le pianiste s’amuse et ça se sent en revisitant le célébrissime « Let’s dance », déjà  chanté en ouverture du disque par Laîla Biali.

Enfin en bonus track, la belle voix de Keren Ann chante « Life on Mars » dans une orchestration à cordes superbe. De quoi très bien terminer ce bel opus qui rend hommage au talent de chanteur-compositeur-interprète de David Bowie. Quoiqu’il en soit, le résultat est bluffant par moment, surprenant à d’autres, déroutant aussi, mais la qualité des interprètes donne à ce projet une densité que n’aurait sans doute pas renié David Bowie.

Guillaume.

 

Piano Pianissimo


Le piano, cet instrument magique, où les doigts virevoltent sur cette multitude de touches noires et blanches, réalisent des prouesses dignes des plus grand.es gymnastes, ou par quelques notes subtiles vous envoûte… J’ai toujours été fascinée par la virtuosité des pianistes, par leur talent. Et pratiquant cet instrument depuis quelques temps maintenant, je me rends compte encore plus de la difficulté d’apprentissage, de la dextérité nécessaire, pour réussir ces envolées majestueuses ou cette caresse du clavier. Et ressentir ces émotions uniques que l’on peut avoir avec l’instrument. Quand l’instrument est un prolongement de votre être, une expression de tout ce qui se passe en vous.

Je suis toujours en admiration autant musicalement que techniquement quand je suis en concert, face à ce piano et celui ou celle qui l’accompagne. Comme avec tout instrument, une symbiose s’opère. L’instrument peut jouer le rôle principal, mais peut aussi accompagner la voix, se répondre aussi.

Alors avec cette playlist réalisée avec tous les médiathécaires, j’ai voulu rendre hommage à cet instrument, au talent de ces artistes. Que ce soit classique, jazz, pop, de nombreux styles musicaux lui font la part belle. Quelques souvenirs de pianistes reconnu.es, oublié.es…. Il y a de quoi faire profiter vos oreilles !

Bonne écoute

Carine

Ivry Gitlis laisse son violon orphelin.


Né à Haïfa en Israël en 1922, Ivry Gitlis a des origines parentales ukrainiennes. Ce qui, de fait, très tôt, va faire de lui, un citoyen du monde, et incarner ce que sera sa vie. Celle d’un home et d’un musicien, violoniste virtuose, qui ne cessera de courir les 5 continents, pour porter une parole d’apaisement, d’échanges entre les peuples, par la seule magie de la langue qu’il trimballe avec lui, la musique, mélange de tradition juive, d’origines slaves, de classique, mot qu’il déteste d’ailleurs, considérant qu’il n’existe que la musique, pas la musique dite classique, « ca c’est une affaire de marketing ! » dit-il. Ce géant de la musique du 20ème siècle est parti dans la nuit parisienne, le 24 décembre dernier. Ce mois de décembre a été fatal pour nombre d’artistes de renoms, auxquels il vient tristement s’ajouter. Revenons modestement sur son parcours.

A quatre ans seulement, le jeune Ivry reçoit un violon qu’il avait réclamé. Parents et entourages s’étant cotisés, le cadeau arrive, les premiers cours sont donnés et payés, et dès l’âge de 7 ans, il donne son premier concert. Repéré très jeune par Bronislaw Huberman, fondateur de l’orchestre de Palestine, ce dernier lui conseille alors de partir en Europe pour continuer sa formation. Le jeune Gitlis s’exécute et file pour la ville Lumière où il reçoit un enseignement au Conservatoire, avant de partit à Londres parfaire sa formation. A chaque fois ce sont des professeurs de haut vol qui lui tiennent lieu de guide musical. A Paris c’est notamment le compositeur-violoniste Georges Enesco qui se charge de lui. A Londres, il intègre une usine d’armement, puis après la guerre, entre au sein du fameux orchestre philharmonique de Londres. Ensuite, il part découvrir les Etats-Unis dans les années 50, puis grâce au plus grand imprésario de l’époque, devient le premier musicien israélien à jouer en URSS. Il marque les esprits par sa technique et par sa manière d’interpréter des concertos de grands compositeurs tels que Alban Berg, Igor Stravinsky (première photo ci-dessous) ou encore Béla Bartok (deuxième photo ci-dessous).

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Musicien génial, pédagogue infatigable, il parcourt le monde, partage son savoir, utilisant tous les moyens à sa dispositions, concerts bien entendu, cours, apparitions télévisées, pour communiquer autour du violon, de la musique classique. Dans les années 60, Ivry Gitlis décide de venir s’installer à Paris, ville qui sera son pied à terre entre ses différents séjours à l’étranger pour ses tournées et concerts de prestiges, car son talent est demandé partout dans le monde.

Il joue avec les plus grands orchestres du monde, popularisant ainsi des oeuvres du répertoire classique. Sa renommée entraine des compositeurs à écrire spécialement pour lui, ainsi Iannis Xenakis (photo ci-dessus) ou Bruno Maderna s’y attacheront- ils. C’est à cette même période, qu’il se lance dans la création d’un festival de musique, à Vence, en 1971, où son idée principale est de laisser la musique classique s’exprimer très librement; de manière moderne. En vrai curieux et défricheur et curieux de tout, il multiplie les expériences musicales, les rencontres, comme celle avec la talentueuse Martha Argerich (photo ci-dessous). Je vous disais que Gitlis était un homme de croisement des univers musicaux, la preuve en est sa rencontre avec les rockeurs Eric Clapton (deuxième photo ci-dessous), Keith Richards, Mitch Mitchell, Yoko Ono et John Lennon (excusez du peu !) au sein du groupe The Dirty Mac (troisième photo), dans le cadre du film « Rock and Roll Circus » consacré aux Rolling Stones, en 1968.

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Outre ses divers interprétations et multiples concerts ou participations à des soirées de gala, Gitlis reste un musicien multi-cartes. C’est ainsi qu’on le retrouve parfois dans des films tel que « L’Histoire d’Adèle H. » de François Truffaut avec Isabelle Adjani, ou comme interprète de la musique du concerto pour violon composée par le génial Vladimir Cosma, pour le film « La septième Cible » (avec Lino Ventura), réalisé par Claude Pinoteau, à qui l’on doit des films comme « Le silencieux » (1973), « La gifle » (1974, avec Lino Ventura et la jeune Isabelle Adjani), « Le grand escogriffe » (1976, avec Yves Montand), « La Boum » (1980), « La Boum 2 » (1982, avec Sophie Marceau, Claude Brasseur, Brigitte Fossey), « L’étudiante » (1988, avec Vincent Lindon et Sophie Marceau) ou encore « Les palmes de Monsieur Schultz » (1997, avec Isabelle Huppert, Charles Berling, Philippe Noiret).

Mais revenons à Ivry Gitlis. Toujours dans le soucis de transmettre et de vulgariser la musique classique, ce génial musicien créé en 2008 une association, « inspiration(s) », justement destinée à vulgariser son apprentissage, auprès du plus grand nombre. Ayant toujours cette image de modèle et d’icône de l’instrument, Gitlis sera le sujet d’un documentaire réalisé pour Arte en 2009, intitulé « Ivry Gitlis, le violon sans frontières ». Titre qui résume parfaitement le parcours, la démarche, la vie de cet infatigable musicien. Ces dernières années, Gitlis, atteint par des soucis de santé, se faisait rare sur scène. Il s’est éteint la nuit de Noël 2020, laissant un catalogue d’interprétations d’oeuvres très riches, qui ravira les mélomanes comme celles et ceux qui le découvriraient seulement.

Je vous laisse avec quelques morceaux qu’il a interprété, et quelques duos superbes, à commencer par celui avec Barbara.

Guillaume.

Quand Jimi se fait Jazzer…


Après avoir réalisé en 2019, un album autour des compositions du regretté Prince Roger Nelson, alias Prince, chroniqué ici-même, c’est au tour d’un autre géant de la musique du 20ème siècle, du rock en particulier, le guitariste Jimi Hendrix, de subir ce passage à la machine jazz. L’album s’intitule sobrement « Hendrix in Jazz », les morceaux ont été sélectionnés par Lionel Eskenazi.

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Pour faire aboutir un tel projet, il faut un peu de folie, de la ténacité, et la réussite pour convaincre des jazzmen et jazzwomen de tous horizons de se ranger derrière la bannière Hendrix. Un morceau par artiste, parfois plusieurs comme pour Mina Agossi (passée à l’Espace Gérard Philipe en janvier 2011). Au total, ce sont 25 artistes ou groupes qui interviennent sur cet album, comme par exemple la chanteuse québécoise Terez Montcalm (photo ci-dessus), le guitariste-chanteur de blues Poppa Chubby, la chanteuse coréenne You Sun Nah (photo ci-dessus), Denis Colin Trio, ou encore le fantasque chanteur américain Willy Deville, et même la talentueuse pianiste américaine Geri Allen. Vous le voyez le plateau est riche et varié, pour faire honneur à la musique de Jimi Hendrix.

C’est donc la chanteuse canadienne Terez Montcalm qui ouvre l’album avec une superbe reprise de « Woodoo child », sur fond d’ambiance feutrée illustrée par les percussions et la guitare qui officient. Sa voix, légèrement rauque et cassée, fait parfois penser à Janis Joplin. C’est un régal. Ensuite, la chanteuse coréenne You Sun Nah prend le relais avec un titre intitulé « Drifting », lui aussi donné en version calme, tranquille. Elle nous gratifie de vocalises envoûtantes qui nous embarquent pendant que la guitare s’exprime sans tomber dans le piège du plagiat hendrixien très vite repérable. Puis vient  « All along the watchover », restitué de très belle manière par le trio du pianiste Francis Lockwood, frère du regretté talentueux violoniste Didier Lockwood.  Une ambiance de jazz-club se dégage de ce titre. Cosy. Douillet.
Puis on arrive à la version de « Hey Joe » enregistrée par le bluesman Lee Moses ( mort en 1997). Cette reprise ne date pas d’aujourd’hui car le bluesman l’a effectué en 1971. La voix presque plaintive et éraillée, le timbre assurément grave, dominre ce cover où la rythmique et la guitare sont en retrait, de manière minimale bien sûr. Superbe. Vient après « Little Wing » revu et corrigé par le subtil guitariste Nguyen Lé et son trio. Ça confine presque à du jazz fusion. 

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Puis la talentueuse vocaliste Mina Agossi (photo ci-dessus), qui chante 3 titres sur l’album (« Burning of the Midnight Lamp » ; « Spanish castle magic »; « Red house ») prend donc place pour « Burning of the Midnight Lamp » qui ne m’a guère convaincu…son interprétation de « Spanish Castle magic » est au même égard ratée,  sans aucune magie. La chanteuse semble ne pas avoir trouvée la bonne clé pour aborder l’univers du guitariste américain. Isa Sand, elle nous embarque d’entrée dans une belle interprétation de « Manic depression ». Je découvre cette chanteuse. Belle voix, expressive.

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Celui qui vient après, Joachim Kuhn, vieux routier du jazz expérimental,  nous concocte une approche très particulière de « Purple Haze » plus proche du jazz contemporain. Pas ma tasse de thé.
A retenir des morceaux qui suivent,  le très beau « gypsy eyes » joué par Louis Winsberg (ex Sixun), tout en subtilité. La chaleur flamenca-gypsy fait du bien à entendre. Geri Allen, pianiste américaine que l’on ne présente plus, joue deux morceaux,  accompagnée par les Batson Brothers, à savoir « Message to love », un brin contemporain, et « Little Wing ». Sur ce dernier titre, elle joue tout en douceur, de manière minimale. Les deux derniers morceaux de cet album en hommage à Jimi Hendrix sont signés Willy de Ville, et Poppa Chubby.

Le premier nous donne sa célèbre reprise en mode mariachi de « Hey Joe ». Pour l’avoir vu il y a très longtemps au festival de jazz « Banlieues Bleues », au Blanc-Mesnil, je peux vous assurer que sur scène cette version est géniale à voir jouer. Le second, que j’ai eu la chance de rencontrer lors de sa première venue en France, à l’époque où je sévissais  dans un fanzine musical nommé « Standards, l’aventurier multimusiques » (clin d’oeil ici à Marc Sapolin, ancien programmateur de l’Espace Gérard Philipe, initiateur du Festival des Aventuriers première mouture à la fin des années 90) et à toute l’équipe de passionnés qui a oeuvré à sa réalisation pendant 9 années, de 1992 à 2001), est un bluesman puissant, par la taille, le talent. Il joue un « Purple Haze » chaud comme la braise. Parfait pour terminer l’hommage à Hendrix.
Ce disque est une vraie réussite. Précipitez-vous dessus.

Guillaume.

Il était une fois … 1988 !



Cette année-là, en France est marquée par les candidatures successives en janvier et février, de Jacques Chirac, Raymond Barre à l’élection présidentielle, qui verra finalement la réélection en mai de François Mitterrand avec 54% des voix face à Jacques Chirac. C’est aussi une année où le Louvre fait peau neuve avec la pose de la désormais fameuse pyramide, signée de l’architecte japonais Peï. En mars, une première loi sur le financement des activités politiques verra le jour. Ce même mois, la représentante de l’ANC en France, Dulcie September est assassinée à Paris. En avril, les évènements se déplacent en Nouvelle-Calédonie où une prise d’otages à lieu à Ouvéa. Cela débouchera sur une vraie crise, l’intervention de l’armée et la morts de plusieurs indépendantistes et militaires. En mai, 3 journalises français otages au Liban de très longue durée sont libérés entre les deux tours de la présidentielle. Chirac revendiquera ce fait Plus tard dans l’année, en octobre, la culture est frappée de plein fouet avec l’attaque du cinéma Saint-Michel par des catholiques intégristes, lors de la projection du film « La dernière Tentation du Christ » de Martin Scorsese avec l’immense acteur Willem Dafoe (image ci-dessous), mais aussi Harvey Keitel et Barbara Hershey. L’affaire fera grand bruit. En décembre, le gouvernement créé le RMI (revenu minimum d’insertion), et le parlement adopte la loi sur la création d’un CSA (Conseil supérieur de l’Audiovisuel). A la rubrique nécrologique, la Grande Faucheuse a fait « bonne récolte », jugez plutôt : le syndicaliste brésilien Chico Mendès (assassiné sur ordre), l’acteur américain John Carradine, l’anglais Trevor Howard et l’allemand Gert Fröbe, la psychanaliste française Françoise Dolto (mère du chanteur Carlos), le constructeur automobile italien Enzo Ferrari, le chanteur anglais Andy Gibb (Bee Gees), la chanteuse allemande Nico, le chanteur québécois Félix Leclerc, l’artiste français Jean-Michel Basquiat, l’humoriste Pierre Desproges, les acteurs français Jean Le Poulain, Marcel Bozzuffi, Michel Auclair, Paul Mercey, et la comédienne Pauline Lafont, fille de Bernadette Lafont. Bref, une belle charrette !!!

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Place à l’histoire inventée.

Ce soir-là, la nuit est pluvieuse sur Paris. Les gouttes d’eau passent devant les lampadaires de la rue de Rivoli comme des moucherons. En grappe, mais furtivement, immédiatement chassées par les suivantes. 

Deux hommes, la soixantaine, vies bien remplies, se tiennent appuyés sous les arcades, attendant que la pluie cesse son office nocturne. Le premier s’appelle Enzo, en hommage à Ferrari. Son père, fan du cheval cabré, s’était juré que s’il avait un fils, il le prénommerait ainsi. Le second s’appelle Gert. Là aussi une histoire de transmission. Il tenait ce prénom en hommage au comédien allemand Gert Fröbe. Deux « hérédités » lourdes à porter, pour des raisons diamétralement opposées.
Les deux hommes ne se ressemblent pas, tant physiquement que dans l’allure vestimentaire. Enzo est un grand gaillard d’un mètre quatre- vingt-dix, de famille bourgeoise, à l’ossature épaisse d’un troisième ligne de rugby, au visage marqué de cicatrices et aux mains larges et fortes. Côté vêtement, il cultive le soigné italien, de la chaussure à la cravate. Gert est homme de taille moyenne, un mètre soixante-quinze, de corpulence moyenne. Seul atout, des yeux bleus à faire se pâmer ces dames. Côté sape, le gars la joue carrément francophile, honneur aux couturiers, gantiers, chapeliers dont il connaît les adresses parisiennes par coeur pour bien se fournir. Idem pour la chaussure. Sans se connaître, nos deux gaillards ont un point commun : le goût du beau, de la belle sape, de la belle chausse.
Alors que la pluie fait des claquettes sur la chaussée et les trottoirs, nos deux hommes, à l’abris, entament une discussion, à bâtons rompus. Très vite ils se racontent leur vies, échangent sur la société.  Enzo raconte sa rencontre avec sa femme Johanna, avocate trentenaire, qui lui a redonné l’espoir, la foi en la vie, en l’amour. De cette union avec celle qu’il surnomme affectueusement « ma sauveuse », il a eu deux enfants, Marylin et John, 11 et 7 ans. Deux enfants tombés du ciel pour Enzo, qui ont renforcé son amour pour sa femme, pour la vie et lui ont redonné confiance. Mais Johanna, très protectrice, ne cesse de lui répéter « Don’t worry, be happy », dès qu’elle perçoit un moment de doute chez son mari. Johanna dit souvent que « mon mec à moi, il est tout pour moi », une véritable déclaration d’amour envers Enzo qui est très heureux aujourd’hui, ses enfants grandissent bien, son couple fonctionne, et côté boulot, après de longues années passées dans l’édition, il s’apprête à passer la main en douceur. Sans regrets.

Gert, à l’écoute de ce récit plein d’enthousiasme d’Enzo, se montre admiratif sinon un brin jaloux. Car pour lui, rien ne va. Publiciste, marié depuis vingt-cinq ans à Tracy, une anglaise bon teint, à l’accent londonien et au caractère bien trempé, il est père d’une fille de vingt ans, Annabelle, partie faire ses études en Australie (autant dire qu’il ne la voit quasiment plus, sinon par skype…ou quand elle revient sur Paris voir.. ses ami.e.s). Mais son couple bat de l’aile depuis longtemps déjà, la communication ne passe plus trop, les silences sont de plus présents, lourds. Gert et Tracy font chambre à part depuis longtemps. « Desire » est un mot absent du vocabulaire du couple. Trop selon Gert, qui ne supporte pas ça et déclare autant qu’il le peut à Tracy « I don’t wanna go without you »…. comme une supplique à une non séparation qu’il sent poindre dans l’esprit de sa femme. Car de son côté, Tracy envisage de plus en plus son mari comme « just a friend of mind », sans lui avouer bien entendu, ce qui serait très dur à entendre pour Gert. Puis un jour, fatalement, Tracy en vient à annoncer la nouvelle à Gert. Sa décision, ultime, définitive, irrévocable. « Je pars Gert ». « Pour où ? répond-il interloqué… »..Devant tant d’incrédulité feinte ou réelle de celui qu’elle n’aime déjà plus depuis longtemps, elle garde un silence froid, regarde une dernière fois sa maison, ouvre la porte, prend sa valise et s’en va. Sans un mot. Gert est choqué. Estomaqué. Mais c’est la fin brutale d’une histoire de vingt-cinq avec Tracy.

Face à ce récit pour le moins sombre de son compagnon d’infortune nocturne, Enzo se dit qu’il ne peut pas le laisser repartir, une fois la pluie cessée, sans lui donner quelque avis ou conseil. Aussi, sans le prendre de haut, ni sombrer dans le patos, Enzo conseille à Gert de se montrer plus prévenant, de surprendre sa femme, de lui proposer des sorties inattendues ou des week-end romantiques, histoire de ressouder le couple, et surtout d’échanger, de dialoguer, pour essayer de comprendre ce qui ne va pas, ce qui ne va plus.

Voilà maintenant deux heures que les deux homme échangent, se confient l’un à l’autre. Une relation amicale est-elle née ce soir de pluie parisienne ? En tous cas, au moment où la pluie enfin cesse, les voilà plus complices que jamais, maintenant riant aux éclats de blagues échangées et de la circonstance qui les a réunis sur un bout de trottoir, un soir humide à Paris, rue de Rivoli. Malgré l’heure avancée de la nuit, Enzo et Gert décident de poursuivre la discussion, mais au chaud cette fois. Enzo n’habitant pas très loin, près de la Madeleine, propose à Gert de finir la soirée chez lui, devant un bon scotch, à refaire le monde. Gert accepte. Un roman d’amitié est né.

Guillaume.

Il y a 40 ans, John Lennon était assassiné.


Cette année, John Lennon aurait dû fêter ses 80 ans. Je dis bien aurait dû, car comme vous le savez sans doute, tout s’est arrêté brutalement pour lui, voilà 40 ans, le 8 décembre 1980. A la sortie de son immeuble new-yorkais, alors qu’il se rendait à son studio d’enregistrement, John Lennon n’aura pas le temps d’atteindre la voiture garée qui l’attend. Sur le trottoir, dans l’ombre de la nuit new-yorkaise, une homme, Mark Chapman, l’attend de pied ferme. Au moment où Lennon passe devant lui, il l’appelle, Lennon se tourne, Chapman tire à bout portant et l’ex-Beatle s’écroule mortellement touché. A 40 ans seulement, l’un des artistes les plus influents des vingt dernières années termine tragiquement sa vie et une histoire musicale débutée dans les années 60 à Liverpool, avec ses trois acolytes Ringo Starr, George Harrison et Paul Mac Cartney, d’abord dans les pubs anglais, puis dans les stades américains, créant des émeutes à chacune de leurs apparitions.. Le retour en Europe sera triomphal. La nouvelle de son décès, bien qu’Internet n’existe pas encore, fait le tour du monde et ébranle ses fans, et bien entendu tous les artistes qui l’ont connus, côtoyés, rencontrés, au premier rang desquels les 3 ex-Beatles. Dans les années 60’s, le succès sera fulgurant pour le groupe, amené à faire des tournées énormes, en Angleterre, en Europe, puis aux Etats-Unis. Au sein du groupe, John Lennon, en compagnie de Paul Mac Cartney, compose la plupart des titres. Parfois bien sûr Ringo et George apportent leurs contributions. Lennon, avec ses lunettes cerclés, son regard parfois sévère, mais ce sourire toujours pas loin, était considéré comme l’intello du groupe. De fait il cultivait un peu cette image de dandy, lisant énormément, dessinant, photographiant aussi. Il était curieux de tout.

Au tournant des années 70, lorsque les Beatles se sont séparés, après une décennie de succès, des tournées harassantes, des albums sublimes concoctés sous la houlette du « 5ème élément », le producteur George Martin, John Lennon se tourna davantage vers l’écriture, le dessin, un travail introspectif et une recherche de la paix profonde, aidée en cela par la rencontre avec sa compagne japonaise Yoko Ono, artiste avant-gardiste, qui n’hésite pas à prendre des positions très tranchées sur des sujets de société brulants. John s’y joint sans sourciller. A la fin des Beatles, il était déjà préoccupé par l’état du monde, la guerre au Vietnam menée par les Etas-Unis, la prolifération des armes nucléaires, la faim dans le monde, les dictatures en Amérique du Sud et en Europe, autant de sujets qui selon lui valent des mobilisations populaires et politiques massives. Si les premiers se mobilisent, les seconds ont parfois tendance à trainer les pieds, tant d’intérêts sont en jeu. Ces centres d’intérêt politiques et sociétaux vont se renforcer à la mesure de son histoire d’amour avec Yoko Ono.

Musicien, compositeur, chanteur, dessinateur, photographe et écrivain, Lennon touchait à tous les arts avec un égal bonheur. Sans doute le soutien, le regard aiguisé de sa compagne l’aidait dans sa démarche artistique. Il était donc aussi devenu une voix que l’on écoute,  à l’instar d’un Mohamed Ali, d’un Jim Morrison, ou plus près de nous de Neil Young, Bruce Springsteen, Bob Dylan.
Il aurait donc eu 80 ans cette année. Que penserait-il de l’évolution musicale  des plateformes, d’Internet,  s’en serait-il servi? Que dirait-il de l’état de ce monde confiné ?. Une chose est sûre, depuis son décès voilà 40 ans, John Lennon à terriblement manqué à la pop-culture. Vous avez sans doute en tête quelques-unes de ses chansons, dont la plus célèbre « Imagine« . Mais il en a écrit quelques autres qui sont restées dans le patrimoine collectif telles que « Give peace a chance », « Instant karma », « Jealous guy »… et bien d’autres.

Je vous laisse avec une petite sélection de titres de John Lennon en solo et avec le groupe de Yoko Ono, car nul doute que vous connaissez déjà les morceaux qu’il a chanté, écrit et composé au sein des Beatles.

Guillaume.

Le Boss nous écrit sa lettre d’Amérique.


Quelques jours avant l’élection présidentielle américaine 2020 (qui a finalement vu la victoire de Joe Biden, malgré la contestation frontale du sortant Trump), le Boss est sorti de son long silence et nous revient avec une longue lettre, chronique de son Amérique sous l’ère Trump. « Letter to you », qui succède au magnifique « Western stars », dédié à la musique country-folk américaine. « Letter to you » reste fidèle à ce que fait Springsteen depuis 50 ans, une écriture à la plume est acérée, précise. Sans concession. Une description au scalpel de son Amérique, un état des lieux rigoureux, une cartographie à nue d’un pays qu’il aime profondément, passionnément. Pour ce disque, le Boss a rassemblé ses fidèles accompagnateurs, sa troupe qui le suit partout entre studios, stades et salles de concerts (oui je sais, ces mots semblent incongrus à écrire dans le contexte que nous vivons et allons sans doute vivre pour encore de long mois, je ferme ici la parenthèse), depuis presque 50 ans déjà!! Une paille, un bail, comme vous voudrez, mais cela prouve la qualité du bonhomme, sa fidélité en amitié. Le E-Street Band, même ayant perdu les talentueux Danny Federci, organiste mort en 2008 et Clarence Clemons (photos ci-dessous), saxophoniste décédé voilà 9 ans déjà. Ils étaient deux des pièces maitresses du groupe, façonneurs de sa marque sonore. Ce fut un coup de massue pour le Boss et les membres de la troupe restés soudés, performants, à travers les époques, avec constance. Sans phare, sans failles.


Alors donc « Letter to you », me direz-vous ? Hé bien le Boss et sa bande ont réussi la performance de l’enregistrer en 5 jours seulement, retirés dans une maison isolée, transformée pour l’occasion en studio d’enregistrement. A 71 ans printemps terrestres sonnés, Springsteen n’a plus rien à prouver, il ne fait de la musique que pour se faire plaisir, en tant que citoyen impliqué dans un pays tourmenté depuis plusieurs années, mais plus directement depuis 2016, que Trump est au pouvoir. Le pays s’est fracturé, divisé, les problèmes sociaux se sont renforcés, le chômage a explosé, le racisme avec notamment le drame récent de la mort de George Floyd, ayant entrainé les émeutes à travers le pays, et la montée du mouvement des « Black Live Matters« .

Sur ce disque figurent de très beaux morceaux comme « One minute you’re here », en voix et guitare acoustique, sur le temps qui passe, mais aussi « Janey needs a shooter », ballade aux accents springsteeniens marqués (tempo, harmonica, claviers).

La dernière élection présidentielle américaine donc s’est tenue dans un climat de tensions extrêmes entretenues, ou créées par le président en place, qui ne souhaitait pas quitter ce pouvoir si chèrement acquis en 2016 face à Barak Obama. Mais donc le pays a tranché. Pour le changement, l’apaisement. Le Boss, lui a depuis longtemps fait son choix. Dans l’une de ses chansons, il dit « ne plus vouloir d’un clown sur le trône ». Son voeu est exaucé. Mais revenons à l’aspect artistique. A peine quelques jours après avoir publié « Letter to you », il est le premier artiste à classer son album dans le Top5 des ventes sur 6 décennies de suite ! 1 record. Performance remarquable pour le Boss.

A 71 ans, Springsteen ne se démonte pas, fourmille de projets. Une tournée en attente, bien sûr,  au vu des conditions sanitaires catastrophiques aux États-Unis (250.000 décès dus au Covid-19), une émission de radio bi-hebdomadaire sur une radio locale. Et sans doute des chansons,  des musiques, déjà dans les tiroirs, pour cet infatigable conteur-témoin d’une Amérique qu’il a vu évoluer parfois dans le bon sens,  parfois dans le très mauvais. A l’instar d’un Bob Dylan,  d’un Neil Young, ou de Patti Smith, Springsteen fait partie de cette génération de musiciens devenus des classiques de leur vivant, des références absolues, des plumes et des voix qui comptent dans une société très remuée, abîmée,  qui se confronte parfois très violemment entre communautés. Springsteen,  comme pairs cités, est un phare indispensable à la compréhension de l’Amérique d’aujourd’hui.

Guillaume.

Il était une fois…


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L’année de mes 20 ans, de mes vingt piges, de mes vingt printemps terrestres. L’année de mon envol du cocon familial également, vers une indépendance attendue, recherchée. Mais 1987 c’est aussi une année pleine d’évènements très importants tels que la libération des prix en janvier, alors qu’ils étaient bloqués depuis 1945 (!), c’est le lancement du 3615 Minitel, également l’arrestation des membres du groupe Action Directe, le premier vol de l’Airbus A320, l’attribution des 5èmes et 6èmes chaines à des groupes privés, la naissance de M6, la privatisation de TF1 par Bouygues, l’ouverture en Juin du procès (filmé pour l’occasion, pour l’Histoire) de Klaus Barbie, ancien chef de la gestapo de Lyon. En En juillet, il sera condamné à la réclusion criminelle à perpétuité. En novembre, l’Institut du Monde Arabe, situé sur les quais de Seine, est inauguré. En sports, Si le cycliste irlandais réalise cette année-là le triplé Tour de France-Giro d’Italie-Championnat du Monde, en formule 1, c’est le fougueux pilote brésilien Nelson Piquet qui devient champion du monde sur Brabham. En France, les Girondins de Bordeaux, emmenés par Alain Giresse, deviennent champions de France de foot, le RC Toulon fait de même en rugby face au Racing Club de France. A Roland-Garros, c’est le tchécoslovaque Ivan Lendl qui s’impose face au suédois Mats Wilander.
Au cinéma, le public pourra voir des films aussi différents que « L’arme fatale » de Richard Donner, avec Mel Gibson et Danny Glover », « Au revoir les enfants » de Louis Malle, « La couleur de L’argent » de Martin Scorsese, avec Paul Newman, la star montante Tom Cruise, et Elisabeth Mastrantonio, John Turturo, « Le Dernier Empereur » de Bernardo Bertolucci, grande fresque historique impressionniste sur la vie du dernier empereur chinois, mort en 1967. Autre film marquant, « La Mouche » de David Cronenberg, avec le duo Jeff Goldblum-Geena Davis. Enfin, comment ne pas évoquer  » Sous le soleil de Satan » de Maurice Pialat, avec Gérard Depardieu dans le rôle titre. Qui ne se souvient pas, lors de la remise de la palme d’or à Cannes cette année-là, du bras d’honneur adressé à la salle des festivaliers par Pialat. Côté décès marquants, il faut noter ceux du dramaturge Jean Anouilh, de l’éditeur Pierre Seghers, du cycliste 5 fois vainqueur du Tour de France Jacques Anquetil, de la romancière-académicienne Marguerite Yourcenar, également ceux de l’acteur Lino Ventura, du pilote de formule 1 Didier Pironi, et du danseur-comédien américain Fred Astaire.

Place à l’histoire inventée.

Un matin banal brumeux d’automne, Jean-Hughes se réveille seul à bord de son ketch, acheté quelques années auparavant alors qu’il était en piteux état. Lui-même n’allait pas très bien. Femme partie, enfants grandis et à l’autre bout du monde, boulot en berne à cause d’une récession économique, Jean-Hughes avait des raisons de noyer son chagrin dans le whisky, au fond de son bateau « Renaissance », ancré dans le joli port de Saint-Malo. Mais comme le chantait un artiste anglais, qu’il écouter au moins une fois par jour, il se disait  » Never gonna give up »…non jamais il ne baisserait les bras. Jamais.
Il avait un couple d’amis, Mel et Kim, des australiens bon tein, lui avocat,  elle artiste-peintre, qui résidaient à quelques encablures de son port d’attache, dans les terres. Parfois, il les emmenait en mer,  pour de longues promenades, dans des endroits que lui seul connaissait. Lors de ces balades en mer, Jean-Hughes confie à ses amis qu’il a le coeur en exil depuis le départ de sa femme. Que seulement « Là-bas », sur cet élément liquide remuant et imprévisible,  étrangement il se sent en adéquation,  il se sent libre, fort, en contrôle.

Mel et Kim restent perplexes devant les certitudes affichées par leur ami. Mais n’en disent mot de peur de le vexer ou de finir à la mer. Ç’est pas le moment,  se disent-ils, attendant le retour à terre. Un soir,  voyant l’état moral de Jean-Hughes se dégrader depuis quelques temps déjà, ils l’invitent à dîner chez eux, au milieu d’autres ami.e.s. Parmi les convives, une plantureuse brune aux cheveux longs ne tarda pas à attirer son attention. Prenommée Sabrina, elle avait une réputation de mangeuse croqueuse d’hommes. Mais Jean-Hughes s’ en moque, si elle peut lui permettre de remonter la pente moralement. Lui qui se sentait si Aline, revit aux côtés de Sabrina. Il revit. Les nuits sont toutes aussi torrides, les corps se mêlent d’ un amour sans limite. A sa nouvelle compagne, Jean-Hughes ne peut et ne veut dire aucuns mensonges. Sabrina est une  » machine à danser », ainsi entraine-t-elle son homme dans son sillage, dans son tourbillon noctambule, où elle écume les dancefloors. Sabrina, loin de son image de femme fatale, a connu l’aventure de faire un bébé toute seule, solitude totale. Elle appelera sa fille Hélène. Lors de sa rencontre avec Jean-Hughes, Hélène a déjà 8 ans. Le courant passe bien avec le chéri de sa maman.

Cet amour aussi inattendu qu’improbable, ce strange love du début, va se transformer en véritable histoire d’amour, forte, durable, profonde. « Angel-eyes », ainsi Jean-Hughes surnommait-il Sabrina, sa chérie, son trésor. Ils se firent la promesse de ne jamais se briser le cœur. A leurs amis communs Mel et Kim, grâce à qui les deux tourtereaux se sont rencontrés, ces derniers vont annoncer une grande nouvelle. Ils ont décidé de se marier, d’unir leurs destins. Mel et Kim vont sauter de joie à l’annonce de la nouvelle. Ils offriront le cadre de leur résidence de campagne pour accueillir la fête qui suivra la cérémonie officielle.

Désormais heureux, remis sur pieds, équilibré dans sa vie, Jean-Hughes va pouvoir se remettre à des projets professionnels, à des activités sportives et personnelles. Il a repris goût à la vie. L’avenir lui appartient. A lui et Sabrina.

Je vous laisse avec une sélection de titres de l’année 1987, qui ne manqueront pas de vous rappeler des souvenirs. Bonne écoute.

Guillaume.

BlackWater Holylight, ou le Hard-rock au féminin.



Bon voilà, je me remets à chroniquer des albums nouvellement parus, si si ça existe encore, croyez-en le discothécaire que je suis, la production est toujours là. La question de la vente est toute autre et mériterait débat. Donc ici, j’ai choisi de pencher mes oreilles sur un groupe entièrement féminin, le quintet Blackwater Holylight, qui vient de publier « Veils of Winter« .

Ne connaissant pas ce groupe, j’étais sans à priori. Mais j’ai vite déchanté.
La raison ? Elle a des ramifications multiples. D’abord, un son sourd, lourd, sans aucune originalité en cette année 2020. Son effet direct si je puis dire est que la musique produite, un hard-rock poussiéreux, puisé dans les tréfonds du Black Sabbath de la plus mauvaise période (90’s).

Moi qui suit fan de hard-rock depuis mes 15 ans et la découverte de Iron Maiden, Def Leppard et consorts de la vague NWOBHM des 80’s, et qui continue d’en écouter, même des groupes tels que Nightwish, Within Temptation, groupes de métal ou des chanteuses s’y donnent à gorges déployées, là avec Blackwater Holylight, je reste plus que sur ma faim. Le chant est étouffé, sans magie, sans envolées, et du début à la fin de l’album, ça ne décolle hélas pas.
Moi j’attendais davantage d’énergie, d’imagination, de singularité dans la musique proposée et portée par ce groupe 100% féminin. Ca reste lourd, convenu, et l’auditeur que je suis n’a jamais été transporté par la musique composée par ce quintet. Je trouve cela singulièrement désolant, car rares sont les groupes entièrement féminins, qui essayent de creuser leur trou au milieu des méandres d’un monde rock dominé par les hommes.
Tout au long des 8 titres proposés, de « Seeping Secrets » à « Moonlit », j’ai toujours attendu l’instant, la prouesse, qui me ferait me ravir d’avoir à chroniquer ce disque de ce quintet féminin. J’en ressors déçu,  mais peut-être que la fameuse « vérité » de ce groupe est à découvrir sur scène. Ce qui, avec les temps que nous vivons tous à travers le monde,  en ce moment, risque de prendre un certain temps. 

Si cet album, »Veils of Winter » m’a donc déçu, déplu, j’ose croire que le prochain sera bien meilleur. Je vous laisse néanmoins découvrir 2 titres pour vous faire une idée par vous-même.

Guillaume.

Il était une fois…1985!


Je sais ! Je sais!  je sais ! (comme disait Jean Gabin). Nous sommes juste en période post-rentrée scolaire, pour certains, en plein Tour de France pour d’autres. Mais, pour paraphraser la chanson d’Aznavour, en 1985, « à 18 ans… j’suis devenu responsable » m’a dit mon grand-père paternel lors d’un déjeuner dominical de circonstance. Cette année-là, en France, il s’est passé un certains nombre d’événements, dans tous les domaines. En voici quelques-uns afin de vous rafraîchir la mémoire :

Lancement du plan informatique pour tous, autorisation par le gouvernement de création de chaînes télévisuelles privées. En mai, La Géode, nouvelle structure culturelle située à la Villette, est inaugurée par François Mitterrand. Jack Lang, ministre de la culture, lance la première fête du cinéma, en juin. Coluche lance les restos du Cœur en Décembre. Côté sport, Mats Wilander remporte Roland-Garros, Chris Evert chez les femmes. Le FC Girondins de Bordeaux est champion de France de Football. La Juventus de Turin remporte la coupe d’Europe des clubs champions face à Liverpool, dans une ambiance de tragédie, au stade du Heysel à Bruxelles, où une bousculade fera plusieurs dizaines de victimes. Alain Prost devient le premier français champion du monde de formule 1.

Parmi les décès célèbres de cette année-là, on retrouve l’écrivain américain, spécialiste du polar, James Hadley Chase, les comédiens américains Rock Hudson, Rick Nelson et Yul Brynner, la comédienne américaine Louise Brooks, l’actrice française Simone Signoret, les réalisateurs américains Henry Hathaway et Orson Welles, le sismologue américain Charles Francis Richter (qui donna son nom au système de mesure des tremblements de terre, la fameuse échelle de Richter), le peintre franco-russe Marc Chagall. Enfin la primatologue Diane Fossey, spécialiste des grands singes, des Gorilles notamment. Elle est morte assassinée par des braconniers.

Place à l’histoire.

Nikita et Aziza sont amies de longue date. Nikita, grande blonde au port altier, Aziza, brune au regard revolver avec ses yeux d’un noir profond. Elles ont grandi dans la banlieue de Toulouse, cette ville rose chère à Claude Nougaro, qu’il a si magnifiquement chanté. Très complices, elles ont fréquenté les mêmes écoles, suivi les mêmes études d’architectures. Nikita se dirigea vers l’architecture des temps anciens, Aziza elle a préféré se tourner vers l’architecture d’intérieur. Un marché en plein essor. Ces deux amies, au vu de leur activité professionnelle très prenante, avaient bien sûr besoin de se détendre, se défouler. Pour cela, elles avaient l’habitude d’aller, trois nuits par semaine, au Macumba, club où se produisait régulièrement Phil Wonder, un pianiste-chanteur de jazz. Celui-ci s’employait chaque soir, à les distraire, et les emmener sur les chemins du jazz, encore et encore. Elles vivaient ainsi, par procuration, les tragédies subies par le peuple noir, au travers du talent de Phil Wonder.

Nikita fit un soir la connaissance d’un certain Johnny, photographe professionnel, qui travaillait pour des agences de voyages. Il leur ramenait des photos de voyages pour leurs différents catalogues. L’alchimie fut immédiate. Mais, de caractère dominante et cérébrale dans ses relations amoureuses, elle allait mettre à mal l’amour que lui porte Johnny, qui ne cessait jour après jour de dire à Nikita « I’am crazy for you ». En fait Nikita s’amusait avec Johnny. Il était son jouet.

Dans cette relation devenue particulière au fil du temps, Johnny avait de plus en plus l’impression de marcher seul, sinon à côté de Nikita. Devenir un étranger, voire un homme objet aux yeux de Nikita lui était insupportable. Il va vivre ce calvaire amoureux  pendant 1 an. Un soir, il s’est dit que ça ne pouvait plus durer. « Je me suis perdu à l’aimer « . Cela ne pouvait plus durer.

De son côté, son amie Aziza, caractère bien trempée, passionnée, vit une belle histoire d’amour avec Rebecca, jolie brune aux verts, qui travaille avec elle. Tout en relation fusionnelle, les deux amoureuses, se disent souvent « dear, I Will save all my love for you ». Installées dans le Lot de Rebecca situé près de la place du Capitole, elles n’hésitent pas à s’octroyer un week-end en amoureuses dans l’Ariège, près du Tourmalet et de la vallée d’Asp. Rebecca, dont la famille est originaire du coin, adore faites découvrir la région, sa beauté, son côté sauvage, à Aziza.

Il faut dire que les jolis endroits ne manquent pas. Des plateaux d’envols pour les parapentes, à la station de du plateau de Beille, connue pour ses parcours de skis de fond, ou encore Ax-les-Thermes et la jolie bourgade d’Ussat-les-Bains, ville thermales appréciées des habitants de la région. La montagne du Quié aussi, qui peut se gravir aux aurores matinales est un paradis pour les marcheurs, les vrais (petit clin d’œil ici à mon oncle Pierre, marcheur-grimpeur autrefois, qui n’hésitait pas à partir à l’aube le gravir pour revenir en pleine matinée. Courageux Pierrot!).

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Nikita et Aziza, bien que s’éloignant parfois au regard de leurs vies personnelles, quand elles se retrouvent, aiment à partager leurs péripéties de vies. Les années passent, la complicité reste intacte, les fous rires sont toujours là, comme aux premiers instants. Les deux amies croquent la vie, sereinement. Aujourd’hui, Nikita et Aziza sont des femmes épanouies, professionnellement et personnellement. Le temps passe mais n’a pas d’emprise sur leur relation. 

Je vous laisse avec une jolie playlist qui vous rappellera sans doute quelques souvenirs.

Guillaume.

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